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de Renaud B.
Suite au référendum sur la constitution européenne, la gauche s’est clairement divisée. Les affrontements verbaux entre partisans du non et partisans du oui, avec un certains nombres de dérapages, mais aussi la division entre l’électorat de gauche et ses représentants. Plus de la moitié des sympathisants socialistes et environ 60% des Verts se seraient prononcés contre ce traité, seul l’électorat de l’extrême gauche partage les diagnostics de ses dirigeants.
Il est donc certain qu’un travail de longue haleine sera nécessaire pour réhabiliter une gauche capable de rétablir la force de conviction qui permit les victoires populaires de la Commune ou du Front Populaire. Pour cela, quelles actions concrètes peut-on envisager ? Faut-il envisager le modèle des partisans du non ou celui des partisans du oui ? Le débat ne fait que commencer pour tous les européens convaincus, pour la gauche française, mais ce non peut surtout initier un débat de la gauche européenne.
Tout d’abord, il faudra s’adapter à ce non massif, et surtout accepter qu’il existe une signification profondément européenne dans ce non. Si l’on cherche à ignorer cela, nous fonçons dans le mur fasciste. Car depuis vingt ans, les politiques (plus ou moins) libérales menées à l’échelon continental favorisent la montée des partis populistes et fascistes. Qu’on le veuille ou non, l’extrême droite reconquiert ses bases dans tous les pays européens : Autriche, Allemagne, France, Italie, Pays-Bas ; dans certains pays, la droite en vient aussi à adopter des discours frisants avec la xénophobie : le Royaume-Uni et l’Allemagne, en particulier.
Au-delà des politiques de monétaires ou des politiques de libéralisations menées par Bruxelles, on peut trouver une autre explication à cette montée de l’extrême droite : une gauche qui a voulu se convertir à un libéralisme européen, directement inspiré du système économique américain. Cette gauche libérale aura plus ou moins de succès en fonction des pays, que ce soit en ce qui concerne leurs actions ou leurs résultats électoraux. Si Blair réussit actuellement bien que « les déçus du blairisme » soient de plus en plus nombreux, l a gauche libérale a échouée dans la plupart des autres pays européens (se référer à Schröder qui risque fort de perdre les prochaines élections en Allemagne).
Pour remédier à cela, deux solutions sont évoquées : se rapprocher d’une partie des positions de la droite ou retrouver les fondamentaux historiques des succès de la gauche. Le rapprochement avec la droite libérale ou conservatrice a été explicitement proposé par des membres du SPD, voire même par D.Cohn-Bendit qui songeait à organiser des meetings communs avec F.Bayrou. Ce fut plus ou moins la démarche de François Hollande lors de sa photo avec N.Sarkozy. Adopter une telle « stratégie, c’est perdurer dans l’erreur. On a vu les résultats calamiteux en 2002, et peut être aussi avec les « ouitistes » de gauche lors de ce référendum. C’est donc le risque de voir les déçus de la gauche se reporter sur l’extrême droite, comme on le constate depuis une vingtaine d’années sous l’impulsion des politiques libérales européennes.
L’autre possibilité, retrouver « les fondamentaux », ne consiste pas en un rassemblement nostalgique. Il ne s’agit pas de retrouver les pavés de 68, encore moins les portraits de Staline ou les cours de catéchisme marxiste. Retrouver les fondamentaux, c’est reprendre l’écoute des mouvements sociaux, retrouver une implication individuelle de la part des politiciens dans les mouvements progressistes associatifs et syndicaux (sans que les syndicats ne soient parasités par des partis, évidemment). A l’époque du Front Populaire, c’était l’écoute des mobilisations ouvrières. Aujourd’hui, cela passe par la participation aux Forums Sociaux ou l’application d’un certain nombre d’idées de l’altermondialisme.
Tout cela pourrait paraître simple, mais l’union d’une vaste partie des forces de gauche est rendue extrêmement difficile par une campagne fratricide qui laisse certaines rancunes parmi les militants, quel que soit leur camp. Mais les egos ne peuvent pas, aujourd’hui, bloquer la refondation de la gauche C’est une affaire trop importante, car il s’agit bien de refondation.
