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Interview de Patrick Le Hyaric directeur du Journal l’Humanité (video)

Publie le lundi 5 novembre 2007 par Open-Publishing

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Lors de la Fête de l’Humanité Rouen 2007, la caméra de Di2 s’est arrêtée sur Patrick Le Hyaric, directeur du Journal l’Humanité pour une interview conviviale. Valère Staraselski essayiste et romancier s’est prêté au jeu de l’interviewer. Alors comment se porte le journal l’Humanité aujourd’hui ?

Le journal L’Humanité

Historique du journal

 La naissance du quotidien socialiste l’Humanité (1904)

Le premier numéro de l’Humanité paraît le 18 avril 1904. Pour Jean Jaurès son fondateur, ce nouveau quotidien socialiste (sous-titre du journal "journal quotidien socialiste") doit être dans un premier temps un outil pour l’unification du mouvement socialiste français et par la suite un des leviers de la lutte révolutionnaire contre le capitalisme.

Dans son premier éditorial, Jaurès souhaite fixer deux règles de fonctionnement à son nouveau journal : la recherche d’ "information étendue et exacte" pour donner "à toutes les intelligences libres le moyen de comprendre et de juger elles-mêmes les événements du monde", et l’indépendance financière.

 L’Humanité de Jaurès (1904-1914)[1]

Lors de sa naissance en 1904, l’Humanité ne représente qu’une partie du mouvement socialiste français. Au sein de sa rédaction figurent notamment René Viviani, Aristide Briand, Léon Blum, Jean Longuet, Lucien Herr, Jean Allemane, Octave Mirbeau, Henry de Jouvenel, Abel Hermant et Albert Thomas.

L’unification des socialistes français au sein de la SFIO en 1905 ouvre le journal à l’ensemble du mouvement socialiste français (notamment au guesdistes). En 1911, la SFIO fait de l’Humanité son organe officiel au congrés de Saint Quentin.

Dans le contexte international de plus en plus tendu du début du XXe siècle, le journal de Jaurès défend résolument des positions pacifistes en accord avec l’internationalisme du mouvement socialiste. Le journal est également très présent dans le combat pour la laïcité et se veut le défenseur de la classe ouvrière.

Ces dix premières années sont difficiles économiquement pour le journal. Après un lancement réussi à 140 000 exemplaires, le journal tombe à 15 000 exemplaires en 1905. Il remonte ensuite lentement avec 80 000 exemplaires en 1912.

Durant l’été 1914, la vie du journal est totalement bouleversée par deux événements étroitement liés :

 l’assassinat de son directeur Jean Jaurès par le nationaliste Raoul Villain au café du croissant le 31 juillet 1914.
 le déclenchement de la Première Guerre mondiale.

 L’Humanité et la Première Guerre mondiale (1914-1920)

Le déclenchement de la guerre, la mort de Jean Jaurès et le ralliement de la majorité des dirigeants socialistes français à l’union sacrée transforment brutalement le journal durant l’été 1914.

Pierre Renaudel succède à Jaurés et choisit une ligne éditoriale favorable à la guerre au nom de la défense de la République. Selon l’historien Alexandre Courban, le journal se trouve alors pris sous une triple contrainte :

* contrainte étatique avec la censure. * contrainte partisane, (les socialistes majoritaires favorables à la guerre imposent leur ligne). * contrainte économique du fait du rationnement.

Finalement en octobre 1918, Pierre Renaudel est remplacé à la tête de l’Humanité par Marcel Cachin. Ce changement traduit la prise de distance croissante des socialistes avec l’union sacrée.

 L’Humanité : organe du Parti communiste français durant l’entre-deux-guerres (1920-1939)

L’année 1920 est un nouveau tournant pour l’Humanité. En effet lors du Congrès de Tours de la SFIO, les deux tiers des délégués votent l’adhésion à l’Internationale communiste, transformant la SFIO en SFIC (plus tard parti communiste).
Le journal suit la majorité et devient donc l’organe officiel du jeune PCF.

Durant cette période, la ligne éditoriale du journal suit la ligne politique du PCF. Dans les années vingt, le journal mène une intense campagne contre la Guerre du Rif. En 1926, Paul Vaillant-Couturier devient rédacteur en chef. Sous sa direction dans les années 1930, le journal dépasse les 300 000 exemplaires notamment au début du Front populaire. L’Humanité insiste alors sur l’antifascisme, sur la défense de la République espagnole et prône le modéle de l’URSS de Staline.

