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Grévistes au bord de l’explosion sur le parking Goodyear d’Amiens

Publie le jeudi 10 juillet 2008 par Open-Publishing
4 commentaires

Travail. Hier, une trentaine de CRS ont sécurisé l’accès au site du fabricant de pneus.

de JULIA PASCUAL

C’est une image que les dirigeants du fabriquant de pneus Goodyear Dunlop Tires France ne souhaiteront pas garder en mémoire. L’usine de production d’Amiens-Nord ne tourne pas, une majorité de ses 1 450 salariés est en grève depuis vendredi. Le ciel est lourd, les nuages sont gris et chargés. Sur le parking de l’usine, une trentaine de grévistes font les cent pas. Quelques drapeaux de la CGT flottent, tachés par la suie que les pneus brûlés ont dégagé ces derniers jours. Leurs carcasses métalliques gisent, carbonisées. Des « Non au 4x8 » marquent au feutre noir les murs de l’enceinte. Sans la musique assourdissante, la scène ressemblerait à un paysage lunaire. Mais les refrains de Claude François ou de Shakira sont là pour rappeler que les salariés sont bien vivants et ne comptent rien lâcher.

« Nourrice ». Mardi soir, une décision du tribunal de grande instance d’Amiens a pourtant ordonné la levée du blocage sous peine d’une astreinte de 2 000 euros par personne et par infraction. Une trentaine de CRS ont même débarqué hier matin pour assurer le bon respect de la justice. Ils reviendront à la prochaine relève. « Ils ont fait une haie d’honneur à ceux qui voulaient travailler. Mais, à part les intérimaires et les cadres, 95 % des salariés postés sont en grève », raille Didier Hérisson, délégué CGT. Les salariés postés sont précisément ceux concernés par le plan de réorganisation en quatre équipes (4x8) au lieu de cinq, concocté par la direction. Ce projet doit entraîner en outre la suppression sans licenciements de 450 emplois sur trois ans et un investissement de 52 millions d’euros sur le site. La CGT (majoritaire), SUD, FO et la CFDT refusent de le signer. « Aujourd’hui, les trois équipes de semaine sont aux 35 heures et les deux du week-end à 24 et 32 heures. Avec les 4x8, on supprime une équipe et tout le monde passe à 35 heures sur les huit jours de la semaine. Ceux qui étaient de la semaine n’auront plus qu’un week-end sur quatre. Et ceux du week-end vont devoir réorganiser toute leur vie familiale », déplore Reynald Jurek, secrétaire CGT. Cédric Pégis est de ceux qui travaillent le week-end : « Niveau salaire, rien ne changera. Mais on va devoir acheter un deuxième véhicule avec ma femme. Et on a fait une simulation, on aura 500 euros de frais de nourrice. »

La CFTC et la CFE-CGC, minoritaires, ont donné leur aval pour le passage au 4x8. Mais, sans le ralliement de la CGT, l’accord est caduc et la direction menace de procéder à 402 licenciements secs dès septembre. « Le chantage dure depuis un an et demi, tout le monde est à cran », relate Virgilio Mota Da Silva, délégué SUD. A tel point que, en face, à l’usine d’Amiens-Sud (ex-Dunlop) qui appartient au même groupe, la CGT a fini par signer en mars le passage au 4x8, malgré un référendum en octobre qui avait consacré le refus des salariés à 64,55 % dans les deux usines. Depuis la signature, les deux délégués syndicaux CGT de Dunlop ont été démis de leurs fonctions par la direction nationale CGT Chimie. « Si les salariés de Goodyear obtiennent quelque chose, nous on se sera fait avoir », témoigne Honoré Vinot, délégué du personnel SUD chez Dunlop.

Mais les salariés de Goodyear ne sont pas prêts d’avoir gain de cause. Pour la direction, l’heure n’est plus au dialogue mais à la reprise du travail. Pour faire valoir sa position, elle agite un second référendum organisé le 27 juin chez Goodyear. A la question « Pour la sauvegarde de votre emploi, acceptez-vous le changement d’organisation du temps de travail en 4x8, et ses contreparties ? » 72,8 % des votes exprimés sont allés au oui. Ce à quoi Virgilio Mota Da Silva réplique tout de go : « Si on isole le vote des salariés postés, il y a eu 328 oui sur 1 148 votants, soit 28 %. Le reste, ce sont des non. Ceux qui ont voté oui en majorité ce sont les cadres qui ne sont pas concernés ».

