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L’intégrisme, une dynamique historique, un mouvement planétaire !

Publie le dimanche 2 juillet 2006 par Open-Publishing
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L’intégrisme, une dynamique historique, un mouvement planétaire !

Un des textes présenté au BE du MRAP en janvier 2006 à l’appui de ma proposition de constitution d’un groupe de réflexion sur l’intégrisme et les intégrismes.

L’analyse de l’intégrisme religieux se place eu sein d’une analyse plus vaste du développement des religions et des divers courants religieux dans leurs contradictions. Il n’y a pas un catholicisme, un protestantisme, un islamisme, un judaïsme, etc mais des variantes historiques au sein de chaque religion . Ces varantes prennent appui en les tranformant plus ou moins profondément leur propre corpus de référence, et ce afin de "répondre" à divers enjeux sociaux du moment. A cet égard, il doit être possible de repérer des courants de protestation voire de libération mais aussi des courants profondément "intégristes". Ce sont les dangers réels ou supposés de ces courants qui nous interessent. Et ce d’autant plus que le meilleur peut voisiner avec le pire.

Il convient don de mieux connaitre ce que l’on veut combattre. C’est pourquoi à la suite de l’AG de décembre 2005, j’ai proposé la création d’un groupe lié au bureau exécutif pour accomplir un travail que, bien évidemment, je ne saurais accomplir seul, surtout si l’on considère la prise en compte du temps long comme nécessaire à ce genre d’étude. Je crois donc que nous avons besoin d’apport extérieur.

Cependant nous ne partons pas de rien . L’initiative marseillaise de l’automne 2005 a constitué un bon début. Auparavant, j’avais eu l’occasion de souligner lors de la campagne contre le projet de TCE le rôle - conservateur mais pas intégriste - de soutien joué par le conseil des Eglises chrétiennes de France, la commission des épiscopats européens, la conférence islamique européenne, et l’ensemble des dirigeants des organisations musulmanes françaises au projet de traité constitutionnel.

1. - La difficulté d’une notion indispensable.

La signification générale du terme intégrisme concentre une forme d’intransigeance dans le domaine religieux soit dans les interpétations soit dans les pratiques. Les principales règles et normes en sont durcies par rapport à celles existante ou ayant existé et ce bien souvent en faisant appel aux fondamentaux de la dite religion .C’est pourquoi les termes intégrisme et fondamentalisme sont bien souvent intimement reliés.

L’intégrisme est une notion qui vient du monde chrétien. Cette notion a ensuite servi de prisme pour analyser les tendances réactionnaires, les "excès" des autres religions. L’extension de lusage de cette notion à des fins explicatives se fait parfois hors du champ d’étude des religions. On parle ainsi d’"intégrisme ultra-libéral" ou d"’intégrisme laïque" . C’est bien l’idée de dogmatisme renforcé qui est saisi et exporté. Pour nous l’intégrisme est et doit être consubstantiel à l’expression d’une foi révélée, d’une vérité religieuse. Tout simplement du fait du flou de la notion qui englobe des formes "douces" d’oppression et des pratiques particulièrement violentes et barbares.

Toute religion exprime et enseigne à ses fidèles des normes de vie plus ou moins sévères plus ou moins en adéquation avec la société d’appartenance. L’intégrisme en constitue le courant sévère et strict qui s’oppose à l’assouplissement et à la pluralité des règles sociale de la modernité . A cet égard l’intégrisme religieux peut se constituer en sous-culture et même en communauté particulière au sein d’une société. Il peut aussi être dominant et imposer ses règles à la société entière.

2. - De l’intégrisme aux intégrismes de toutes les religions.

La mentalité laïque a progressé durant les siècles passés mais aujourd’hui on assiste à un "retour du religieux". Ce mouvement contradictoire n’est pas suffisament analysé . La fin des régimes communistes a sans doute favorisé ce renversement . En tout cas, l’intégrisme accompagne ce "retour du religieux" . Il le radicalise. Mais les intégrismes comme formes particulières historiquement prises par chaque religion dans une société donnée et conséquemment l’intégrisme comme signification commune dégagée des intégrismes historiquement constitués ne sont pas des phénomènes nouveaux, ils existaient auparavant .

