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L’éducation autrement, voyage dans une école Freinet

Publie le mardi 16 juin 2009 par Open-Publishing
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Buissonnière, « libre » ou gratuite, L’école, depuis L’Académie de Platon
et Aristote jusqu’à la ZEP, semble chercher à la fois à se faire admettre,
autoriser et comprendre, mais encore à faire qu’un enfant sache « penser par lui-même ». Mais de nos douloureux souvenirs aux « incivilités » d’aujourd’hui, le temps des bons points est revenu à la mode. La Brique, curieuse et mauvaise élève du « journalisme », porte son regard vers les pédagogies alternatives, qui semblent faire une vraie place aux enfants.

Premier volet de notre enquête sur ces laboratoires du futur social.
Lexicalement, l’éducation fait penser à un mélange : voué à l’émancipation, à la libération. Le mot semble ainsi né d’un préfixe
privatif é- (comme dans é-vider, é-conduire), puis du radical verbal -ducare, de dux (guide), en latin. Quelquechose comme « faire sortir des
sentiers battus ». Mais un mix aux résonnances glaçantes, aussi, parfois.
Coups de règles sur les doigts, zéro de conduite, blouses et redressement... De quoi parle-t-on, en « éduquant » ? Ordre ou justice, où se trouve la priorité ? Allez savoir. Là où s’entendent néanmoins Luc
Ferry et les anars, c’est sur la nécessité d’accompagner le jeune. Vers
quoi ? Ça dépendra de la culture maison. Discipline et obéissance, ou
développement et autonomie.

De Charlemagne à Ferry, l’Etat et son éducation

En rendant obligatoire l’école, voici 127 ans, le législateur, plus que
préparer à l’armée et au travail, a laissé à l’enfance le bénéfice de
surtout ne pas taffer 15h. par jour dans une mine ou une auberge.
En la rendant laïque, il a enlevé à l’Eglise le monopole des mythes
fondateurs : on descend du singe grâce à Lamarck et Darwin, tandis qu’Adam
et Eve reprennent leur place dans un roman célèbre, La Bible. Mais ces
mythes sont bien vite remplacés.

Histoire de France, Vercingétorix, De Gaulle ou Rousseau. Plus de
religion, mais de l’Instruction Civique. Et quand l’Etat opère le passage
de l’ex-Instruction Publique à l’Education Nationale, en utilisant
l’Ecole, il semble n’avoir pas laissé tout le monde satisfait. Les réacs,
mais aussi des progressistes. Ainsi, si l’éducation ne passe pas seulement
par l’Ecole, pour « tirer vers le haut », faire « progresser » un jeune,
voire la société entière, il conviendrait alors de ne plus compter sur la
seule bienveillance des amis autoproclamés de la jeunesse. Télévision,
religions, marchandisations : les chausses-trappes et les pièges,
définitivement, restent nombreux.

L’école et l’éducation sont des sujets politiques. Tout pays serait le
produit de son école, et non l’inverse ? En France, le Certif’ (-icat
d’études), le bac ou la licence sont des moments particulièrement
marquants de la vie. L’école nous marque jusqu’à la digestion des valeurs
qui sont censées guider la société, pour les ériger en dogmes dominants.

Sans ça, comment accepter la compétition, la sélection
(« à-condition-que-les-chances-soient-égales »), le respect de la Culture,
des règlements et des premier-es de la classe ? Celui des hiérarchies et
de l’Ordre ?

Dressage ou autonomie ?

Pour contrôler ou libérer, la pédagogie est le ciment du métier
d’éducation. Afin de caractériser ces micro-sociétés que sont les lieux
dits « éducatifs », La Brique s’intéressera autant aux matraques qu’aux
mains tendues. On pourrait basiquement opposer la pédagogie classique,
autoritaire, allant du maître vers l’élève, à des pédagogies modernes,
fondées sur des principes coopératifs ou anti-autoritaires, accompagnant
l’enfant dans une recherche d’autonomie.

Au lieu de ça, ce qui transparaît aujourd’hui, c’est ce mélange des
pratiques de « cours » mis en place par les profs, mais surtout et
toujours les plaintes d’idéologues s’exprimant sur tout, et notamment sur
le besoin d’un regain d’autorité. Sarkozy, comme Chirac ou Royal avant
lui, ne veut-il pas « restaurer la place du maître et de l’adulte » ?
L’adulte, récemment, se serait-il fait « flouer » ?

Restauration, le mot est lancé. Les enfants ne comprendraient que
l’autorité, le respect, l’honneur et l’obéissance. Tendance lourde et
tenace du conservatisme, même si la gauche gouvernementale a su parfois
favoriser l’installation de lieux alternatifs, tels les lycées autogérés
de Saint-Nazaire, le Lycée Autogéré de Paris ou encore l’école Freinet de
Mons-en-Baroeul. À défaut de leur donner toujours des moyens de
subsistance dignes de ce nom.

