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Sarko, l’Etat et l’Eglise ??????
Publie le jeudi 27 décembre 2007 par Open-Publishing3 commentaires
La bûche du chanoine le temps
La chronique.
François Gross
Jeudi 27 décembre 2007
L’Elysée n’est que son pied-à-terre. Nicolas Sarkozy arpente la planète comme d’autres un arrondissement. Boulimique du voyage, le président français déconcerte ses concitoyens par les déclarations qu’il lâche sur sol étranger. Se trouve-il à Pékin, c’est pour y affirmer qu’il n’y a « qu’une seule Chine » dont Taïwan comme le Tibet sont parties intégrantes. En visite à Rome pour y être intronisé chanoine d’honneur de la basilique du Latran, il souhaite au nom de « l’intérêt de la République » qu’il y ait, en France, « beaucoup d’hommes et de femmes qui croient et espèrent ». Jugeant « criminel » d’ignorer les racines chrétiennes des enfants de Clovis, il surenchérit : « La désaffection progressive des paroisses rurales, le désert spirituel des banlieues, la disparition des patronages, la pénurie des prêtres n’ont pas rendu les Français plus heureux. » Pour moins que ça, un militant de la laïcité chuterait de son siège.
D’autres, avant lui, pesaient au trébuchet de l’orfèvre leurs paroles sur les sujets sensibles. Nicolas Sarkozy pratique, lui, le poids public. Il ne fait plus aucun cas de Taïwan qui revendique un siège aux Nations unies ; il s’incline devant la sinisation systématique du Tibet, région autonome annexée par Pékin au début des années 60. Cet alignement de la France sur un prétendu réalisme a été amorcé par Jacques Chirac en 2004. Son successeur parfait le virage alors amorcé.
Les propos touchant aux rapports entre l’Etat et les religions tranchent, en revanche, avec l’extrême prudence de son prédécesseur en cette matière inflammable. Ils n’étonnent pas les lecteurs d’un petit livre intitulé La République, les religions, l’espérance publié il y a trois ans. Son auteur, alors ministre de l’Intérieur, dépensait beaucoup de son énergie inépuisable à favoriser la création d’une instance de représentation des musulmans de France. Il souhaitait se donner, au sein d’une communauté aux multiples facettes, un interlocuteur valable, calquant ainsi le modèle de la Conférence des évêques, de la Fédération protestante de France ou du Conseil représentatif des institutions juives de France. L’homme qui, chaque matin en se rasant, admirait dans son miroir le possible chef de l’Etat, annonçait qu’il y aurait, avec lui, du nouveau au chapitre de la laïcité républicaine. Le discours du Latran atteste de la continuité de projet entre le candidat en quête d’électeurs et le chanoine épris d’une sulfureuse Italienne.
Telle une bûche de Noël tombée sur la table des familles de France, le prêche romain de Nicolas Sarkozy est promis à la controverse. L’accueil que lui ont trop vite réservé certains dignitaires catholiques ne facilitera pas le débat. D’aucuns rappelleront le servile empressement de l’épiscopat en juillet 1940, sollicitant de Vichy des subsides immédiats pour l’enseignement privé. D’autres évoqueront 1984 et le cuisant recul de François Mitterrand après une monstre manifestation politico-religieuse. Le président, décidément, aime la provocation.