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L’artiste marocain Mounir Fatmi censuré sur la Côte d’Azur

par Roxana Azimi

Publie le mercredi 25 février 2015 par Roxana Azimi - Open-Publishing
2 commentaires

Il règne un parfum d’autocensure dans les centres d’art en France. Après le retrait en janvier d’une installation de la Marocaine Zoulikha Bouabdellah du Pavillon Vendôme à Clichy-La-Garenne (Hauts-de-Seine), c’est au tour de la Villa Tamaris, à la Seyne-sur-Mer (Var), de faire machine arrière devant une œuvre de Mounir Fatmi.

En novembre 2014, ce centre d’art avait contacté l’artiste marocain pour présenter sa vidéo Sleep Al Naim dans l’exposition « C’est la nuit ! », programmée en juin prochain. Inspirée de Sleep, un film de l’artiste américain Andy Warhol, cette œuvre représente un dormeur modélisé d’après les traits de l’écrivain Salman Rushdie. Mounir Fatmi a beau convoquer l’auteur des Versets sataniques, la vidéo n’a rien de provoquant. Elle est même actuellement exposée au Musée d’art moderne et contemporain (Mamco) de Genève sans susciter le moindre remous.

Voir ici : « Sleep Al Naim »

Pourtant, le 10 février, la Villa Tamaris décide d’y renoncer. « Il va de soi que ce n’est pas le sens de votre œuvre qui est en cause, mais la période qui peut favoriser les utilisations partisanes, contraires, hostiles, de votre travail. Vous nous jetez au milieu d’une polémique dont les enjeux sont brouillés par un incroyable brouhaha politico-médiatique (sur le Web en particulier) qui n’apporterait rien à la compréhension du débat », écrit la commissaire Evelyne Artaud à l’artiste.

Directeur du lieu, Robert Bonnacorsi confie avoir mûrement réfléchi avant de prendre cette décision. « A l’heure actuelle, tout est piégé, tout est surinterprété, mal interprété, se justifie-t-il. On est dans une espèce d’hystérie et je ne veux pas me retrouver dans un faux débat, alors que l’objet de l’exposition est tout autre. C’est une dérive poétique autour de la nuit sans lien avec l’actualité. »

Ce dernier a proposé d’emprunter une autre vidéo, suggestion que Mounir Fatmi juge irrecevable. « J’ai quitté en 1999 le Maroc pour cette liberté d’expression que je suis en train de perdre ici, en France, déplore l’artiste. Je savais que le combat ne serait pas facile et que rien n’était acquis. Mais je ne pensais jamais qu’un jour on pouvait être assassiné en plein Paris à cause d’une caricature, ou que des directeurs de centres d’art allaient censurer des artistes pour éviter toute polémique... »

http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/02/23/l-artiste-marocain-mounir-fatmi-censure-sur-la-cote-d-azur_4581671_3212.html

Messages

  • Entre ce genre de décisions et le battage médiatique insensé dès qu’un drone... ou dès qu’un cimetière..., les islamistes radicaux ont gagné (ainsi que tous ceux qui ont des intérêts objectifs communs avec eux, et ils sont nombreux).

    Et pendant ce temps les populations de culture musulmane continuent d’être maltraitées, au plus grand intérêt de ces islamistes qui l’utilisent comme justification (c’est aussi un bon terreau pour la "cueillette" de jeunes djihadistes).

  • L’autocensure c’est plus efficace que la censure.
    C’est l’interdit qu’on se fait à soi-même de dire, écrire, peindre, .. ce que l’on pense face à ce avec quoi on est en désaccord.
    L’autocensure peut être le début de l’acquisition de la pensée du censeur car on ne peut vivre éternellement dans le silence sauf à se battre. Ce que ne font pas les responsables des expositions concernées par peur mais, surtout, par manque de soutien des politiques et des médias qui eux, jouent sinon l’accord avec les terroristes-censeurs, jouent la carte électoraliste ou économique.
    "Pas d’amalgame" est un des arguments de ces censeurs auto-censeurs. Mais justement, cet argument est déjà un présupposé d’amalgame qui empêche tout débat sein et constructif.
    Quel rôle avons-nous, nous communistes dans ce cas ?
    Devons-nous nous taire ; approuvez l’interdiction, le retrait ; dénoncer la peur ; ... ?