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PERES DE LA PATRIE ET REVISIONNISME HISTORIQUE

Publie le vendredi 13 février 2004 par Open-Publishing

Traduction

PERES DE LA PATRIE ET REVISIONNISME HISTORIQUE

Encore un Italien, avec un ’I’ majuscule qui s’en va. Nuto Revelli, intellectuel,
démocrate, partisan qui, en tant que chasseur alpin, avait vécu la tragédie des
armées envoyées à mourir sur le Don par le duce de l’Italie fasciste. Et qui
avait ensuite racheté cette honte en se battant pour libérer la Patrie de l’occupant
allemand.

Ils s’en vont, les meilleurs enfants du vent de liberté et de démocratie qu’a été la
Résistance, qualifiée de mythe par les nouveaux chantres du deuxième régime,
celui de la Droite rancunière. Sur la base des faussetés de son révisionnisme
qui réécrit l’histoire à loisir et fait sembler irréelles des réalités irréfutables :
pendant le premier régime, celui de l’état fasciste, l’assignation à résidence
n’était pas un lieu de vacances, et les opposants même illustres, après avoir été matraqués - et
nombre d’entre eux assassinés (faut-il la liste ?) - vivaient exclus et contrôlés.

Après les hontes de l’Empire sanguinaire des gaz en Ethiopie, après la politique
mercenaire en Espagne, le premier régime accomplit un double acte de servilisme
au système politique le plus féroce de l’histoire contemporaine : l’Allemagne
nazie. D’abord avec l’entrée dans la guerre d’occupation qui devint un conflit
mondial. Et, après le 8 septembre, en éternisant la servitude atroce de la dite
République Sociale.

Quelques jeunes se rangèrent aux côtés des figures pourrissantes qui entouraient
le duce - le boucher d’Ethiopie Graziani, l’assassin Pavolini - parce qu’ils
avaient été contraints (si on ne répondait pas à l’appel aux armes, il n’y avait
que deux chemins : celui de la montagne en tant que partisans ou celui de l’internement
dans les camps nazis). D’autres parce qu’ils s’étaient entichés de la propagande
poussant à servir la Patrie et en racheter l’Honneur.

De quelle patrie et de quel honneur s’agissait-il ?

La patrie. Un état farce qui s’était liquéfié après le refus de confiance à Mussolini
proclamé par ses dignitaires les plus sûrs eux-mêmes, quand les fronts grec,
albanais, russe montraient l’impréparation et la déroute de notre armée, malgré le
sacrifice et l’héroïsme des soldats. L’honneur. Etait-il honorable de servir
les nazis en massacrant non seulement des partisans combattants, mais des prisonniers,
souvent torturés et ensuite assassinés, ainsi que des milliers de civils sans
défense ?

Une fois la guerre finie, plutôt que de se repentir des méfaits et de jouir en
silence et dans l’oubli de l’amnistie reçue par les politiques de la nouvelle
Italie, les nostalgiques du fascisme ont continué des décennies durant à comploter,
en retournant à l’assassinat avec les groupes de choc du Msi. Ainsi aujourd’hui
l’Italie née de la Résistance a parmi ses ministres un ex "enfant" de Salo’ (Tremaglia)
ni repenti ni silencieux, un vice premier (Fini, sevré par le raciste Almirante)
qui a dans son parti des amis de nazis fauteurs de massacres : deux noms, le ministre
Alemanno intime du chef de Forza Nuova (organisation néo fasciste : NdT), Fiore.
Tandis qu’une certaine "gauche" pour sa propre Realpolitik (finalisée à quoi ?
le député Violante ne l’a jamais expliqué) soutient depuis longtemps devoir comprendre
les raisons des tortionnaires de Salo’, comme si pendant cinquante-cinq ans on
n’avait pas déjà jeté un voile pieux sur des sadismes qui, dans la meilleure
des hypothèses, méritaient d’être expiés à vie.

Nous assistons, au contraire, aux shows courtisans journalistiques de fascistes
plus ou moins affichés, protégés et promus par le régime berlusconien de l’information
contrôlée, qui font une lecture absurde de ce passé tragique et disent : "les
morts sont tous égaux". Il tentent de mettre les malheureux manipules de Salo’
avec les têtes de mort sur leurs casquettes qui ne servaient pas la patrie mais
les cruelles troupes d’occupation d’Hitler, aux côtés des patriotes combattant
pour la liberté et la démocratie.

C’est une opération honteuse et inacceptable qui doit être contrastée en racontant
aux jeunes ce qui s’est passé, puisque maintenant leurs grands-parents ne peuvent
plus le faire. En relisant les témoignages de ceux qui vécurent en protagonistes
les vingt durs mois de la lutte de Libération. Emblématique et illuminante est
la figure de Nuto Revelli qui - comme il le narre dans son chef d’œuvre "La guerra
dei poveri" - avait commencé en tant que chasseur des Alpes une guerre sur le
front fasciste, comprenant à ses frais le drame de ce choix. Et au moment de
l’écroulement des illusions minables il s’était engagé sur la route du redémarrage
moral en se mettant au service de la vrai Patrie renaissante.

Comme des milliers de jeunes partisans il choisit le chemin de la liberté, de
la démocratie, de la paix, de la reconstruction. Et non celui des représailles,
des tueries, des déportations, des camps, des holocaustes. Nous invitons tous
les Italiens à réfléchir à cela. Qui a voté pour l’affairisme de Berlusconi,
pour le post fascisme nettoyé de Fini, pour le racisme de Bossi a perdu le chemin
de la conscience démocratique que des hommes comme Revelli ont contribué à former
pendant soixante ans. Nous ne nous fatiguerons pas de les rappeler et aucune
manipulation de l’histoire ne pourra jamais nous les faire oublier.

Enrico Campofreda

Traduit de l’italien par Mc et G. Rossi

13.02.2004
Collectif Bellaciao