« Barrière ». Les mêmes cadres qui sortent de l’usine rouverte en rasant les murs. Quelques noms d’oiseau volent. La direction de Goodyear déplore des échauffourées : « Une première tentative de réouverture du site a échoué mardi soir. Ça a failli dégénérer. C’est pour ça qu’on a dû faire appel aux CRS. Une voiture a brûlé dans le week-end. Il y a eu des menaces. » Du côté des grévistes, les propos font bondir : « C’est nous qui les avons aidés à ouvrir la barrière mardi soir ! se défend Fernando. Ils n’ont pas rouvert parce qu’il n’y avait pas assez de monde pour le service de nuit. » « On a la haine, lâche Virgilio Mota Da Silva. On a fait une vingtaine de propositions pour arriver à 350 jours de production sans passer par les 4x8. Mais Olivier Rousseau [le PDG du groupe, ndlr] a son plan bien en tête. » L’intéressé répond : « Les dix-huit mois de négociation sont terminés. Chacun prend ses responsabilités et en assume les conséquences. »

Demain matin, la CGT fera valoir son droit d’opposition à l’accord sur les 4x8. Et la menace de licenciements secs prendra forme. Les syndicats misent encore un peu d’espoir sur une initiative du préfet pour organiser une ultime table ronde. « S’il faut se sacrifier pour de toute façon être licencié dans trois ans, ça vaut pas le coup. C’est pas avec un investissement de 52 millions d’euros qu’on va nous sauver », conclut Cédric Pégis.

http://www.liberation.fr/actualite/economie_terre/338155.FR.php

Messages

  • A tel point que, en face, à l’usine d’Amiens-Sud (ex-Dunlop) qui appartient au même groupe, la CGT a fini par signer en mars le passage au 4x8, malgré un référendum en octobre qui avait consacré le refus des salariés à 64,55 % dans les deux usines. Depuis la signature, les deux délégués syndicaux CGT de Dunlop ont été démis de leurs fonctions par la direction nationale CGT Chimie. « Si les salariés de Goodyear obtiennent quelque chose, nous on se sera fait avoir », témoigne Honoré Vinot, délégué du personnel SUD chez Dunlop.

    Voilà que les patrons deviennent particulièrement agressifs contre les salariés.
    J’ai du mal à comprendre pourquoi les cadres ne rejoignent pas la grève, c’est le moment ou jamais pour eux, surtout après le vote qui vient d’avoir lieu à l’assemblée, leur faisant sauter leurs RTT ! Faut être nuls pour refuser de se "battre", quand ses droits sont bafoués !

    • Bonjour,

      "J’ai du mal à comprendre pourquoi les cadres ne rejoignent pas la grève"

      Chaqu’un rêve d’être calif à la place du calif.

      Rien de nouveau sous le soliel.

      Hyoo

    • Ce qui est lamentable c’est que les confédérations syndicales, les fédérations des pneumatiques ou le l’automobile n’aident pas les camarades de GOODYEAR. Celà me fait penser à toutes ces luttes comme Carhaix, l’éducation nationale, la SNCF et je le parie comme cela sera fait pour la poste ou les syndicats se plaignent et se plaignent et se plaignent du gouvernement et des patrons mais ne font rien pour le combattre. Ah si j’oubliais des communiqués de plainte, des pétitions et des repas avec Sarkosy et des négociations pourries comme celles sur la représentativité syndicale et la diminution du temps de travail.

    • ""
      r,

      "J’ai du mal à comprendre pourquoi les cadres ne rejoignent pas la grève"

      Chaqu’un rêve d’être calif à la place du calif.

      Rien de nouveau sous le soliel.

      Hyoo"

      bien vu ,tres bien vu et c’est ainsi pour 90% d’entre eux

      mais certains sur ce site font encore mine de croire que l’encadrement peut être du coté des prolos dans les conflits

      alors que justement les conflits se font contre les attaques du patronat rélayées et appliquées par le cadres.
      alors les rares cadres de bellaciao ouvrez les yeux

      je n’ai pas de temps a perdre,et j’identifie mes ennemis,tant pis si de rare fois il s’en trouve une toute petite poignée qui est sur une position de classe.

      damien