Dans un contexte peu propice (pendant la campagne référendaire), certains ont avancé des idées qui peuvent maintenant être pleinement débattues par chacun. Il fut question « d’un nouveau congrès d’Epinay », mais surtout d’un large rassemblement de la gauche pour la rédaction d’un programme commun, en vue d’une primaire avant les présidentielles de 2007.
Que pourrait-on attendre de cette démarche exactement ? Un programme, avant tout autre chose, un programme qui prenne en considération les disfonctionnements modernes. Pas les problèmes du début du XXeme siècle, ni même ceux de l’époque Mitterrand bien qu’il soit à la mode, au PS, de citer Mitterrand pour se justifier. Certes il n’y a pas de « grand socialiste » comme il y eut Guesde, Jaurès ou Blum. Mais c’est une communauté qui fit ces hommes et c’est nous, « peuple de gauche », qui nous devons de faire nos futurs leaders. N’oublions pas que les dirigeants ne sont rien sans nous, et la réciproque est fausse. La preuve : le socialisme a même survécut à Guesde.
Voilà pour ce qui est de notre héritage commun. Notre présent se situe dans les « nouveaux » mouvements de réflexion à gauche, l’altermondialisme et les Forums Sociaux, comme je l’ai déjà évoqué. C’est dans ce mouvements que s’écrit notre avenir : la taxe Tobin, les premières esquisses de services publiques et de SMIC internationaux, les énergies renouvelables (...). Avant cela, c’est un certain nombre de refus : refus de l’AGCS, du non-respect des droits de l’homme, etc.
Pour cela il faudra, encore une fois, réaliser l’union des forces de la gauche progressiste. Qu’importe qui se considère « progressiste », l’union doit s’ouvrir à tous ceux qui seraient susceptibles de s’y reconnaître, cela implique aussi qu’il faut refuser les discours qui commencent à fleurir (« tous derrière moi »). Ceci étant valable autant chez les partisans du oui que chez ceux du non.
La « totalité » (ou la grande majorité) de l’union de ces forces est importante, c’est elle qui permettra une meilleure écoute de la société, c’est elle qui peut intéresser des gens « non-initiés » aux fonctionnements partisans à s’intéresser de nouveau à la politique. C’est par la globalité de cette union que passe la rénovation des idées de gauche (qui impliquera probablement la « modération » de certains et la « radicalisation » des autres). C’est par elle que passe, aussi, la réhabilitation du discours politique au cœur de l’opinion publique. Voilà pourquoi il faut, plus que jamais, inciter les sympathisants aux « idées de gauche » (syndicalistes et associatifs ou membre de rien du tout) à adhérer aux partis politiques.
Le traumatisme de la classe politique, provoqué par le non en France, peut ouvrir une crise des partis dont il faudra savoir profiter si l’on veut construire une gauche forte : lorsque les murs des partis tremblent, c’est qu’il est grand temps de reposer les fondements.
Messages
1. > Refonder la gauche, 3 juin 2005, 16:46
je suis bien d’accord avec cette vision des choses. J’ajouterai pour synthétiser que ce qui me semble essentiel, c’est avant tout de refonder un nouvel humanisme. Cela peut paraitre ambitieux, pompeux tout ce que l’on veut, mais si l’on ne parvient pas à redéfinir la place de l’homme dans nos sociétés, on passera à côté de l’essentiel.
L’homme (et la femme) doivent être au coeur de toutes les préoccupations, quelque soit son statut : salarié, paysan, artisan. Remettre l’économie au service des citoyens, et revenir sur la conception multinationale des entreprises.
Sans cela il y a un risque de sombrer dans une nouvelle barbarie, comme l’annonçait Castoriadis dans Socialisme ou Barbarie.
2. > Refonder la gauche, 3 juin 2005, 17:38
"Faut-il envisager le modèle des partisans du non ou celui des partisans du oui ? Le débat ne fait que commencer pour tous les européens convaincus" .
Le NON a gagné TRES largement ! Apparement, être "européen convaincu", ça n’aide pas à comprendre les rapports de force !
1. > Refonder la gauche, 3 juin 2005, 17:44
convaincu de quoi, au fait ?!
3. effets collatéraux : Chirac a réussi, 3 juin 2005, 18:27
Si Chirac incarne l’échec avec le référendum,
par contre en le proposant, il aura deux réussites indéniables à son actif et qui feront date pour au moins 10 ou 15 ans :
1- il aura réussi à faire imploser la gauche... pchiiiiithht booouuumm
Déjà le 21 avril 2002 avait déjà amorcé la décomposition du PS,
le 29 mai aura précipité et ce, de manière durable, l’effondrement du parti.
