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TOUS COUPAT TOUS COUPABLES

Publie le jeudi 22 janvier 2009 par Open-Publishing
5 commentaires

de Alain Brossat

La campagne qui s’est développée en faveur des inculpés de Tarnac est portée par un si vif et si constant désir d’innocence, de si persistantes références à la légalité, à l’inoffensive innocence des inculpés qu’il apparaît très distinctement que, pour l’essentiel, le référent démocratique indistinct continue à obscurcir la perception du présent politique de ceux qui s’y trouvent mobilisés.

"Ce qui est ici en question n’est évidemment pas la nécessité impérieuse que s’organise une solidarité sans faille avec les inculpés de Tarnac, et que celle-ci soit aussi puissante et déterminée que possible.

La question est plutôt que cette solidarité s’est déployée sur une ligne de pente dont le propre est qu’elle ensevelit sous l’épaisse couche de cendres d’une police sentimentale et « démocratique » tout ce qui pouvait constituer le venin, le ferment de radicalité de L’Insurrection qui vient, avec son appel à se mettre « en route ».

Le rassemblement informe et sans bords qui s’est constitué en faveur des inculpés (et dont, répétons-le, la volte-face des journaux a donné le signal et en quelque sorte défini les conditions) n’est pas sans rappeler le consensus anomique, propre à la « démocratie du public » brocardé par des auteurs comme Rancière et Badiou  ; il s’étend maintenant jusqu’aux dirigeants du parti socialiste, voire du Modem et, inclut bien sûr, le télégénique Besancenot  ; mais c’est un rassemblement qui se tient aux antipodes de ce que s’efforçait de présenter L’Insurrection qui vient et la décision d’y faire jouer en acte le motif de la communauté."

http://www.editions-lignes.com/TOUS-COUPAT-TOUS-COUPABLES.html

Texte inédit en version intégrale (PDF, 16 pages A4, téléchargement gratuit)

Messages

  • Quand y’a beaucoup de monde, y’a pas que du beau monde. Le soutien aurait du rester dans la ligne du parti invisible dont fait partie le comité invisible. C’en est une idée qu’elle est bonne !!

  • Une petite note au camarade travailleur intellectuel Alain B.
    La prison ne me semble pas un lieu des plus propices à l’épanouissement
    des personnes. J’ai cru comprendre que face à un déluge policiaro-politico-médiatique (ouf !), ce n’était pas la démocratie (version fromage) qui avait été défendue mais des incarcérés et qu’à l’occasion faire que les lois d’exceptions (antiterroristes) et liberticides (Perben I & II) ne soient pas une fatalité.
    Quant à des débats sur les écrits des invisibles à la bonne odeur d’encre, je n’ai pas tenu les comptes de ceux qui sont réalisés par les comités de soutien, mais j’engage notre brillant analyste à enquêter de ce coté ; sauf, bien entendu, s’il est trop accaparé par les très nombreuses luttes auxquelles il a participé tout au long de sa carrière.
    NB : les retournements ne suffisent pas à transformer une situation

    • Alain Brossat fait montre d’un certain courage dans cette affaire. Je ne le porte pas particulièrement dans mon coeur, je n’ai pas lu beaucoup de ces travaux mais il me semble que sa critique de la ligne générale des comités de soutien est parfaitement justifiée. Car il ne fait que mettre en évidence le contenu démocrate-républicain qui s’y exprime depuis le début de l’affaire. Toutes les interventions écrites et parlées ( celles des libérés par exemple ) le prouvent : ils n’ont pas d’autre ligne que de revendiquer un "mode de vie", ce qui est un comble pour des gens qui ne cessent de puis des années de jacter sur la ligne de partage. Il n’est qu’à vérifier l’omni-présence des parents ( pour des majeurs revendiquant l’autonomie, c’est assez fort ) ; le ton très faible des interventions d’intellectuels réputés pour leur "radicalité" d’analyse, sur ce coup, faisant preuve d’une soumission politique assez remarquable, et les comités de bases laissant entendre finalement que ce n’est pas l’anti-terrorisme en soi qui est mauvais mais ses excès ( surtout quand il s’attaque à des enfants de la bourgeoisie ). Alors que de jeunes musulmans sont emprisonnés en préventive depuis des années sans que cela éveille tant de compassion, que la gauche cligne de l’oeil du côté des révoltés grecs, on est en droit de se demander pourquoi une telle solidarité ne s’est pas exprimée plus vivement pendant les révoltes de novembre 2005 ou sur la question de l’emprisonnement des déportés de Guantanamo. Car cette "solidarité", non contente d’être socialement et racialement sélective invoque un nécessaire pragmatisme ( les conditions de détention ) et voudraient justifier par là, une espèce de front commun de toutes les forces de gauche. Mais on oublie que les camarades du comité invisible ne cessent depuis des années d’appeller à la mort de la gauche. Comment pourraient-ils accepter aujourd’hui d’en être les chouchous ? Toute la jeunesse radicale d’europe observe la situation et en tire des conclusions. Ainsi, au nom d’une tactique réaliste et respectueuse des individus, on dévalorise tout contenu radical, on donne à la gauche une chance, un moyen de se recomposer. On neutralise la lutte sociale et politique contre la gauche. Mais si la répression devient prétexte au reniement des positions pour lesquelles nous nous battons, pourquoi devrions-nous attendre d’être victimes de la répression pour nous renier ? Autant le faire tout de suite. Donc le texte de Brossat dit certaines vérités essentielles concernant la lutte politique, et en particulier, l’antagonisme total entre les positions des comités de soutien et les positions du comité invisible. Positions qui doivent être défendues en tant que telles, ainsi que la ligne de partage qu’elles affirment. Il faut défendre les positions du comité invisible, les mettre au premier plan de la lutte actuelle contre l’oppression, et même contre leurs rédacteurs s’il le faut.