Des essais de pédagogies alternatives

Bien avant que Gaby Cohn-Bendit n’en appelle à Mitterrand dans un appel
resté célèbre [1], des pédagogies et des écoles alternatives ont été
développées au cours du XXème siècle. Ces pionnier-es étaient éducateur,
éducatrice, psychologue, enseignant-e, infirmière... Tous et toutes
tendaient à mettre en place une éducation populaire, sociale et souvent
militante. Les liens avec le mouvement social, réformiste ou
révolutionnaire (du PS aux anarchistes en passant par le PCF), ont permis
la concrétisation de projets. Citons l’école Bonaventure à l’Ile d’Oléron
(1981-2001) ou Summerhill, structure alternative en Angleterre (depuis
1921). Les écoles du réseau Montessori se sont également distinguées dans
la mise en oeuvre de pratiques libératrices pour les enfants.

Le mouvement Freinet a attiré notre attention en premier. Direction
Mons-en-Baroeul, groupe scolaire Hélène Boucher (210 élèves sur neuf
classes), une école où tous les enseignant-es pratiquent cette pédagogie.

L’Education Nationale a accepté sa mise en place sous condition d’une
évaluation par une équipe de chercheurs. Les résultats sont très positifs
d’après les conclusions du rapport. La Brique tente de faire le point sur
cette expérience pédagogique, militante et ... humaine.


Sujets du dossier

Edito du dossier éducation

Célestin Freinet, pédagogue révolutionnaire http://labrique.lil

Une pédagogie alternative en milieu populaire

Une journée classe dans une école Freinet

A propos du travail de l’équipe de recherche qui a suivi le projet

Francisco Ferrer


[1Jean-Gabriel, frère de Daniel, lance un appel qui aboutit à la
création d’écoles expérimentales, comme celle de St-Nazaire, et dont il
fut fondateur.

Messages

  • Le mouvement freinet a fait le jeu des politiciens ultra-libéraux. Les adeptes de ces pédagolâtries -certes sincères- sont manipulés par ceux qui -sous couvert d’autonomie de l’Ecole- veulent détruire l’Education nationale.

    • Pourrais tu développer un peu ton idée stp, et apporter des éléments (si tu en as bien sûr) ? Ou bien s’agit il d’une critique purement idéologique ?

      Tu préfères peut être l’école rrrrrrréééééééépublicaine à la Jules Ferry, institution chargée de veiller à produire de bon petits travailleurs respectueux et obéissants, et de veiller au maintien et à la reproduction des inégalités sociales ?

      Bientôt tu vas nous dire que la revendication autogestionnaire fait le jeu du capital elle aussi...

    • Affirmation un peu trop péremptoire pour être crédible. Des comptes personnels à régler ? Des échecs personnels à justifier ?

      Où sont les arguments ?

      Je peux témoigner du contraire car, pour avoir travaillé des décennies en pédagogie Freinet, avec des classes hétérogènes (le must !!) dans une école "ordinaire", ça a suscité suffisamment de questions dérangeantes, d’oppositions des nantis ... mais aussi de dialogues avec les familles et d’enthousiasme et de réussite des enfants pour montrer que cela pouvait faire bouger les lignes.

      Je ne nie pas les maladresses et dérives ici ou là mais, si le gouvernement a caché les excellents résultats des établissements expérimentaux des années 70 et 80 et a refusé de les étendre, c’est qu’il en a eu peur !

      Imaginez ! Si on avait été en masse à former des élèves à l’esprit critique et à la liberté, à la coopération et à l’initiative !

      Certes, la pédagogie (et non le pédagogisme, n’en déplaise à quelques dinosaures !) ne suffit pas à elle seule à préparer la Révolution.

      Certes, "l’autonomie" à la SArkoDArcos n’est qu’un faux nez du libéralisme.

      Mais, bon sang, ENSEIGNEMENT MUTUEL , REFLEXION COLLECTIVE, et...

      ACTION !!!

      Qu’est-ce qu’on attend ?

    • Pour avoir exercé dans l’esprit de Célestin freinet, et du GFEN, je confirme que ce type de pédagogie permet une ouverture d’esprit qui favorise le développement intellectuel de l’enfant. Que certains, soit pas méconnaissance ou par échec personnel s’en prennent aux écoles ou classes "freinet" n’est pas étonnant. Ils rejoignent en cela les tenants d’une école au service des idées dominantes et non une école d’ouverture et de critique. Qu’ils lisent un peu les textes de Freinet, s’informent des expériences ayant eu lieu, qu’ils aillent y voir de près, avant de lancer des affirmations sans argument. Ensuite, on pourra discuter. Bien sûr, des dérives ont eu lieu, sans doute... mais de là à mettre tout le monde dans le même panier !