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L’état et la religion : dans "la question juive" de Marx

Publie le mercredi 21 janvier 2009 par Open-Publishing
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nous voyons que Bauer ne considère la question juive que d’un côté.

Il ne suffisait nullement de se demander : Qui doit émanciper ? Qui doit être éman­cipé ? La critique doit se poser une troisième question. De quelle sorte d’éman­ci­pation s’agit-il ? Quelles conditions sont fondées dans l’essence de l’émancipation réclamée ? La critique de l’émancipation politique n’était elle-même que la critique finale de la question juive et sa véritable résolution en la « question générale de l’époque ».

Parce qu’il n’élève pas la question à cette hauteur, Bauer tombe dans des contra­dictions. Il pose des conditions qui ne sont pas fondées dans l’essence de l’émanci­pation politique. Il soulève des questions qui ne rentrent pas dans son problème, et il résout des problèmes qui laissent subsister sa question intacte. Quand Bauer dit des adversaires de l’émancipation juive : « Leur unique faute n’était que de supposer que l’État chrétien était le seul vrai et de ne pas le soumettre à la même critique que celle qu’ils adressaient au judaïsme. » (Ibid...), nous voyons l’erreur de Bauer dans ce fait qu’il soumet seulement à la critique l’ « État chrétien » et non pas l’ « État en soi », qu’il n’examine pas le rapport de l’émancipation politique et de l’émancipation hu­mai­ne et pose donc des conditions qui ne s’expliquent que parce que, manquant de sens critique, il confond l’émancipa­tion politique et l’émancipation universelle humai­ne.

Si Bauer demande aux Juifs : Avez-vous, en vous plaçant à votre point de vue, le droit de revendiquer l’émancipa­tion politique ? Nous posons la question inverse : Le point de vue de l’émancipation politique a-t-il le droit de demander au Juif la suppres­sion du judaïsme, et à l’homme la suppression de toute religion ?

Ce n’est que dans les États libres de l’Amérique du Nord, du moins dans certains de ces États, que la question juive perd sa signification théologique et devient une question vérita­ble­ment laïque. Ce n’est que dans les pays où l’État existe avec son développement complet que le rapport du Juif et, en général, de l’homme religieux, avec l’État politique, par conséquent le rapport de la religion avec l’État, peut se manifester avec son caractère propre et sa toute pureté. La critique de ce rapport cesse d’être de la critique théologique, dès que l’État cesse de se placer vis-à-vis de la religion à un point de vue théologique, dès qu’il se place au point de vue politique et qu’il agit vraiment en État. La critique devient alors la critique de l’État politique. En ce point, où la question cesse d’être théologique, la critique de Bauer cesse d’être critique. « Il n’existe aux États-Unis ni religion de l’État, ni religion déclarée celle de la majorité, ni prééminence d’un culte sur un autre. L’État est étranger à tous les cultes. » (Marie, ou l’esclavage aux États-Unis, etc., par G. de Beaumont, Paris, 1835, p. 214.) Il y a même des États de l’Amérique du Nord, où « la constitution n’impose pas les croyan­ces religieuses et la pratique d’un culte comme condition des privilèges politiques. » (Ibid., p. 225.) Et pourtant « on ne croit pas aux États-Unis qu’un homme sans religion puisse être un honnête homme ». (Ibid., p. 224.) Et l’Amérique du Nord n’en reste pas moins le pays de prédilection de la religiosité, ainsi que Beaumont, Tocqueville et l’Anglais Hamilton l’assurent d’une seule voix. Les États de l’Amérique du Nord ne nous servent cependant que d’exemple. La question est celle-ci : Dans quel rapport l’émancipation politique achevée se trouve-t-elle vis-à-vis de la religion ? Si, dans le pays de l’émancipation politique achevée, nous trou­vons non seulement l’existence, mais l’existence fraîche et vigoureuse de la religion, la preuve est faite que l’existence de la religion ne s’oppose en rien à la perfection de l’État. Mais, comme l’existence de la religion est l’existence d’un manque, la source de ce manque ne peut être recherchée que dans l’essence même de l’État. Nous ne voyons plus, dans la religion, le fondement, mais le phénomène de la limitation laïque. C’est pourquoi nous expliquons l’embarras religieux des libres citoyens par leur embarras laïque. Nous ne prétendons nullement qu’ils doivent dépasser leur limitation religieuse, dès qu’ils abolissent leurs barrières laïques. Nous ne transfor­mons pas les questions laïques en questions théologiques. Nous trans­formons les. questions théologiques en questions laïques. Après que l’histoire s’est assez long­temps résolue en superstition, nous résolvons la superstition en histoire. La question des rapports de l’émancipation politique et de la religion devient pour nous la question des rapports de l’émancipation politique et de l’émancipation humaine. Nous critiquons la faiblesse religieuse de l’État politique, en critiquant l’État politi­que, abstraction faite de ses faiblesses religieuses, dans sa construction laïque. La contra­diction entre l’État et une religion déterminée, le judaïsme par exemple, nous lui don­nons une expression humaine, en en faisant la contradiction entre l’État et des éléments laïques déterminés, en transformant la contradiction entre l’État et la religion en général en contradiction entre l’État et ses présuppositions en général.