2- ensuite le non va propulser Sarko pour 2007 car Chirac n’a plus maintenant aucune crédibilité pour les prochaines présidentielles... et en face, il n’y aura personne.
Quant aux esprits naïfs qui pensent que la gauche va se refonder, on ne va pas nous refaire le coup de l’UNION DE LA GAUCHE des années 70... les fractures étant réelles et durables.
Ensuite, nous faire croire qu’une partie de l’électorat PS ou Vert qui a voté non est prêt à se jeter dans les bras de l’extrême gauche ou du PC qui se les jouent grands vainqueurs, c’est prendre ses H Désirs pour des réalités....
car il na faut pas oublier que le non n’a aucune base politique stable et unie : comment marrier les carpes racistes et xénophobes du FN aux lapins (atteints du syndrôme "plombier polonais") du PS ?
on va se rendre compte dans les prochains mois que la "victoire" de non aura d’autres
effets secondaires non désirés par personne
1. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 3 juin 2005, 19:05
Salut !
Désolé de te contredire, mais le premier résultat du référendum pourrait bien être la grève générale, surtout que la CNT a lancé un appel dans ce sens !
Le NON est en fait homogène : ce sont essentiellement les pauvres qui ont dit NON !
Quand au racisme de certains d’entre eux, il s’évanouira dans la grève générale si elle a effectivement lieu, parce que les racistes verront bien que les Noirs et les Arabes font grève en même temps que les Blancs et pour les mêmes raisons et contre les mêmes patrons. Il verront que l’ennemi n’est ni les Noirs ni les Arabes, mais les patrons communs aux Blancs, aux Noirs et aux Arabes !
Les antiracistes conséquents devraient donc être pour une telle grève générale.
A+
do
http://mai68.org
2. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 3 juin 2005, 19:38
La gauche a implosé en tant que gauche vers 1983. Josquin ou Chirac, c’est la même politque.
Cette fois, le gros des troupes a dit NON au libéralisme ! C’est la peuple qui vient de marquer un premier point ... depuis des années. Personne ne pense changer la nature politique de Chirac ni celle de ses amis ! Ils se battent aussi pour le monde de la finance qu’ils représentent. Si le Parti Socialiste s’effondrait, la gauche ne perdrait rien. Le risque est justement que la PS reste ce qu’il est devenu, un parti pronant une politique néo-libérale.
Helge
3. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 3 juin 2005, 23:52
Quelqu’un pourrait-il expliquer pourquoi ceux qui profèrent ces belles idées généreuses refusent d’être mis en situation d’essayer de les mettre en oeuvre , ce qui en démocratie passe par les partis, non par le lobbying plus ou moins obscur dans lequel le trotskisme par exemple s’est toulours réfugié ? Pourquoi le mouvement ATTAC par exemple se cantonne t’il dans le "ministère du verbe" comme viennent de le redire de fait ses dirigeants (même après une grande victoire comme celle-ci). Ne serait-ce pas plus facile et plus propre de ne pas se mettre les mains dans le cambouis du réel ???
Ne serait-il pas plus facile de détruire -et on peut bien en comprendre les raisons- que de construire ???
Et finalement, n’a t’on pas les hommes politiques qu’on mérite ?
4. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 3 juin 2005, 23:56
C’est etre de gauche de se faire prendre en photo avec Sarkozy numero 1 de l’UMP et un tres tres proche du MEDEF sur Paris Match (certains prétendants de gauche ne sont pas choqués de leur pseudo-leader), que toutes les personnes soient disant de gauche qui adherent à ce leader passe à droite, les vrais de gauche se débrouilleront entre eux, et construiront l’avenir.
merci
5. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 4 juin 2005, 00:03
Ca veut dire quoi "NON au libéralisme" ? Non au capitalisme -propriété privée des moyens de production ? (attention la constitution de 89 dit déjà : la propriété est un droit inviolable et sacré...) Non à la marchandisation de tout ou seulement à une partie et laquelle ? Non aux échanges marchands ? Non à la société de consommation ? Non à la Banque Européenne ? à l’OMC ? Non aux US et à Thatcher ?
