Les Oubliées de Juarez (video)

de Jean Roy

Les Oubliées de Juarez, de Gregory Nava, est ce qu’on appelle un film du grand sujet. Le lecteur se souvient peut-être d’avoir entendu parler de cette ville mexicaine, formant frontière avec les États-Unis à la hauteur d’El Paso, Texas.

C’est là que, pour s’en tenir au nombre officiel extrêmement minoré, 400 femmes ont été assassinées depuis 1993, la plupart, très jeunes, après avoir été violentées, sans qu’aucun coupable soit arrêté.

La chose aurait dû faire grand bruit, mais qui s’intéresse au sort de malheureuses travailleuses vivant en plein désert dans une poubelle ignorée des touristes ? Comme, pour des raisons distinctes mais se rejoignant, les deux gouvernements ont eu intérêt à passer sous silence ces exactions, elles demeurèrent cachées du plus grand nombre.

Gregory Nava, cinéaste militant révolté par l’injustice sociale, a décidé d’en faire le sujet d’un film (rappelons que, quelque peu oubliés en France, ses films ont fait le tour des festivals et que El Norte, une des belles découvertes cannoises d’Un certain regard en 1994, empocha dans la foulée le grand prix des Amériques à Montréal).

Pour cela, il met au centre de l’action une journaliste de Chicago (Jennifer Lopez) décidée à faire éclater la vérité, dans la grande tradition du reportage d’investigation à la Citizen Kane. Presque sans peur et tout à fait sans reproche, notre héroïne va s’attacher à une miraculée (Maya Zapata, l’unique star mexicaine du film) sortie vivante des mains criminelles et décidée à témoigner au péril de sa vie, tant il est évident que tout se déroule sur fond de police et de magistrature corrompues.

Ces deux n’auront pour appui qu’un journaliste local (Antonio Banderas) et une militante des droits de l’homme (Sonia Braga). Brillante distribution donc, qu’on complétera avec Martin Sheen en directeur du journal. Il faudrait n’avoir pas de coeur pour demeurer insensible à un tel film. Il faut aussi, hélas, pour l’apprécier pleinement, ne considérer le cinéma que comme un moyen.

Toutes les grosses ficelles du film à thèse sont au rendez-vous, sans souci de toutes les discussions tumultueuses sur la « fiction de gauche » qui fleurirent il y a quelques décennies.

À voir donc, pour s’indigner et donner envie de fréquenter le site d’Amnesty International mentionné au générique de fin.

http://www.humanite.fr/journal/2007...

Réalisation : Gregory Nava
Scénario : Gregory Nava
Production : Mobius Entertainment
Cie : MGM Studios - SND groupe M6
Musique : Graeme Revell
Costumes : Fran Allgood & Dorothy Baca
Durée : 01 H 55

Avec : Jennifer Lopez, Antonio Banderas, Martin Sheen, Kate del Castillo, Teresa Ruiz, Maya Zapata & John Norman.