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Le rapport Camdessus heurte la stratégie du gouvernement

Publie le mardi 19 octobre 2004 par Open-Publishing

Michel Camdessus remet mardi à Nicolas Sarkozy un rapport sur les "freins à la croissance" dont les pistes pour l’emploi heurtent la stratégie du gouvernement, qui vient de lâcher du lest sur les licenciements économiques pour préserver le climat social.

Dans son chapitre V "Travail, économie, société : préférer l’emploi à l’assistance", dont Reuters a obtenu une copie, ses suggestions pour "fluidifier" le marché du travail en France rejoignent les propositions du Medef et les positions libérales développées par une partie de l’UMP.

Ses propositions pour une modernisation du code du travail, un renforcement du contrôle des chômeurs, une extension du recours aux heures supplémentaires, une croissance "modérée" du smic ou encore une réforme de la prime pour l’emploi sont autant de dossiers auxquels le gouvernement veut s’atteler sans avoir jusqu’ici attaqué de front les organisations syndicales.

"Dans quelques jours je rendrai public le rapport Camdessus, un document absolument remarquable dont nous ferons un livre de poche (et) sur lequel je m’appuierai beaucoup pour défendre un certain nombre d’idées sur le droit du travail", avait déclaré le ministre de l’Economie, Nicolas Sarkozy, le 8 octobre, lors d’un déjeuner-débat organisé par le Medef d’Ile-de-France.

Le rapport Camdessus propose notamment de donner "une plus grande fluidité" au marché du travail en créant "un contrat unique" dont les droits seraient liés à l’ancienneté dans l’entreprise.

Une idée face à laquelle le ministre délégué aux Relations du Travail, Gérard Larcher, a fait preuve lundi de la plus grande prudence.

"C’est un sujet qu’il faudra analyser", a-t-il dit sur Europe 1. "Notre objectif au gouvernement, c’est l’intérêt général, ce n’est pas de faire plaisir à tel groupe de pression par rapport à tel autre."

"Il y avait déjà un rapport Virville et on connaît la réaction des uns et des autres", a remarqué Gérard Larcher en évoquant le tollé syndical suscité l’hiver dernier par l’idée d’instaurer un "contrat de mission".

La CFTC s’est félicitée du "bon sens" du ministre, en estimant que le rapport Camdessus "précarise le CDI".

"Les CDD sont nécessaires dans certains cas", a dit à Reuters son secrétaire général adjoint, Joseph Thouvenel. "Ce contre quoi il faut lutter, ce sont les dérives avec les CDD à répétition."

Selon la proposition Camdessus, la distinction entre contrats de travail à durée indéterminée ou déterminée (CDI et CDD) serait supprimée au profit d’un "contrat unique à durée indéterminée dans lequel les droits relatifs à la protection d’emploi et à l’indemnisation se renforceraient progressivement" en fonction de l’ancienneté dans l’entreprise.

UN BONUS/MALUS POUR LES ENTREPRISES

Une proposition Camdessus a en revanche retenu l’attention de Gérard Larcher, celle qui recommande de "taxer les entreprises qui licencient".

Le rapport préconise d’instaurer "un système de bonus/malus sur les cotisations sociales payées par l’entreprise tenant compte du nombre d’embauches et de licenciements au cours de l’année".

"Cela méritera d’être approfondi (...) à quelques mois de la renégociation de la convention sur l’assurance-chômage" au second semestre de 2005, a dit Gérard Larcher.

Le bonus, a estimé le ministre, pourrait se traduire pour l’employeur par "une participation à l’assurance-chômage moins élevée, ce qui est normal puisque nous sommes dans un système assurantiel".

Pour le reste, Gérard Larcher s’est voulu d’une grande discrétion, notamment concernant les 35 heures. "C’est un sujet que les partenaires sociaux abordent avec le Premier ministre dans le cadre du dialogue sur le ’contrat 2005’", s’est-il borné à dire. "Il appartiendra au Premier ministre (...) de faire un certain nombre de choix et ces choix nous les mettrons en application."

Pour assouplir la législation sur les 35 heures, le rapport Camdessus propose que l’employeur ait "la possibilité de proposer individuellement aux salariés de travailler plus et de gagner effectivement plus (...) dans la limite des durées maximales de travail".(Reuters)

http://www.reuters.fr/locales/c_newsArticle.jsp?type=topNews&localeKey=fr_FR&storyID=6533200