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Libéral-libertinage et progressistes en carton

par CSP

Publie le samedi 10 mars 2012 par CSP - Open-Publishing
3 commentaires

En cette journée féministe, il n’est pas inutile de recadrer un peu le débat, y compris sur celles - et ceux - qui se braillent "féministes" quand ça les arrange bien au niveau du porte-monnaie. On sait depuis une trentaine d’années maintenant qu’à un moment dans l’Histoire un certain féminisme a honteusement copulé avec son ennemi le néolibéralisme et a engendré de monstrueux rejetons libéraux-libertaires pour lesquels droits des femmes et économie de marché sont copains comme cochons. D’où à présent un certain discours soi-disant "transgressif" qui voudrait faire passer l’industrie du porno pour un modèle d’émancipation parce que c’est bien connu : rien de tel que se faire défoncer par trois culturistes dans un garage pour devenir un symbole de la lutte féministe, c’est l’évidence même voyons.

Ce discours sur le porn étant porté par une poignée "d’actrices" complaisamment invitées partout et ne manquant jamais de se rendre sur la plateaux fort court vêtues en déballant un laïus archi-convenu sur l’éclate totale de faire ce job et à quel point se sont de sacrés coquines dans la vraie vie - peu importe que ce soit vrai ou pas, l’important étant d’enflammer l’imagination du mâle devant le poste et de lui faire sortir sa carte bleue -, devenant ainsi des modèles de subversion par le sexe selon un schéma rebattu depuis les années 60 et la révolution sexuelle d’alors, toute personne se mettant en tête d’avoir un regard un peu acéré sur ce business, ses implications quant à l’image des femmes - sans parler de la façon dont l’écrasante majorité de ces "actrices" sont traitées c’est à dire comme de la merde - se verra bien facilement relégué au rang de ringard jaloux aigri et frustré, pour ne pas dire de cryptofasciste torquemadesque. Nous allons revenir sur ce point, mais avant nous illustrerons notre propos par des extraits d’une tribune ahurissante de bêtise écrite par Katsuni, "Chef d’entreprise, Actrice X" laquelle ne craint pas de se ridiculiser en public en prétendant que le porn est la pointe avancée de l’égalité salariale.

"A l’heure où le débat de la parité salariale est de nouveau à la une de l’actualité, le porno, souvent accusé d’exploiter les femmes, de véhiculer une image dégradante de la sexualité et de prôner des valeurs machistes, est néanmoins dans notre société l’une des rares industries à voir les femmes (les actrices) plus rémunérées que les hommes. Explications."

Oui, Katsuni, explique nous. Nous sommes pantelants, sincèrement. Ah oui, juste avant, une petite précision : le porno n’a pas à être "accusé d’exploiter les femmes, de véhiculer une image dégradante de la sexualité et de prôner des valeurs machistes" : c’est ce qu’il fait et ce sont les ressorts structurels de cette industrie. C’est un fait objectif et nier cela consiste à vivre au pays des poneys, on va y revenir aussi n’aie crainte.

"Payés à la scène, les travailleurs du X touchent un cachet (dont le montant varie en fonction du pays) et non un salaire fixe mensuel"

Pas comme des fonctionnaires quoi, berk.

"Aux Etats-Unis où se tourne l’essentiel des productions occidentales, leur rémunération est particulièrement homogène, l’existence d’agences pour acteurs/ices (interdites en France car assimilées à des proxénètes) contribuant à maintenir des montants de cachets assez stables."

Et on est drôlement contents pour eux. On peut toutefois douter que les bulgares de 19 ans qui passent des "castings" qui sont autant de semi-viols - voire des viols tout court parfois - soient à ce point concernées par ces exemplaires revendications salariales. Mais c’est vrai qu’on parle des States, modèle indépassables de nos libéraux-libertins qui ne jurent que par lui.

"Il faut être minimum deux pour exécuter une scène. Même travail, contraintes similaires, et pourtant, l’égalité entre hommes et femmes dans l’industrie du X n’existe pas. Le cachet d’un acteur porno est 25-30 % moins élevé (parfois même deux fois moins élevé) que celui de sa collègue même si celle-ci débute dans le métier alors que celui-ci pourra avoir dix ans de carrière derrière lui."

Voilà en vérité qui est formidable et signe un progrès incontestable dans les relations hommes-femmes. Non ? Renversement des valeurs proprement nietszchéen dans son vertige puisque le schéma classique du 30 % de salaire en moins est ici inversé, et on se demande bien pourquoi, tout de même. Fort heureusement, notre madeliniste du cul nous livre candidement l’explication.

