Accueil > IRAN-NUKE : Le vrai et le faux

IRAN-NUKE : Le vrai et le faux

Publie le vendredi 17 février 2006 par Open-Publishing

de ANGELO BARACCA traduit de l’italien par karl&rosa

Le Traité de Non Prolifération (Tnp) garantit pour tous les pays le droit de développer des programmes nucléaires civils, sous le contrôle de l’AIEA, et pour les états nucléaires le devoir de coopérer à leur développement. D’autres pays l’ont fait sans qu’il y ait eu de remontrances : le Brésil (qui a développé jusqu’aux années 80 des programmes nucléaires militaires !) est en train de réaliser la technologie pour enrichir l’uranium et il a même en programme de le commercialiser. Ce qui se passe en Iran rappelle sous plusieurs aspects ce qui s’est passé en Irak. Ce fut Washington qui offrit au Shah un programme pharaonique de centrales nucléaires, avec la perspective de réaliser aussi la bombe. Même l’Europe a un squelette dans le placard, l’association de l’Iran à 10% dans le consortium européen Eurodif d’enrichissement de l’uranium : aujourd’hui gelée, mais qui pourrait peut-être expliquer les actuelles manœuvres maladroites de l’Ue.

En effet, Téhéran a commis des infractions, en cachant aux inspections de l’AIEA quelques installations nucléaires (mais qui s’est scandalisé quand on apprit que la Corée du Sud aussi avait fait des expérimentations secrètes d’enrichissement, en violant le Tnp ?). Ensuite ces installations ont été ouvertes aux inspections, et jusqu’à aujourd’hui l’AIEA affirme n’avoir trouvé aucun indice d’activités militaires, même si elle n’est pas encore en mesure de les exclure (pourvu que cela soit jamais possible, s’il est vrai que tant de pays, adhérents au Tnp, ont développé dans le passé des programmes nucléaires militaires : y compris l’Italie, si on s’en tient aux mémoires de Lelio Lagorio).

Il faut souligner aussi un aspect technique passé sous silence : même une fois l’uranium enrichi (dans l’isotope 235) à la teneur de 2-3% nécessaire pour les réacteurs, le passage à un enrichissement supérieur au 90% nécessaires à la réalisation des bombes peut ne pas être immédiat comme on tend à le faire croire ; et cela peut être difficile à réaliser dans un secret absolu, à cause de l’entité des opérations, des centrifuges et des installations nécessaires. Quand Israël commença aux années 60 la construction du laboratoire nucléaire souterrain de Dimona (caché à n’importe quelle inspection, car Israël n’adhéra pas au Tnp), les repérages aériens soviétiques révélèrent l’entité et indirectement la nature de l’installation : et le New York Times en parla.

Le véritable facteur déstabilisateur est l’arsenal nucléaire d’Israël, que personne ne dénonce. De même que personne ne dénonce les plans pour une attaque nucléaire à l’Iran. Au contraire, Chirac se met à la queue. Et il est obscène que, pour l’Ue, ce soient la Grande Bretagne et la France, elles-mêmes en état de violation éclatante du Tnp n’ayant pas obtempéré à l’obligation de désarmement nucléaire, et l’Allemagne, capable de réaliser la bombe dans de très brefs délais qui traitent avec l’Iran.

L’action embarrassée de l’Ue vise peut-être à conjurer une attaque militaire plutôt qu’à empêcher le programme d’enrichissement de l’uranium. Mais quand les négociateurs iraniens se déclarèrent prêts à démanteler leurs programmes d’enrichissement à l’échelle industrielle pourvu qu’ils puissent continuer des recherches sur un nombre limité de centrifuges sous le contrôle de l’AIEA, les Européens refusèrent à cause de la ferme opposition de l’administration Bush.

Le contrôle du Moyen Orient et de ses ressources a une importance stratégique dans la confrontation qui se dessine avec le bloc asiatique qui est en train de se former entre Chine, Russie, Républiques ex-soviétiques de l’Asie et Inde (avec laquelle les Usa concluent des contrats de fourniture de technologie nucléaire "civile" qui a servi à New Delhi pour réaliser les armes nucléaires). Il faut plus que jamais la création d’une Zone Libre d’Armes Nucléaires au Moyen Orient, décidée par la Conférence de paix de Madrid en 1991, confirmée par nombre de résolutions de l’Onu et assumée aussi dans la Déclaration de Téhéran signée le 21 octobre 2003 par la France, la Grande Bretagne et l’Allemagne avec l’Iran, vis-à-vis de son engagement à ne développer que de la technologie nucléaire civile.

http://www.ilmanifesto.it/Quotidian...