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Pologne,une affaire de famille,

Publie le mardi 11 juillet 2006 par Open-Publishing

Le chef du gouvernement polonais Kazimierz Marcinkiewicz a été remercié vendredi 7 juillet. Son poste est repris par le président du parti Droit et Justice (PiS), Jaroslaw Kaczynski, frère jumeau du Président polonais Lech Kaczynski. La presse européenne suit avec inquiétude l’évolution de ce pays.

Le Soir (Belgique)

"La Pologne est désormais une affaire de famille", écrit Pol Mathil dans un éditorial. "Il s’agit à la fois d’un coup de théâtre et d’un coup de palais. Rien n’explique pourquoi il fallait démettre un Premier ministre qui bénéficie d’une cote de popularité de 70 % pour installer à sa place Jaroslaw Kaczynski, homme à poigne au caractère ombrageux, qui, en tant que président du PiS, gérait le pays dans l’ombre. Rien, sauf un règlement de comptes au sein de l’équipe dirigeante. M. Marcinkiewicz a été probablement victime de sa trop grande popularité. (...) Jaroslaw Kaczynski a décidé de ne plus laisser quelqu’un s’élever au-dessus de lui. Surtout, le Premier ministre renvoyé qui, malgré sa popularité, n’avait pas de réel pouvoir au sein d’un parti entièrement inféodé aux frères Kaczynski, avait commencé à formuler des idées indépendantes et à jouer un jeu plus autonome."

Mlada fronta dnes (République tchèque)

"La concentration des pouvoirs entre les mains des frères Kaczynski soulève un certain nombre de questions", commente Jan Rybar à propos de l’actualité polonaise. "Le nouveau Premier ministre Jaroslaw Kaczynski a toujours déclaré qu’il ne souhaitait pas être chef du gouvernement tant que son frère était président, expliquant que ce ne serait pas bon pour la démocratie et l’image de la Pologne. Aujourd’hui, il a changé d’avis (...). Et cela nous concerne également. Le cap suivi par la Pologne sur le plan de la politique européenne et mondiale aura des répercussions sur l’ensemble de l’Europe centrale. Les enjeux de l’avenir de la Pologne et de ses quarante millions d’habitants sont autrement plus importants que ceux de la situation politique actuelle de la Slovaquie, par exemple".

Polityka Online (Pologne)

Jacek Zakowski s’interroge sur les motifs de la destitution de Marcinkiewicz. "Nous en sommes réduits aux hypothèses. Une explication me paraît néanmoins plus probable que les autres. Il s’agit du fossé croissant entre la politique sociale et internationale de Lech Kaczynski et de Kazimierz Marcinkiewicz. Kaczynski est le plus mal noté des présidents polonais alors que Marcinkiewicz est l’un des Premiers ministres les plus appréciés (...). En plaçant son frère à la tête du gouvernement, le Président polonais abolit ce contraste. Car Jaroslaw convient aussi peu au fauteuil de Premier ministre que Lech au fauteuil de Président (...). Jaroslaw espère désormais que les Polonais n’opposeront plus la faiblesse du Président aux bons résultats du Premier ministre".

Die Presse (Autriche)

Helmar Dumbs est effaré. "Lorsque Jaroslaw Kaczynski est finalement parvenu, après des mois de manoeuvres boiteuses, à former une coalition avec l’extrême droite et un loubard de la politique, on croyait que la situation ne pouvait pas être pire. Erreur. Avec un goût très sûr pour les situations alarmantes, voilà qu’il dépose l’homme qu’il avait mis en place. Et trompe ainsi ses électeurs. Il avait clamé haut et fort qu’il ne prendrait jamais la tête du gouvernement tant que son frère jumeau, Lech, serait Président. Durée de la promesse : moins d’une année".

die tageszeitung (Allemagne)

La politologue Katarina Niewiedzial estime qu’il serait erroné de ne voir que les défauts du PiS des frères Kaczynski, étant donné qu’il s’agit du parti qui a permis à la Pologne de rompre avec son passé. "Le PiS a déclaré qu’il voulait réconcilier les Polonais avec l’Etat et renforcer le sentiment identitaire. Pour ce faire, il entend créer, en marge de la loi de lustration (qui interdit aux anciens membres du parti communiste d’occuper de hautes fonctions politiques), un organe central de lutte contre la corruption, et supprimer le service des renseignements généraux, qui dépend de l’armée et date de l’ère communiste. Autre élément constitutif de cette stratégie : les frères Kaczynski souhaitent promouvoir la solidarité et en appellent au patriotisme des Polonais. Si le PiS remporte son pari, une telle politique pourrait se révéler salutaire en jetant les bases d’un Etat plus démocratique, plus solidaire, moins corrompu, et plus digne de confiance aux yeux de ses habitants".