Oui au communisme , à la nationalisation des moyens de production ? etc. etc.
Ca mériterait des précisions NON ?
6. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 4 juin 2005, 00:32
TTAC par exemple se cantonne t’il dans le "ministère du verbe" ????
Faux. ATTAC est un mouvement d’éducartion populaire tourné vers l’action. Et je peux te dire qu’on agit.
Secondement, la prise de parole est une action. Et je peux aussi te dire que celle d’ATTAC est redoutée ici et là.
7. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 4 juin 2005, 00:44
reponse à 62.**.170.***
va voir Hollande et Sarkozy ils t’expliqueront tres bien (voir également Medef) !! en plus étant proche de leur politique ils te répondront rapidement....
8. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 4 juin 2005, 00:56
Non, on a pas les hommes, ni les femmes politiques qu’on mérite. 90 %
de nos parlementaires ont voté « OUI », mais seulement 45 % des
électeurs l’on fait. C’est pourquoi Marie-George Buffet demande la
dissolution du parlement. Tu vois, il y a des gens qui vont au
charbon.
Mais je vais t’expliquer le truc que tu demandes. Un argument, une
idée valent pour eux-mêmes quelque soit la personne qui les exprime.
Les arguments tendant à discréditer la personne n’ont pas de valeur
rationnelle. Et les idées peuvent être décisives. La preuve par
Référendum sur la Constitution.
Le discours est un pouvoir, et ce pouvoir a changé de camp. Le mépris,
les insultes adressés à la majorité des votant masquent peut-être une
panique devant l’évidence de cette nouveauté éclatante.
ATTAC a joué un grand rôle dans cette affaire, c’est d’ailleurs le
but qu’il se donne. Et si ce mouvement suscite tant de haine, c’est
peut être qu’il remplit assez bien son objectif.
Dis, le phraseur à l’aigre propos, faut-il demander à son professeur
de littérature de nous montrer ses romans ? Es-tu certain que tout ce
que tu dis du matin au soir est issu d’une action concrète ? Tu
demandes à l’architecte de te monter un mur d’équerre avant de regarder
son plan ? Oui ? Alors explique à ton tour ce qui te donne autorité
pour poster sur Bellaciao.
Je te taquine, toi aussi. Toujours la pêche !
Helge
9. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 4 juin 2005, 01:06
Tout à fait. Lui il a voté sans savoir, probablement OUI. Pour voter
non contre l’autorité et le rouleau compresseur politico-médiatique,
fallait avoir des convictions, de la motivation.
"Non au libéralisme" veut dire que le marché ne peut pas se réguler
par la concurrence. C’est simple, parce que le libéralisme est cette
idée simpliste. Le résultat est énorme tant en profits financiers d’un
côté et en, misère de l’autre. Comme quoi des invention simples
peuvent rapporter gros.
Pas taquine là, mais toujours la pêche !
Helge
10. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 4 juin 2005, 15:09
La question contient la réponse.
Seul reste à définir le contenu du communisme futur. Les nationalisations seraient vraiment une des solutions, surtout contre les trusts et leur représentants arogants. La politique devrait être là pour équilibrer les besoins et faire de grands choix afin que l’’économie ne soit pas nuisible à la population.
Les précisions seront données par la connaissance du passé et par l’évolution de l’histoire.
KIKIROU
11. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 4 juin 2005, 15:23
Pourquoi faire attention à la constitution de 89, qui fur rédigé par et pour la bourgeoisie ?
12. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 4 juin 2005, 17:09
Un point pourrait être fondamental, on répète ici que le PS n’est plus à gauche depuis 1983.
Depuis 1983, il existe des politiques économiques et monétaires relativement strictes sur le plan européen... Qui pourrait bien se révéler coupable du fait que l’on ne distingue plus une politique de gauche d’une politique de droite ? Je ne suis pas spécialiste, aux économistes de répondre.
Mais si c’était bien le cas, le "non" ne vient-il pas remettre en cause tout le processus de construction européenne ? Donc, en même temps, les mesures mises en place en 1983 ? Donc...
13. > effets collatéraux : Chirac a réussi, 5 juin 2005, 20:27
OUI AU COMMUNISME !
OUI A LA NATIONALISATION DES MOYENS DE PRODUCTION !