"Même si les mentalités évoluent et le marché du X avec, un film porno est un produit de divertissement encore essentiellement consommé par les hommes et même le public composé de femmes est aussi très sensible au casting féminin d’un film X. La femme est donc l’argument qui fait vendre. Elle est la source du fantasme, sa représentation, l’image que l’on veut voir mais aussi la personnalité que l’on souhaite éventuellement connaître."

En clair : la marchandise-femme est consommée par un public essentiellement masculin, les femmes qui regardent du porno ne représentent qu’une minorité complètement négligeable et ce sont les hommes qui vont dépenser leur fric, ce qui est fondamentalement la seule chose qui intéresse cette industrie. Laquelle, et c’est Katsuni qui l’admet elle-même avec ce mélange de cynisme froid et de candeur qui est la marque des libéraux hardcore, est basée sur une exploitation totale de la femme tant au niveau de l’usage de son corps que de son image. Quant à la "personnalité" des actrices X, c’est un argument marketing destiné à donner un plus-produit à la marchandise, manière d’humaniser ce qui reste de la boucherie à la chaîne. Sacha Grey étant l’une des plus maline et ayant compris ce que pouvait lui apporter ce supplément d’âme en terme de notoriété et de compte en banque, c’est logiquement la plus citée quant il s’agit de démontrer que les "hardeuses" sont aussi des femmes de têtes. Comme d’habitude, on met en exergue la toute petite minorité non représentative pour occulter l’armée de nanas soumises aux caprices des hommes mais qui n’ont elles pas accès au glamour et doivent se contenter de se faire double pénétrer pour leur cachet et s’acheter elles-mêmes leur crème anti-inflammatoire.

On finit pas se demander où finit le cynisme et ou commence la bêtise pure quand Katsuni osé l’énormité : "L’actrice X est un produit (et il n’y a rien de péjoratif là-dedans) qu’elle peut décider de définir et vendre elle-même." Sauf que non, évidemment : celles qui peuvent "décider" ne sont qu’une poignée, et quand bien même elles auraient une marge de manœuvre quant à la façon dont elles vont se faire enculer et à quel prix, elles restent in fine dans un schéma de domination masculine. Cette dernière ayant bien compris l’utilité des Katsuni pour faire miroiter de l’argent facile et une carrière météorique à des naïves qui déchanteront très rapidement devant les réalités glauques de cette industrie qui en plus exige une reconnaissance comme industrie de loisirs comme une autre...

Accordons nous une parenthèse : étant bien entendu que pour le discours libéral-libertin, le monde se divise en deux, à savoir d’un côté les gens hyper-émancipés supercools qui baisent comme lapins hystériques dans une perpétuelle orgie follement décadente et fun, et de l’autre les chiants moralisateurs coincés du derche qui font évidemment partie du retour à l’ordre moral protofasciste de droite comme de gauche, je ne doute pas que ce billet sera considéré comme une manifestation de pudibonderie en mode curé rouge, et comme je suis un garçon d’une exquise obligeance, je veux bien jouer le jeu ; il est donc bien évident que ma libido est d’une pauvreté absolue, que mon imaginaire est décharné et mon univers fantasmatique un désert misérable, et que je n’alterne que des périodes de monogamie sinistre et d’un ennui morbide avec des plages de célibat dépressif et onaniste, et d’ailleurs je ne baise qu’en missionnaire, dans le noir, et le plus rapidement possible pour me débarrasser de cette dégoûtante corvée.
Vous voyez donc bien que je fais mon possible pour entrer dans les poncifs des gens conformistes qui se croient "émancipés" parce qu’ils regardent du porn, et décidément qu’est-ce qu’il ne faut pas faire pour faire plaisir aux imbéciles.
Vous allez voir qu’en plus ils ne m’en seront même pas reconnaissants, les ingrats.

