Nicolas Hulot dans le texte

Nous le savons : l’activité humaine est en train de bouleverser les équilibres naturels qui ont rendu notre planète habitable - des équilibres qui ont mis des millions d’années à s’instaurer.

Merveilleuse notion que celle « d’équilibres naturels ». Vision catallactique du monde : il y a un équilibre, un « ordre », pourquoi pas, que l’action humaine vient « bouleverser » (la salope). Parler d’équilibres naturels, c’est pas très loin de l’intelligent design : on a l’impression que la nature serait mue par une volonté propre, qu’elle poursuivrait un objectif. Conception quasiment anthropomorphique de la nature. Le fait que les équilibres naturels « mettent des millions d’années » à s’instaurer fait qu’ils sont respectables et bien-fondés, c’est un argument-choc qui se fonde sur une logique simple : le conservatisme. Ce qui vient du fond des âges, par une mystique fort répandue, est forcément bon, et doit forcément perdurer pour de nouveaux millions d’années.

Le compte à rebours a commencé. Pour d’innombrables espèces animales et végétales, il est déjà trop tard.

Le temps est uniforme et univoque. Hulot voit déjà l’avenir. Tout fout le camp. C’est du lepénisme environnemental, en fait.

Quant aux hommes, ils sont des centaines de millions à souffrir de l’affaiblissement de leurs ressources et de la pollution, et seront demain encore plus nombreux à être victimes des dérèglements climatiques qui les chasseront de leurs terres et les pousseront à émigrer vers le nord, où les attend une autre forme de misère.

Ah ! La migration humaine comme pathologie. Dans la déréliction environnementale consubstantielle à notre modernité, la pollution emporte tout sur son passage : les animaux, le climat (réputé « réglé », là encore, anthropomorphisme et naturalisme digne du XVIIIème siècle), mais aussi l’économie des peuples et des ethnies. Tout était bien réglé, chacun était chez soi : maintenant, il y a des mouvements de populations. Si c’est pas le signe que tout fout le camp ! Très étrange vision : à la lettre, selon Hulot, c’est le déréglement climatique qui est la cause des migrations de populations. Si les africains sont prêts à mourir pour pouvoir gagner l’Europe, c’est parce que fondent les banquises.

Oui, nous le savons, mais nous ne faisons rien, ou si peu. Les hommes politiques des pays dits riches s’affrontent sur des questions qui paraîtront bientôt dérisoires devant la montée des périls écologiques. Pourtant ; il n’est peut-être pas trop tard. L’élection présidentielle de 2007 en France est l’occasion de placer l’écologie au cœur du débat politique et d’élire un candidat capable d’infléchir la trajectoire qui nous mène vers l’abîme.

L’écologie de Hulot, c’est la banquise qui fond, le pingouin qui crève, l’Amazonie, etc. Une world ecology de documentaire, adaptée à la mise en image, esthétique, et puissamment scénarisée. Et pourtant, il replace l’enjeu au niveau strictement français. Curieux mélange des genres. Comme si la France avait la moindre marge de manœuvre dans ce domaine. Comme si le Président Français, sensibilisé, pouvait faire quoi que ce soit contre ce que Hulot lui-même caractérise comme une tendance lourde quasiment irrépressible… Ce décalage est le gage de la nécessaire improductivité du « Pacte écologique » de Nicolas Hulot. Voilà pourquoi Yann Wehrling peut dire, non sans tranchant : « Le problème, c’est que tu es devenu le représentant d’une écologie acceptable pour les pollueurs et même rentable pour leurs régies publicitaires. »

Aussi, outre réactiver des valeurs néoconservatrices, du type « responsabilité », « conservation », « ordre naturel », etc., le buzz Hulot ne débouchera sur rien.

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