L’émancipation politique du Juif, du chrétien, de l’homme religieux en un mot, c’est l’émancipation de l’État du judaïsme, du christianisme, de la religion en général. Sous sa forme particulière, dans le mode spécial à son essence, comme État, l’État s’émancipe de la religion en s’émancipant de la religion d’État, c’est-à-dire en ne reconnaissant aucune religion, mais en s’affirmant purement et simplement comme État. S’émanciper politiquement de la religion, ce n’est pas s’éman­ciper d’une façon absolue et totale de la religion, parce que l’émancipation poli­tique n’est pas le mode absolu et total de l’émancipation humaine.

La limite de l’émancipation politique apparaît immédiatement dans ce fait que l’État peut s’affranchir d’une barrière sans que l’homme en soit réellement affranchi, que l’État peut être un État libre, sans que l’homme soit un homme libre. Bauer le concède lui-même tacitement, en liant l’émancipation politique à la condition sui­vante : « Il faudrait, du reste, supprimer tout privilège religieux, donc également le mono­pole d’une église privilégiée ; et si d’aucuns ou même la très grande majorité croyaient encore devoir remplir des devoirs religieux, cette pratique devrait leur être abandonnée comme une affaire d’ordre absolument privé. » L’État peut donc s’être émancipé de la religion, même si la très grande majorité ne cesse pas d’être reli­gieuse, du fait qu’elle l’est à titre privé.

Mais l’attitude de l’État, de l’État libre surtout, envers la religion n’est que l’attitude, envers la religion, des hommes qui constituent l’État. Par conséquent, c’est par l’intermédiaire de l’État, c’est politiquement, que l’homme s’affranchit d’une barrière, en s’élevant au-dessus de cette barrière, en contradiction avec lui-même, d’une manière abstraite et partielle. En outre, en s’affranchissant politiquement, c’est par un détour, (Umweg) au moyen d’un intermédiaire, intermédiaire nécessaire, il est vrai, que l’homme s’affranchit. Enfin, même quand il se proclame athée par l’intermé­diaire de l’État, c’est-à-dire quand il proclame l’État athée, l’homme demeure toujours limité au point de vue religieux, précisément parce qu’il ne se reconnaît tel que par un détour, au moyen d’un intermédiaire. La religion est donc la reconnaissance de l’homme par un détour et un intermédiaire. l’État est l’intermédiaire entre l’homme et la liberté de l’homme. De même que le Christ est l’intermédiaire que l’homme charge de toute sa divinité, de toute sa limitation religieuse, l’État est l’intermédiaire que l’homme charge de toute sa non-divinité, de toute sa limitation humaine.

Messages

  • Le projet des dirigeants sionistes n’a jamais été de partager la terre de Palestine. De David Ben Gourion, père fondateur de l’Etat d’Israël (« L’acceptation de la partition ne nous engage pas à renoncer à la Cisjordanie. On ne demande pas à quelqu’un de renoncer à sa vision. Nous accepterons un Etat dans les frontières fixées aujourd’hui ; mais les frontières des aspirations sionistes sont les affaires des Juifs et aucun facteur externe ne pourra les limiter ») à Ehud Olmert, actuel Premier Ministre (« Chaque colline de Samarie et chaque vallée de Judée est partie intégrante de notre patrie historique (…). Nous revendiquons avec fermeté le droit historique du peuple d’Israël à l’entièreté de la terre d’Israël »), la souveraineté israélienne sur l’ensemble de la Palestine du mandat britannique est demeurée l’objectif principal.

    Pour y parvenir le mouvement sioniste a eu (et a encore) besoin du soutien des grandes puissances. Mais ce soutien a un prix : l’Etat d’Israël doit avoir, au moins en apparence, les attributs d’une démocratie. Une seconde contradiction a donc rapidement fait son apparition, qui a résulté de la nécessité de préserver simultanément le caractère juif et le caractère démocratique de l’Etat. La solution envisagée par les dirigeants du mouvement sioniste, puis de l’Etat d’Israël, a été de s’assurer que les citoyens de l’Etat soient dans leur très grande majorité, sinon dans leur totalité, des Juifs. Ils ont donc dû trouver, avant même l’indépendance d’Israël en 1948, une solution au « problème » palestinien, sachant que la Palestine n’était pas une « terre sans peuple » et que l’immigration ne pourrait suffire à assurer la suprématie démographique juive.

    Du nettoyage ethnique à l’enfermement

    Entre 1947 et 1949, environ 800 000 Palestiniens, soit 80% de ceux qui résidaient à l’intérieur du territoire sur lequel Israël proclame son indépendance, sont expulsés et deviennent des réfugiés. Ce ne sont pas des victimes « collatérales » de la guerre de 1948, mais les victimes d’un plan d’expulsion minutieusement établi, le Plan Daleth, dont l’objectif était simple : le plus de terre et le moins d’Arabes possible sous juridiction israélienne. L’Etat juif est né du nettoyage ethnique, au terme duquel moins d’1/3 de la population s’est attribué 78% de la superficie de la Palestine du Mandat

    source ;Julien Salingue est enseignant et doctorant en Science Politique à l’Université Paris 8. Ses recherches portent notamment sur les élites palestiniennes. Articles consultables sur http://juliensalingue.over-blog.com/

    pour:alternatives-international.net