L’établissement de dictatures à fondement religieux en Iran ou ailleurs marque une reprise antérieurement à la "chute du mur" ( de Berlin) et de son idéologie qui a ainsi laissé place vacante aux croyances religieuses les plus diverses . Parmi elles les divers intégrismes ont germés . Il s’agit d’un phénomène montant historiquement et qui s’élargit au plan mondial . Il convient donc d’en prendre toute la mesure car les intégrismes opèrent un puissant recul en matière de libertés notamment à l’encontre des femmes et plus généralement de la laïcité. Les formes plus dures encore de l’intégrisme théologico-politique sont plus inquiétantes encore. Du fascisme religieux ! Là encore les principales religions sont concernés . Aucune n’y échappe ou y a échappé . En comprendre les causes réelles d’apparition et de développement ne saurait empêcher de les combattre.

Voici quelques éléments à développer certainement, à conforter ou démentir avant d’agir !

a) L’intégrisme va plus loin...

La tendance naturelle des religions est au prosélytisme et à la prescription - plus ou moins stricte selon les lieux et les périodes - de comportements alimentaires et vestimentaires. L’intégrisme va plus loin dans la démarche liberticide de par son autoritarisme . Il est à l’opposé des théologies de la libération.
A-t-on besoin de distinguer ici intégrisme et fondamentalisme ? Ce dernier terme s’applique de façon plus étroite aux théologies d’interprétations littérales des textes religieux. L’intégrisme embrassant aussi bien l’idéologie que les pratiques, la distinction devient secondaire.

Au sein de la plupart des religions et notamment des trois grandes religions monothéistes on peut distinguer plusieurs lectures des textes allant des interprétations les plus traditionalistes et réactionnaires aux interprétations dites de libérations .

Les intégrismes religieux portent une conception du monde autoritaire, patriarcale et liberticide.

On distingue les mouvements intégristes des gouvernements qui mettent en oeuvre les projets intégristes .

b) Les intégrismes occidentaux du passé

S’agissant des dictatures d’inspiration intégriste et chrétienne je renvoi à un livre ancien de DEMICHEL qui décrit les dictatures de Salazar au Portugal, de Franco en Espagne, des colonels en Grèce , de Franco en Italie, de Pétain en France. Il faut y ajouter la pluspart des dictatures d’Amérique latine.

L’Opus déï constitue aujourd’hui le courant intégriste chrétien agissant en Occident après la chute des dictatures européennes. Il existe bien d’autres mouvements politico-religieux de moindre importance mais actifs dans de nombreux pays.

Les thématiques portent sur - un lien fort avec le religieux dominant (ici le catholicisme), - l’inégalité hommes/femmes justifiée, - le corporatisme syndical totalement dépendant de l’entreprise, - les valeurs de virilité, - la valorisation des entités englobantes comme la famille, la nation, l’entreprise (cf Travail -famille -patrie de Pétain), - l’envahissement de l’espace public par tout ce qui est religieux (pratiques sociales comme les symboles ou les institutions), - l’antimarxisme, l’anticommunisme, - l’anti-athéisme, l’anti-évolutionisme et l’anti-darwinisme.

c) Les intégrismes en forte expansion

L’islam a été lui aussi interprété sous forme intégriste plus ou moins radicale. On retrouve aussi bien les mouvements islamiques agissant dans la société civile que les partis et les gouvernement ; on retrouve aussi des thématiques communes avec l’intégrisme chrétien mais avec des différences d’interprétation.

L’islam intégriste et politique critique la promiscuité pour favoriser la séparation hommes / femmes, méprise non seulement les femmes mais aussi les intellectuels, les enseignants, les journalistes, les syndicalistes, les homosexuels, les démocrates. La confusion du religieux et du politique interdit la laïcité.

