Accueil > MAIS, FAUT-IL FAIRE CAMPAGNE CONTRE LE MUR ?

MAIS, FAUT-IL FAIRE CAMPAGNE CONTRE LE MUR ?

Publie le vendredi 18 juin 2004 par Open-Publishing

Qu’il soit nécessaire de poser aujourd’hui cette étrange question en dit long sur la vision politique qui règne en France à l’égard de la destruction de deux rives de la méditerrannée.

La plan unilatéral de Bush/Sharon a mis Oslo, feuille de route, et Genève au pied du mur.

Nous savons tous que le plan de "retrait de Gaza" sert de façade pour imposer, légitimer et achever la construction du mur en Cisjordanie. Le "retrait" en question est un plan pour septembre 2005 ! Dans l’immédiat, ce futur retrait promis, dont la réalisation dépendra des aléas de la politique israélienne, est payé comptant : Massacre et destruction à Rafah, assassinats systématiques, écrasement de toute forme de résistance, préparation d’un rôle sécuritaire et répressif de l’Egypte et de la Jordanie, appauvrissement extrême des populations entassées et coupées physiquement, politiquement et médiatiquement du monde extérieur, futur projet de vente du sol sur une profondeur de 16 mètres pour creuser un monstrueux canal en lieu et place des centaines des maisons qui viennent d’être détruites sur un espace déjà considéré l’ex-habitat de ceux qui doivent s’en aller...

Ces atrocités infligées à Gaza font partie intégrante du mur en question !

Cette promesse de "paix" est également payée comptant par l’avancement de 650 kilomètres de murs en Cisjordanie ! GW Bush, l’incarnation absolue de la défaite de l’intelligence planétaire, a décrété que ce mur sera édifié pour les raisons "sécuritaires" bien connues et en même temps pour engloutir les grosses colonies devenues "réalités démographiques sur le terrain", ces mêmes colonies qui sont un pur produit de l’occupation et, sans ironie aucune, en grande partie un pur produit du "processus de paix" mis en route depuis 1991 ! Ariel Sharon se presse donc pour achever ce grand "ouvrage" sous nos yeux ébahis et, de plus, un projet se met sur pied pour faire grossir, dès maintenant, les colonies "légitimes". Il est bien sûr encore une fois question d’annexer des territoires et de faire plus de colonisation au nom d’une marche vers la paix et, invention nouvelle, au nom la "décolonisation" !

Pendant ce temps, "la société civile internationale" va montrer sa capacité à résoudre le conflit en propageant "une culture de paix et de non violence" !

Pendant ce temps, un autre Mur se dresse en Europe, entièrement et spécialement conçu pour l’Europe prolongée par la belle "société civile internationale", mais un Mur virtuel celui-ci, conceptuel, politique et idéologique, faisant le barrage le plus total à la prononciation, même timide, d’un mot qui fait encore trembler tout un système de colonisation et d’Apartheid : LE DROIT AU RETOUR.

Car il s’agit d’un mot qui ne se prononce plus entre gens "civilisé", c’est-à-dire, réunis dans des conférences à l’ombre de l’ouvrage d’Ariel Sharon, seule réalité sur le terrain à laquelle fait à peine allusion cette prétendue "culture de non-violence" !

Ainsi, le droit au retour se trouve encerclé et piégé par deux murs de nature différente qui se renforce mutuellement, comme d’ailleurs les choses physiques et conceptuelles se trouvent bien cousues dans le monde.

En réalité, cet emprisonnement du droit au retour, est une expulsion définitive de la paix. Ceci pour la simple raison que ce droit ne peut se réaliser que par le Retour à un monde où la démocratie rime avec égalité, pluralité, mélange, respect de l’autre et interdépendance des cultures, un monde que ces murs projettent de détruire, celui que le mot Palestine, trois fois terre sainte, incarne et incarnera toujours dans la conscience historique de beaucoup d’humains.

Mais il semble échapper à la pensée moderne qu’une démocratie qui ne rime plus avec égalité, pluralité et mélange... n’est plus une démocratie, mais certainement une sorte de monstre prêt à engloutir ce qui reste de la démocratie. L’enjeu dépasse ainsi, de très loin, celui de la "guerre des autres" et nous prépare ici, en Europe, à rentrer dans l’ère de la normalisation d’une pensée qui a déclaré un jour que les "Gentils" seront toujours antisémites !

Au-delà des ces murs qui nous encerclent de toute part, allons-nous déclarer solennellement notre Droit au Retour aux principes oubliés de la paix ? Où préférons-nous continuer cette marche macabre vers un monde sombre et sans idéal ?

Toute la question est de savoir si l’Etat d’israël est capable de dépasser son système colonial fondateur et d’évoluer vers une vraie démocratie qui ne se préoccupe pas essentiellement de compter sa "majorité démographique juive". Mais bien entendu, lorsque les murs nous encerclent de toute part et que certains de ces murs sont des miroirs qui embelissent l’image d’une atroce réalité, nous serons déjà ceux qui peuvent sacrifier le droit d’un peuple à vivre sur sa terre au profit d’un discours qui est le racisme incarné.

Telle est, pour moi, la signification de cette campagne contre le mur. Jamais un mot n’a été chargé d’autant de symboles qui ne peuvent, de toute évidence, se réduire à quelques réclamations enfermées dans le texte d’une pétition.

Alors, faut-il vraiment faire cette campagne ?

Nazem

agendaprocheorient@yahoo.fr

Bien entenud, le sens que je donne ici à la campagne contre le mur n’engage que moi, mais il s’agit peut être d’un sens qui peut combler un certain vide et que beaucoup d’entre nous peuvent partager et enrichir.