En tant qu’organe central du PCF, l’Humanité est à la fois un outil de mobilisation des militants et un journal d’information. Une autre particularité de l’Humanité est la place que joue les lecteurs dans la vie du journal. Ils sont souvent utilisés comme contributeurs (les rabcors, correspondants ouvriers) ou comme diffuseurs (au sein des CDH, comité de défense de l’Humanité). Pour répondre à ses besoins financiers, le journal crée en 1930 la fête de l’Humanité.

L’Humanité dans la Résistance durant la Seconde guerre mondiale (1939-1945) [modifier]

Le 27 août 1939 le gouvernement Daladier interdit de parution l’Humanité aprés l’annonce du pacte germano-soviétique. Cette interdiction confirmée par la suite par les autorité de Vichy et l’occupant allemand oblige le journal à la clandestinité jusqu’à la libération de 1944 (malgré la demande rejeté de reparution faite en juin 1940 auprès des autorités d’occupations allemandes[2], initiative, désavouée par de nombreux militants puis par l’Internationale communiste, qui l’avait d’abord laissé faire).[3]

L’Humanité parait clandestinement pendant cinq ans (383 numéros diffusés à 200 000 exemplaires[4]) jouant un rôle important dans la Résistance. De nombreux journalistes de sa rédaction périrent dans la lutte contre l’occupant nazi, comme Gabriel Péri, député de Seine-et-Oise, responsable de sa rubrique internationale, qui fut fusillé le 15 décembre 1941 au Mont Valérien. Le journal reparait librement le 21 août 1944 durant l’insurrection de Paris.

 L’Humanité de 1945 à 1994

Aprés 1945, l’Humanité renoue avec la situation de l’Entre-deux-guerres. Organe central du PCF, sa ligne éditoriale suit la ligne du parti et mêle information et campagne de mobilisation.

Dans le contexte de guerre froide, le journal est évidemment prosoviétique. Le 7 novembre 1956, alors que la situation internationale est extrêmement tendue (révélation du XXe congrès du Parti communiste de l’Union soviétique sur le stalinisme, intervention soviétique en Hongrie, crise du canal de Suez et guerre d’Algérie) le siège de l’Humanité (et du comité central du PCF) est attaqué par une foule de militants de droite qui tentent de l’incendier. Devant l’inertie voire la complicité de la police, le bâtiment est défendu par le personnel du journal et des militants du PCF. Ces attaques font trois morts. Lorsque l’Armée rouge entre en Hongrie, en novembre 1956, le journal titre : « Budapest retrouve le sourire ».[5]

Parallèlement, le journal est le seul quotidien français à soutenir partout dans le monde les luttes de libération nationale (décolonisation) ce qui lui vaut de nombreuses interdictions de parution notamment durant les guerres d’Indochine et d’Algérie. Les articles de Madeleine Riffaud sur la guerre d’Algérie, qui lui valurent une tentative d’attentat de l’OAS, puis sur la guerre du Vietnam depuis les maquis Vietcong illustrent bien ses positions.

En 1945, le journal tire à 400 000 exemplaires et est la figure de proue de la presse communiste. Sa diffusion décline ensuite (150 000 exemplaires en 1972, 107000 exemplaires en 1986) parallèlement au déclin de l’influence du PCF et à la crise de la presse quotidienne.

 L’Humanité de 1994 à aujourd’hui

Après le XXVIIIe congrès du Parti communiste français (1994), la mention « organe central du PCF » est remplacée par « journal du PCF ». À l’occasion d’une nouvelle formule en 1999, la mention du lien avec le parti est supprimée. Le PCF reste selon les statuts « l’éditeur » du journal mais sa direction ne préside plus officiellement à l’élaboration de sa ligne éditoriale[6]. Les militants du PCF restent cependant très impliqués dans la diffusion du journal (essentiellement à travers la vente militante de l’Humanité Dimanche)[7].

Après avoir baissé au-dessous des 70 000 exemplaires, il est un des rares quotidiens aujourd’hui à redresser son audience[8] ; sa survie fragile est assurée par le financement de groupes privés, bien que cela ne leur ouvre pas de pouvoir décisionnel sur le journal[9].

La question de la survie du journal sous sa forme quotidienne est toujours en suspens.

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