Accueil > Nous serons toujours là
de Badia Benjelloun
De l’avis même de Flynt Leverett , membre du groupe de réflexion " Brookings Institution" basé à Washington , rien de bon ne découlera de cette charte constituante écrite pour l’Irak. Ou bien la minorité sunnite réussira à rallier contre elle la majorité dans trois des 18 provinces et fera échouer le projet fédéraliste, ou bien dans le cas contraire, le sentiment des droits civiques confisqués sera tel qu’il échouera quand même.
Les attaques aériennes menées près de la frontière syrienne depuis une semaine , et qui auraient fait plus de 50 morts,les militaires Us ne peuvent faire état du nombre des victimes puisqu’ils larguent leurs bombes très courageusement quasi-à l’aveuglette depuis le ciel sur des cibles imprécises, seraient destinées à détruire des repaires de membres d’Al Qaïda.
Comme les autres raids menés jusqu’ici contre la population civile, elles n’auront sûrement pas comme effet de faire accepter l’occupation et pas non plus son avatar la " constitution " destinée à atomiser la nation irakienne. Déjà, des pourparlers entre des leaders sunnites et le mouvement shiite de Moqtada Sadr sont entrepris pour mettre au point une conférence nationale qui ralliera l’opinion autour d’un NON pour le référendum de la mi-octobre. L’imperméabilité des dirigeants étasuniens aux arguments de leurs propres experts qui depuis plus d’un an tentent de décourager de telles opérations, car elles ont fait largement la preuve qu’elles ne font qu’alimenter la résistance, frise l’étanchéité absolue.
Les bellicistes néocons sont toujours à l’oeuvre et le discours de Bush le deuxième le 24 août en fait la démonstration. L’affirmation de la présence militaire pérenne en Irak laisse pointer le renouvellement d’une menace sur la Syrie. William Kristol , le néocons ultra-sioniste zélé , dans son éditorial du Weekly Standart de cette semaine, reprend à son compte l’antienne du terrorisme menaçant le monde "civilisé " et appuie le thème que la Syrie représente l’arrière-pays pour les terroristes .
Le pays de Cham (1) est donc en danger. Il subit déjà l’étranglement de l’embargo. Les prétextes de l’invasion ou de la simple destruction sont en train de se forger dans les laboratoires de la rumeur et du mensonge.
Aux idéologues likoudiques qui tirent leur légitimité d’un tribalisme étriqué, puisé aux sources d’une mythologie des origines frelatée raciste sans avenir aucun car par essence se revendiquant comme non universaliste, le peuple syrien, toute confession confondue, oppose l’une de ses plus grandes fiertés, le personnage historique de Salah Eddin El Ayyoubi. Ce général célèbre pour ses attitudes magnanimes et chevaleresques à l’égard de ses ennemis, fondateur d’une dynastie qui régnera sur l’Égypte et la Syrie eu XIIème siècle, était d’origine kurde.
Les diviseurs peuvent ravaler leurs intentions, encore à ce jour, nul ne songe à avancer une quelconque identité ethnique ou religieuse devant son appartenance à la nation arabe syrienne. Faut-il leur rappeler que l’envahisseur français, à l’époque des mandats franco-britanniques sur le Moyen-Orient, n’ a pu y assurer sa colonisation plus de 25 ans ?
Le général Gouraud , symbole de la suffisance militaire française ,et se voulant l’incarnation de la vengeance des Croisés chassés de Jérusalem en 1185 , avait eu la délicatesse de venir piétiner la tombe de Salah Eddin, en lui déclarant : Saladin , nous voilà.
À tous les Gouraud, Sharon et Kristol, nous faisons savoir que nous sommes toujours là.
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(1) Cham est le nom habituel de Damas Par extension, désigne la Syrie