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Le parti de la droite

Publie le lundi 27 mars 2006 par Open-Publishing
1 commentaire

de Jean-Paul Piérot

À quel jeu joue donc Dominique de Villepin, qui choisit d’aiguiser la crise alors que le sens de l’État commanderait de rechercher une issue raisonnable ? Le fait est là : la fin de non-recevoir qu’il a opposée à la grande majorité des Français et à l’ensemble de la jeunesse, quarante-huit heures après une journée de manifestations qui a rassemblé plus d’un million et de demi de citoyens dans tout le pays, résonne comme une provocation.

Et il y a tout à parier que cette jeunesse et ce peuple, qu’il bafoue de sa suffisance, s’apprêtent aujourd’hui et plus encore mardi 28 mars à opposer à l’« inflexibilité » du châtelain de Matignon leur détermination démocratique.

Car s’il y a bien un problème de démocratie, il ne se situe pas du côté de ceux qui réclament le retrait du CPE, mais d’un gouvernement qui coup sur coup a imposé le CNE, pour les entreprises de moins de vingt salariés, par ordonnances puis le contrat précarité spécial jeunes en usant du 49.3.

Sans concertation avec les organisations syndicales, contrairement aux engagement pris. Invoquer, dans de telles conditions, la « légitimité » parlementaire pour refuser d’entendre l’opinion majoritaire de la société relève de l’imposture.

D’une certaine manière, le premier ministre a déjoué bien des pronostics lors de sa rencontre avec les parlementaires de l’UMP. Alors que les manifestations se succèdent, drainant des foules considérables, que la majorité des universités sont en grève, que les lycéens rejoignent leurs aînés dans un même refus de la précarité, que les cortèges du 18 mars réunissaient les salariés du public, du privé et des familles entières, de la grand-mère au petit dernier, le bon sens aurait voulu qu’un chef de gouvernement, confronté à une telle pression, fît au moins un semblant d’ouverture. Les observateurs se perdaient en conjectures : allait-il annoncer une réduction de la période d’essai - pardon, de "consolidation " - de deux ans ?

Allait-il retenir la proposition en trompe-l’oeil que lui avaient soufflée un aréopage de patrons, suggérant qu’un jeune soit informé des raisons de son licenciement ?

En rejetant tout en bloc, « le retrait », la « suspension » ou la « dénaturation » (comprenez : retrancher aussi peu que ce soit en matière d’arbitraire et de précarité), tout se passe comme si le premier ministre cherchait à aggraver le conflit, à dramatiser la situation, à passer en force sans égard pour les ravages qu’une telle fuite en avant pourrait provoquer.

Dominique de Villepin donne quelques éclaircissements sur son choix de la politique du pire. L’aveu n’est pas glorieux : le premier ministre ne veut pas reculer sur le CPE car dit-il « notre électorat ne nous le pardonnerait pas ». Alors que le pays est en pleine effervescence sociale, le premier ministre, qui aime pourtant à se réclamer du gaullisme, invoque de médiocres préoccupations politiciennes, qui le conduiraient à prendre le parti de la droite contre celui de la France. Les jeunes devraient alors payer le prix fort de la concurrence que se livrent Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy, tous deux d’accord sur la précarisation et la fragilisation des salariés vis-à-vis du patronat.

Ils seraient les premières victimes du jeu dangereux auquel se livre le chef du gouvernement. Mais le mouvement social, et au-delà l’opinion publique, semblent avoir compris l’enjeu du bras de fer que leur impose un gouvernement plus irresponsable encore qu’inflexible. Le front anti-CPE s’est élargi à l’ensemble du monde du travail qui ne veut pas conjuguer l’avenir de ses enfants avec l’insécurité sociale et la précarité.

http://www.humanite.fr/journal/2006...

Messages

  • BRAVO JEAN-PAUL !

    On s’est connu au BF du PCF 51... T’as fait du chemin : t’écrivais bien...
    J’aime beaucoup ce petit concentré : "le parti de la droite contre le parti de la France"...
    C’est tout à fait çà et çà rejoint le mot de Péguy : "on croit mourir pour la patrie, on meurt pour les industriels"... sauf qu’aujourd’hui on meurt pour les actionnaires usuriers !

    Continue d’éclairer et de rapporter les combats du Monde pour la vie...

    Fraternité.

    NOSE