Les juifs connaissent une forme d’intégrisme liée à l’apparition du sionisme qui combine religion et politique ségrégative ethnico-religieuse et colonisatrice.Je renvoie ici aux analyses de Pierre STAMBUL.

Le protestantisme connaît aussi aux USA des formes d’expression réactionnaires et conservatrices.

Le catholicisme du Vatican n’est pas en reste. La pologne connait depuis l’échec de la révolution du début des annèes 80 un tournant réactionnaire de plus en plus sévère . Lire Monica KARBOWSKA.

Les forces réactionnaires à fondement religieux sont à l’offensive contre les peuples.

Le MRAP doit tenir compte de ses éléments - qu’il lui faut mieux analyser -pour développer ses actions.

par Christian DELARUE Secrétaire national du MRAP

Messages

  • Pour une analyse du fait religieux en rapport avec nos axes d’interventions antiracistes
    par Christian Delarue Secrétaire national du MRAP

    Texte de base proposé au débat complémentaire au précédant toujours pour lla constitution du groupe "Intégrisme" du MRAP


    I - Les raisons d’un examen.

    Depuis que le MRAP a mis dans ses références des liens trés explicites avec le religieux notamment avec la notion d’islamophobie - notion contestée par d’autres associations se voulant antiracistes - il importe d’analyser le "fait religieux", de le faire lucidement pour le rapporter à nos préoccupations antiracistes . Certes il faut parfois en passer par la pose d’un cadre global de méthode . A titre indicatif on pourrait l’examiner sous toutes ses faces : noire (extrémisme) grise (intégrisme, ordre moral, conservatisme), claire (doctrine sociale, laique et féministe) et franchement lumineuse (théologie de la libération). Mais ces analyses doivent pouvoir servir à donner un contenu plus clair aux notions antiracistes employées par nous-memes à l’avenir et par les générations antiracistes de l’avenir.

    Ces analyses peuvent aussi avoir des enjeux de solidarité entre les peuples . Une pensée "campiste" défendant globalement le "sud" de façon acritique, par simple contrepied de la thèse du "Choc des civilisations" ou par anticolonialisme et anti-impérialisme sommaire pourrait se trouver en difficulté. Mais ne donnons pas la conclusion avant l’analyse ! Le travail reste à faire . Voici quelques thèses ou plutot hypothèses.

    II - De quelques thèses provisoires :

    Le religieux concerne ici les principales religions monothéistes. Ne seront donc pas évoqués les religions polythéistes ou les sectes (mais c’est plus par facilité ou méconnaissance du sujet que par principe) et encore moins des extensions de signification : le football comme "religion" par exemple.

    1 - Le fond commun du fait religieux est qu’il est multiple, variable.
    En principe, au MRAP, nous partageons tous ce point de vue.

    2 - Cette variation est contestée par les penseurs radicalement islamophobes,

    * Un penseur radicalement islamophobe (raciste) se distingue d’un simple "religiophobe" (non raciste) . Le "religiophobe" (formule de Vincent GEISSER) excècre les "excés des religions" mais ne tombe pas dans le racisme . Il s’agit bien des seuls excès et de toutes les religions pas seulement d’une seule . Ces excés peuvent etre variables d’une religion à l’autre. Dans les "excès" nous évoquons ce qui s’attache peu ou prou aux positions "d’ordre moral" mais pas aux exactions de groupes terroristes à fondement théologico-religieux, qui relèvent d’une autre nature. Dans ces "simples" excès nous pensons à l’interdiction des rapports sexuels avant le mariage pour le catholicisme ou au port des différents voiles pour les musulmanes.

