Jacques Chirac soutient les Bleus et... Villepin !

Jacques Chirac a cru voir une brèche dans l’actualité déprimante : la France en huitièmes de finale de la Coupe du monde de foot, son musée des « arts premiers » enfin inauguré. Il s’y est engouffré, pour profiter lui aussi de ce court moment d’allégresse. Intervenant hier soir au journal télévisé de France 2, le président s’est pourtant contenté d’apporter son soutien aux Bleus, comme à son premier ministre impopulaire. Pas de remaniement ministériel en vue. Sera-t-il candidat à la présidentielle de 2007 ? « Vous le saurez l’an prochain », a répondu Chirac à Arlette Chabot.

L’hôte de l’Elysée a rappelé à l’ordre la majorité parlementaire, en froid avec Dominique de Villepin. C’est tout. Pas de quoi emballer les Français. On se demande même ce qui a poussé Chirac à imposer cette intervention télévisée, à deux semaines de la traditionnelle interview du 14 juillet. « Le Président est victime d’une vieille croyance, qui fait de la télévision un instrument magique de communication politique, estime Thierry Saussez, patron d’Image et Stratégie et proche de Nicolas Sarkozy. En s’exprimant sur le petit écran, le chef de l’Etat crée une attente, qui risque d’être déçue s’il n’annonce rien de majeur. »

Pas grand-chose à dire

Chirac a mieux à faire, estime ce conseiller en communication, qui a participé à de nombreuses campagnes dans le camp de l’actuelle majorité : retourner sur le « terrain », retrouver le contact direct avec les Français, cette relation presque « physique » à l’origine de ses succès électoraux d’antan. « Chirac, c’était d’abord une énergie. Or, aujourd’hui, c’est Nicolas Sarkozy qui incarne cette énergie. En cela, il est le véritable héritier de Jacques Chirac. » La « turbo » Chirac carbure au diesel. Les déplacements en province se font rares. Le président, on le sait, préfère désormais la Chine aux Yvelines, le Maroc au Médoc. Mais cette aura internationale n’accroît pas sa popularité dans l’Hexagone. Au contraire.

« Jacques Chirac suit toujours les vieux conseils de Jacques Pilhan », constate Roland Cayrol, directeur général de l’Institut de sondages CSA. Conseils que le maître en communication prodiguait hier à François Mitterrand : se taire tant qu’on peut, et, de temps à autre, sortir du bois pour faire beaucoup de bruit. Mitterrand savait les appliquer à merveille. A chaque intervention ou presque, un coup de tonnerre, un changement de cap. « Le problème, c’est que Chirac n’a pas grand-chose à communiquer aux Français », poursuit Roland Cayrol. Jacques Pilhan est mort, Claude, la fille du président, a pris le relais. Sans vraiment convaincre.

La « fatigue du pouvoir » se ressent chaque jour davantage, remarque Roland Cayrol. Fatigue physique sûrement, mais aussi une économie dans les déplacements, une « gestion des risques » qui réduit les visites en province au strict minimum. Faute d’annonce spectaculaire, Chirac se contente d’« expliquer », de commenter. De rassurer. « La fronde au Parlement contre le premier ministre, sans précédent depuis 1962, inquiète beaucoup le président », note Thierry Saussez. Il s’agit de calmer les esprits, en redonnant toute sa confiance à Dominique de Villepin. Les députés peuvent être sensibles aux remontrances de l’Elysée. Pas les Français.

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