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ISRAËL - Des enfants en prison pour "atteinte à la sûreté de l’Etat"

Publie le vendredi 28 mai 2004 par Open-Publishing

Deux ONG veulent attirer l’attention sur le sort des 2 000 enfants palestiniens qui sont passés par les prisons israéliennes depuis trois ans et demi.

Les organisations non gouvernementales Save the Children [Sauvez les enfants] et Defence for Children International [Défense des enfants international] se sont associées à l’UNICEF pour lancer, à Jérusalem, une campagne de sensibilisation au sort des enfants palestiniens détenus dans les prisons israéliennes. Depuis le déclenchement de l’Intifada [à l’automne 2000], plus de 2 000 enfants ou adolescents palestiniens de 11 à 18 ans ont été emprisonnés par les forces de sécurité.

Pour l’heure, 353 d’entre eux sont toujours derrière les barreaux, aux mêmes conditions que les adultes, dans des établissements pénitentiaires et dans les camps de détention spéciaux. Selon les promoteurs de la campagne, 90 % des mineurs condamnés auraient lancé des pierres sur des soldats ou sur des chars.

Une "atteinte à la sûreté de l’Etat", selon les lois militaires édictées par Tsahal. Pris en flagrant délit ou arrêtés à la sortie de l’école sur dénonciation, ces enfants disparaissent de la circulation pendant plusieurs semaines (ou plusieurs mois) sans que les parents soient informés de leur interpellation. C’est le cas de Rakan Sweid (12 ans), un gamin de Jéricho dénoncé comme lanceur de pierres et enlevé par des soldats qui l’attendaient à la sortie des toilettes.

Au terme d’un procès expéditif, il a écopé de six mois de détention ferme, de huit mois de probation et d’une amende de 6 000 shekels [1 100 euros]. Tenus à distance, ses parents ont eu deux minutes en tout et pour tout pour le réconforter le jour de l’audience. Sauf en cas de révolte, comme ce fut le cas à plusieurs reprises en 2003, les médias israéliens n’évoquent pas souvent le cas des enfants palestiniens détenus.

En outre, il est impossible d’obtenir de Tsahal des informations sur l’âge de ces détenus, sur les faits qui leur sont reprochés et sur les peines prononcées.

Cependant, l’organisation israélienne de défense des droits de l’homme B’Tselem confirme les témoignages écrits ou filmés que les promoteurs de la campagne ont recueillis et selon lesquels une partie de ces détenus seraient soumis à des punitions dégradantes (l’interdiction d’aller aux toilettes avant 22 heures) ou à des mauvais traitements (privation de sommeil et coups durant les interrogatoires).

Devenus dépressifs et parfois poussés au suicide, bon nombre de ces mineurs sont également coupés de leur famille puisque leurs parents vivent dans les Territoires occupés et ne sont pas autorisés à pénétrer en Israël pour leur rendre visite. Une règle qui souffre pourtant de quelques exceptions puisque la Croix-Rouge parvient dans la plus grande discrétion à décrocher des permis de visite au compte-gouttes.

Le responsable du département juridique de Defence for Children International confie : "Nous disposons de témoignages précis sur des cellules de 9 mètres carrés dans lesquelles s’entassent une vingtaine d’enfants ainsi que sur les privations de nourriture et de lumière infligées à des gamins. Il faut que cela se sache."

Serge Dumont

http://www.courrierinternational.com/article.asp?obj_id=23614&provenance=zop.archives