    * Un penseur radicalement islamophobe pense que l’islam est par nature différent des autres religions :

    d’une part il ne saurait qu’etre unique : les différents courants le traversant s’accordant sur l’essentiel et se distinguant sur de l’accessoire . La prééminence du Coran sur tout le reste l’ensemble de la vie sociale et privée mais aussi les institutions publiques est posée par tous.

    d’autre part son apparition et son histoire le rendrait immuable et inadaptable à "la modernité" (sont ici pointés les refus de la "démocratie libérale", l’accès à la "civilisation libérale" comme la laicité, les droits des femmes)
    Voici un exemple de raisonnement islamophobique sans nuance aucune trouvé sur internet : "L’islam de France : encore un oxymoron" par Alain Dumait :
    http://www.les4verites.com/les4verites/articles/383_25012003g.htm

    3 - Aucune des principales religions n’a échappé dans son histoire comme dans son présent à la production de doctrines et de pratiques socialement et politiquement conservatrices et meme réactionnaires.
    Peu importe ici les frontières entre fondamentalisme et intégrisme.
    Peu importe aussi les diférences entre intégrisme de tel religion et intégrisme d’une autre.

    4 - Chacune des religions a laissé apparaitre à un moment de son histoire des courants progressistes et meme des courants se réclamant de la théologie de la libération.
    La doctrine sociale de l’Eglise catholique ne relève pas de la théologie de la libération. Ce n’est que l’accompagnement social du libéralisme.
    Les théologiens de la libération peuvent conserver des éléments forts criticables notamment en matière d’IVG et de droits des femmes.
    Ceux-ci sont aujourd’hui moins puissants qu’auparvant.
    Se référer à la théologie de la libération comme modèle de référence pour la recherche de courants religieux d’émancipation prete à critique. En l’état de mes connaissances sur le sujet cette référence me parait etre une hypothèse valable mais qu’une hypothèse.

    • Il y a plusieurs façons d’empêcher de signaler la force de l’intégrisme religieux..

      1 - on censure (http://bellaciao.org/fr/spip.php?ar...)

      2 - on ramène cette violence à la violence ordinaire évidemment répréhensible présente dans toutes les sociétés et dans toutes les couches sociales sous prétexte qu’il ne faut pas diviser la lutte féministe ou la lutte contre la violence en général.

      Il n’y a pourtant pas à se priver de signaler une dynamique religieuse et politique internationale particulière qui accroit le sexisme. En tout cas le MRAP qui lutte contre l’islamophobie comme racisme condamne aussi et fermement l’intégrisme islamique sans pour autant amoindrir la lutte globale de tous et toutes contre les violences, sexuées ou non .

      Christian DELARUE
      MRAP

      Condamné pour avoir frappé son épouse qui avait relevé son voile

      Reuters - Vendredi 25 juillet, 23h11

      MARSEILLE (Reuters) - Le tribunal correctionnel de Marseille a condamné
      à deux ans de prison dont six mois ferme un homme qui avait frappé à
      coups de poing son épouse parce qu’elle avait relevé sur son cou son
      voile islamique, apprend-t-on de source judiciaire.

      L’homme, âgé de 30 ans et de nationalité algérienne, a été placé sous
      mandat de dépôt et incarcéré après l’audience en comparution immédiate.

      Ce maçon lillois en vacances à Marseille avec sa femme était poursuivi
      pour violence volontaire sur conjoint ayant entraîné une ITT de plus de
      8 jours.

      Les faits se sont déroulés jeudi sur un parking face aux plages du Prado
      à Marseille. Pour cause de chaleur, Djamila, 24 ans, de nationalité
      française, avait relevé son foulard islamique au dessus de son cou, ce
      que son mari n’a pas supporté.

      C’est un passant, voyant la jeune femme ensanglantée, qui a alerté les
      policiers qui ont interpellé l’homme.

      La victime, qui souffre d’une fracture au nez et qui s’est présentée
      voilée au tribunal, n’a pas demandé de dommages et intérêts.

      Le parquet de Marseille avait requis une peine de huit mois de prison
      dont trois avec sursis.

      François Revilla, édité par Nicole Dupont