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Syrie : les heurts entre manifestants et forces de l’ordre font des dizaines de morts

Publie le jeudi 24 mars 2011 par Open-Publishing

Au moins 25 cadavres de manifestants sont arrivés jeudi 24 mars à l’hôpital de Deraa, selon un responsable de l’hôpital. La ville située à une centaine de kilomètres au sud de Damas est le foyer d’une contestation sans précédent du pouvoir syrien depuis sept jours.

La veille, un groupe de défense des droits de l’homme avait fait état d’une douzaine de morts depuis le début du mouvement de protestation. Déjà, dans la nuit de mardi à mercredi, cinq personnes avaient été tuées et des dizaines d’autres blessées par des tirs à balles réelles des forces de l’ordre, près de la mosquée Al-Omari où le mouvement de contestation dans le Sud a commencé vendredi, selon un militant des droits de l’homme.

"Les forces de l’ordre ont tiré à balle réelle et lancé des gaz lacrymogènes sur les manifestants" qui tenaient un sit-in autour de la mosquée, a raconté un militant des droits de l’homme ajoutant : "L’électricité a été coupée et les tirs ont aussitôt commencé" contre les protestataires qui avaient commencé à dresser des tentes autour de la mosquée, où ils comptaient passer la nuit.

Plus d’un millier de manifestants s’étaient rassemblés dans et autour de la mosquée en scandant des slogans contre le régime, avait expliqué la même source, précisant que les protestataires étaient "encerclés par un grand nombre de forces de sécurité et d’éléments armés".

"UN GANG ARMÉ"

Mercredi après-midi, lors des funérailles de deux des cinq personnes tuées dans la nuit, les forces de l’ordre syriennes ont de nouveau ouvert le feu. "Des balles réelles ont été tirées alors que les parents des deux victimes ainsi que des manifestants revenaient de l’enterrement", a déclaré un militant des droits de l’homme. Trois personnes, dont une fillette, ont été tuées, selon des témoins. Six manifestants avaient déjà été tués depuis vendredi dans la répression des manifestations. Mercredi après-midi, le gouverneur de la ville de Deraa a été limogé.
Réagissant mercredi matin aux heurts de la nuit, Damas les a imputés à un "gang armé". Ce "gang armé a attaqué après minuit une équipe médicale dans une ambulance qui passait près de la mosquée Al-Omari, tuant un médecin, un aide-soignant et le chauffeur", a affirmé l’agence officielle Sana. "Les forces de l’ordre qui étaient proches des lieux sont intervenues, elles ont pu toucher certains et arrêter d’autres" membres de la bande armée, a ajouté l’agence, précisant qu’un membre des forces armées avait aussi été tué. "Les forces de l’ordre continueront de poursuivre les bandes armées qui terrifient les civils en assassinant, volant et incendiant des biens publics et privés à Dara", a fait savoir Sana.

Un photographe de l’AFP a été frappé par les forces de l’ordre, qui lui ont saisi son appareil-photo. Après avoir été interrogé, il a reçu des excuses des autorités, mais n’a pu récupérer son matériel. Selon le photographe, des soldats ont installé des barrages à toutes les entrées de la ville.

CONTESTATION SANS PRÉCÉDENT

Outre Deraa, la contestation touche également des villes avoisinantes comme Jassem ou Nawa. A Nawa, 2 500 manifestants scandant des slogans contre le pouvoir se sont dirigés mardi vers le commissariat de police, a déclaré par téléphone à l’AFP un militant des droits de l’homme, ajoutant sans plus de détails que des affrontements s’étaient ensuite produits entre forces de l’ordre et manifestants. Des manifestations ont eu lieu également à Jassem comme la veille, a-t-il dit.

Un mouvement de contestation sans précédent a commencé le 15 mars en Syrie à la suite d’un appel d’une page Facebook, intitulée "La révolution syrienne contre Bachar Al-Assad 2011", à des manifestations pour "une Syrie sans tyrannie, sans loi d’urgence (depuis 1963) ni tribunaux d’exception". De petites manifestations appelant à des réformes politiques ont été dispersées depuis le 15 mars dans la capitale, puis le mouvement s’est étendu au sud du pays. Outre les morts à Deraa, des dizaines de personnes ont été arrêtées à travers le pays.

L’Observatoire syrien pour les droits de l’homme a par ailleurs fait état de l’arrestation, mardi, de l’écrivain et militant Louaï Hussein près de Damas. Louaï Hussein, 51 ans, avait publié lundi sur Internet un communiqué pour recueillir des signatures en solidarité avec les habitants de Deraa, souligne le communiqué. Par ailleurs, les services de sécurité ont arrêté dimanche soir Rami Suleimane Iqbal à Daël, dans le gouvernorat de Deraa, après un entretien avec la radio BBC en langue arabe au cours duquel il avait évoqué la situation dans cette ville. "Son sort est inconnu", indique l’ONG.

Les Etats-Unis ont fait part mercredi de leur inquiétude face aux événements syriens, et ont condamné l’usage de la violence contre les civils à Deraa.

http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2011/03/23/syrie-des-heurts-entre-manifestants-et-forces-de-l-ordre-font-au-moins-cinq-morts_1497094_3218.html