Parmi lesquels se comptent curieusement une poignée de "progressistes" ou en tout cas auto-proclamés comme tels, qui suivent béatement le discours libéral-libertin en voyant dans le porno l’acmé de la lutte féministe pour l’émancipation, sans très bien comprendre que bien loin d’être "subversif" en quoi que ce soit pour "l’ordre bourgeois" - gauchisme figé dans d’obsolètes visons datant des années 70 et étant incapable de passer par dessus - il n y a absolument plus rien de transgressif dans le sexe.
Lequel et on l’oublie trop souvent, si il est peut-être l’activité la plus agréable que nous connaîtrons dans nos vies d’humbles mortels, n’est définitivement pas un loisir comme les autres. Le porno, en le banalisant dans sa version la plus vulgaire et marchande, n’est donc pas progressiste mais bel et bien fondamentalement réactionnaire.

http://comite-de-salut-public.blogspot.com/2012/03/liberal-libertinage-et-progressistes-en.html

Messages

  • REPONSE

    "Que "depuis une trentaine d’années maintenant, un certain féminisme ait honteusement copulé avec son ennemi le néolibéralisme et ait engendré de monstrueux rejetons libéraux-libertaires pour lesquels droits des femmes et économie de marché sont copains comme cochons" nous sommes d’accord.

    Nous le sommes encore avec la suite "D’où à présent un certain discours soi-disant "transgressif" qui voudrait faire passer l’industrie du porno pour un modèle d’émancipation parce que c’est bien connu : rien de tel que se faire défoncer par trois culturistes dans un garage pour devenir un symbole de la lutte féministe, c’est l’évidence même voyons". A dire vrai nous approuvons toute la charge contre la pornographie à l’exception des remarques sur le court vêtu qui sent bon l’intégrisme religieux sexo-séparatiste.

    Alors que dire de plus.

    L’auteur a cru bon d’ajouter ceci : "Pour le discours libéral-libertin, le monde se divise en deux, à savoir d’un côté les gens hyper-émancipés supercools qui baisent comme lapins hystériques dans une perpétuelle orgie follement décadente et fun, et de l’autre les chiants moralisateurs coincés du derche qui font évidemment partie du retour à l’ordre moral protofasciste de droite comme de gauche, je ne doute pas que ce billet sera considéré comme une manifestation de pudibonderie en mode curé rouge, et comme je suis un garçon d’une exquise obligeance, je veux bien jouer le jeu ; il est donc bien évident que ma libido est d’une pauvreté absolue, que mon imaginaire est décharné et mon univers fantasmatique un désert misérable, et que je n’alterne que des périodes de monogamie sinistre et d’un ennui morbide avec des plages de célibat dépressif et onaniste, et d’ailleurs je ne baise qu’en missionnaire, dans le noir, et le plus rapidement possible pour me débarrasser de cette dégoûtante corvée".

    Il faut lire cela au second degré. Il faut aussi ajouter qu’aucune différence n’est faite entre l’érotisme et le porno ou entre le porno "soft" et le porno "hard". Je sais que l’on va dire que le porno c’est du sexe sans amour. Mais quand on cherche à se masturber on ne cherche pas de l’amour. Pour autant on ne cherche pas pour autant à regarder des scènes de masochisme, de viol ou de violence, ou d’apologie de la souffrance. D’après mes renseignements sur le sujet une fraction d’hommes recherchent juste des seins, des sexes féminin, des fesses et d’autres des femmes légèrement vêtues mais sexy . Certains ne donnent pas d’argent au porno mais ils regardent les photos plus que des films.

    Il est donc dommage que rien ne soit dit sur les hommes qui "mattent" et se masturbent - ils sont nombreux - sans approuver la prostitution ni même le "porno hard" ie avec la promotion du viol et des violences faites aux femmes . Ils apprécient simplement de pouvoir se masturber en regardant des femmes nues . Et en plus nombreux sont pour l’égalité entre hommes et femmes.

  • Bon bon bon…Ça fait plaisir de voir qu’on est pas le seul à taper sur le clou.
    Sauf qu’on voit, dans ce « libéral-libertinage » une POLTIQUE SEXUELLE délibérée, et qui vise, autant que la marchandisation totale du plaisir, l’asservissement de toutes et de tous aux impératifs de la nouvelle morale. Qui n’est, finalement, pas très différente de l’ancienne.

    • Equilibration : Le sexe entre deux excès.

      Il y a le totalitarisme du tout libéral qui favorise effectivement ce que l’on a pu appeler la "désublimation répressive" mais il y a aussi la volonté de répression totale de la sexualité. Et la fin de cet article n’y échappe pas.

      Avec les religions la sexualité devrait être cachée non seulement aux enfants mais aussi aux adultes. Or des mesures sont à prendre contre la prostitution et la pornographie mais il importe de distinguer le hard qui fait l’apologie de la violence et de la souffrance du soft qui sert à la simple masturbation. A ce propos, cacher un sexe masculin en érection n’a de valeur que pour des mineurs. Ce n’est pas un critère pertinent entre érotisme et pornographie.