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Légion d’honneur pour le chef de la censure en chine
Publie le mardi 24 avril 2007 par Open-PublishingPour info, allez lire cet article. L’info à également été relayé par le journal de TF1 de ce soir.

Petite cérémonie intime, il y a quelques semaines, à l’Ambassade de France : M. Long Xinmin y a été fait chevalier de la légion d’honneur. M. Long est le directeur général de l’administration de la presse et de la publication. C’est à dire tout simplement le Chef de la censure chinoise.
Monsieur Long Xinmin est un personnage important, au sein du pouvoir chinois. Membre suppléant du comité central du PCC, c’est en fait lui qui a la responsabilité de la mise en place de la politique d’information voulue par les autorités. Il n’est certes à ce poste que depuis la fin 2005, mais c’est en droit à lui que les journalistes emprisonnés en Chine, ou que les internautes en délicatesse avec la sécurité d’Etat pourraient s’adresser. Il a fait interdire plusieurs publications, dont le populaire supplément du China Youth Daily.
C’est pourtant lui que l’Ambassadeur de France, Hervé Ladsous, a fait le 3 avril dernier chevalier de la légion d’honneur. Dans une relative discrétion, certes, mais sans cachotterie non plus, puisque l’Ambassade, sur son site, publie des photos de la cérémonie, et l’allocution de l’ Ambassadeur. Aujourd’hui la Chine a constaté toutefois que la "Une" du site de l’Ambassade a été nettoyée après notre article, et aucune allusion à cette décoration n’y est plus visible désormais.
Un discours courtois, chaleureux et diplomatiquement habile : saluant les connaissances de M. Long quant au rôle de l’information, Hervé Ladsous souligne en effet que "une information plurielle, une information fiable, libre d’accès et libre de circuler sont autant d’objectifs pour une réelle liberté d’expression dans un Etat de droit en construction". Une manière élégante de dire que le "guanxi" indispensable à l’exercice de la diplomatie peut s’accompagner du rappel de quelques vérités.
Mais cette précaution ne suffit pas à dissiper un certain malaise, quant à cette distinction accordée à un homme aussi engagé dans des valeurs contraires à celles de la démocratie, dont le droit à l’information. D’autant moins quand l’Ambassadeur de France salue la nouvelle réglementation chinoise "visant à faciliter le travail des journalistes en les dispensant d’autorisations pour conduire leurs interviews et leurs enquêtes" : les journalistes en poste à Pékin, où leurs confrères en attente illimitée de visa, constatent avec un bel ensemble que c’est désormais pire qu’avant...
Officieusement, de source diplomatique anonyme, on affirme que cette décoration servira à créer un contact privilégié en cas de besoin avec l’administration de la censure chinoise. Imaginons qu’un journaliste français soit arrêté durant les JO, un coup de fil à M. Long pourrait arranger les choses.
Hélas cette manoeuvre tombe à l’eau. On apprend en effet par l’agence Chine Nouvelle que le chef de la censure chinoise a été remercié il y a quelques jours. On lui reprochait notamment, selon le South China Morning Post du 21 avril, son extrême sévérité. Il faisait partie de la frange conservatrice du Parti. Il a notamment expliqué le mois dernier qu’il fallait être encore plus sévère avec les blogueurs... Autre information donnée par le journal de Hong Kong, M. Long pourrait être impliqué dans un énorme scandale immobilier à Pékin.
La distribution de médailles est certes un outil diplomatique comme un autre, qui ne coûte pas grand chose, et qui peut faire plaisir : Vladimir Poutine a la sienne, et Long Xinmin n’est pas le premier dignitaire chinois à être ainsi honoré. Mais dans les archives de l’Ambassade, à la rubrique Légion d’Honneur, il n’y a ni dissidents, ni militants des droits de l’homme, ni démocrates : ceux là ne sont pas considérés comme ayant rendu d’éminents services à la République Française.