Accueil > Pour 71 % des Français, M. Chirac radicalise le mouvement anti-CPE
Pour 71 % des Français, M. Chirac radicalise le mouvement anti-CPE
Publie le lundi 3 avril 2006 par Open-Publishingde Arnaud Leparmentier
L’intervention de Jacques Chirac sur le contrat première embauche (CPE), vendredi 31 mars, ne va pas permettre de sortir de la crise politique et sociale. C’est la conclusion d’un sondage réalisé samedi 1er avril pour Le Monde par Ipsos auprès de 951 personnes âgées de plus de 18 ans.
Seules 20 % des personnes interrogées estiment que l’intervention du président de la République va "plutôt permettre de débloquer la situation", tandis que 71 % pensent qu’elle "va plutôt entraîner une radicalisation du mouvement anti-CPE". Ce dernier avis est partagé par 82 % de la gauche parlementaire et 77 % des moins de 26 ans, mais aussi par la moitié de l’électorat UMP et 65 % de l’UDF. "Quand un président de la République intervient et que plus des deux tiers de la population dit que cela va radicaliser la situation, on peut difficilement ne pas dire que c’est raté", analyse Jean-François Doridot, qui a mené l’enquête pour Ipsos.
D’une manière générale, 52 % des Français ont jugé que M. Chirac avait été "plutôt pas ou pas du tout" convaincant, tandis que 23 % pensent qu’il l’a été. Un quart des sondés ne se prononcent pas. Cette indifférence est considérable pour une allocution suivie par 20,6 millions de téléspectateurs, qui intervient après deux mois de conflit social. Elle révélerait la perte d’autorité de la présidence de la République.
Clivage politique net Résultat, à la veille de la journée de grève du 4 avril, 59 % de la population se dit solidaire du mouvement anti-CPE. Le recul n’est que de trois points par rapport à deux enquêtes Ipsos réalisées les 25 et 29 mars. "Un recul aussi faible avec un président qui lâche du lest, ce n’est pas pas bon", poursuit M. Doridot. Mince consolation, le gouvernement bénéficie du soutien de la droite : les trois quarts de l’électorat UMP se disent non solidaires du mouvement anti-CPE, contre 62 et 63 % fin mars ; l’UDF rentre dans le rang de la majorité, puisque 64 % de ses sympathisants se disent non solidaires de la contestation, contre 53 % le 29 mars et 43 % le 25 mars. En revanche, 71 % des moins de 26 ans sont solidaires du mouvement, tandis que seuls 13 % d’entre eux s’y opposent. Cette radicalisation des jeunes s’explique par le côté peu lisible des décisions de Jacques Chirac, qui a promulgué le CPE tout en proposant des aménagements.
Le clivage partisan est net. 60 % des Français - 80 % des sympathisants de gauche et 72 % des jeunes - désapprouvent la promulgation de la loi, tandis que 36 % l’approuvent (74 % de la droite parlementaire). La réduction à un an de la période d’essai et la motivation du licenciement recueillent l’assentiment de 54 % des Français (82 % de la droite parlementaire) mais ces aménagements sont rejetés par la moitié des moins de 26 ans et 59 % de la gauche parlementaire. 54 % de la population (73 % de la gauche parlementaire, 62 % des moins de 26 ans, 61 % du Front national) demandent le retrait du CPE même modifié, tandis que 43 %, dont 79 % de la droite, demandent son adoption. "La promulgation de la loi a été vécue comme une provocation, le président donnant le sentiment de continuer à vouloir établir un rapport de force et à ne pas reconnaître ses erreurs. Il y a une semaine, on avait l’impression qu’il serait possible d’aménager le CPE 1 pour avoir un CPE 2. Aujourd’hui, le CPE 2 est quasiment mort dans l’opinion, mais aussi dans la classe politique", poursuit M. Doridot. Il juge qu’avec une telle mobilisation des jeunes il sera difficile pour les syndicats de salariés de négocier.