    • Si j’ai bien compris, (mais ais-je bien compris), pour conforter l’"Insurrection qui vient" il faut construire sa croix, s’y clouer, et attendre que le reste vienne ?

      A mon avis, l"’insurrection" elle va venir avec ou sans. Pas besoin d’inventer des martyrs.

      Ils viendront bien assez tôt, quand il n’y aura plus d’autre alternative.

      Et y aura pas besoin qu’ils se désignent.

      Y en a qui vont se charger de ça sans nous.

      Si certains sont persuadé de ça, au lieu de jouer les "Agnus Deï", feraient mieux de calculer comment faire pour vendre le plus cher possible la peau de l’Agneau. Et à la rigueur comment couper les c...es au Loup.

      Surtout si un jour l’agneau c’est eux. LOL.

      G.L.

    • Deux types de répression conjointe mais de nature différentes, ont eu lieu à l’occasion de cette affaire Tarnac : 1) l’attaque de l’Etat contre un groupe de militants par l’hyper-médiatisation et l’emprisonnement ; 2 ) la neutralisation par les forces de gauche d’une pratique subversive, le sabotage, qui concerne tous les acteurs des luttes sociales et pas seulement quelques groupes de "radicaux". Sur ce deuxième volet repressif, en vantant les qualités d’un mode de vie niais écolos sympas bien intégré dans la société, exerçant de temps à autre, entre quelques opérations comptables en épicerie, le prestigieux office de la pensée philosophique, la gauche a réussi à CRIMINALISER davantage du sabotage ( certes qu’elle distingue du terrorisme mais pour mieux le maintenir comme catégorie criminelle donc légitimement réprimable ). Donc deux types de répression qui annulent de part et d’autre le contenu de cette pratique, qui passe à l’arrière-plan, à l’avantage d’une forme molle, sans pensée, pleine de bonnes intentions. Car nous vous y trompez pas, la nullité désastreuses de la ligne de défense des comités est un recul politique pour le communisme. Et cette ignominie, ni l’Etat Grec ou Italien, ni leurs gauches poubelles, n’ont réussi à l’imposer aux camarades anarchistes de ces pays, pourtant plus exposés à la répression, l’emprisonnement. Et même pas aux camarades emprisonnés depuis plus d’un an pour avoir lutté aux cotés des sans-papiers ( Isa, Fred, Farid, etc ). Pourquoi ? parce que ces camarades défendaient une ligne, la leur, pas celle des avocats, des parents, des gens de "bonne volonté". A moins de faire du négationnisme sur cette question, n’est-il pas consternant que les radicaux français ne soient même pas capables de tenir une position politique ? A quoi sert alors de s’organiser ? Ainsi donc, tout ce tapage théorique, toute cette prose grandiloquente sur l’insurrection, pour ne même pas être capable de défendre l’honorabilité du sabotage, comme pratique massivement répandue dans les luttes sociales ? Quel courage !

      Ainsi, la seule question valable dans toute cette affaire de Tarnac est : allons-nous accepter dorénavant de faire acte de repentance préventive quand l’un d’entre nous est l’objet de la répression ? Allons-nous accepter la vicitimisation et l’innocentisme comme tactique ? Faut-il prendre les positions des libérés de Tarnac pour modèle de défense politique dans les futures mobilisations contre la répression ? Leurs méthodes doivent-elles faire "jurisprudence" en matière de lutte contre la répression ? Faut-il "montrer patte blanche", montrer des gages de "respectabilité sociale pour construire une ligne de défense ? Ou faut-il défendre pied à pied une ligne de défense POLITIQUE, comme c’était encore le cas, il n’y a pas si longtemps ? Tout en combattant les accusations sur des faits précis, il faut revendiquer la pratique du sabotage, c’est-à-dire la pratique de la lutte de classe. "Je ne suis pas l’auteur des faits que vous me reprochez monsieur le proc, mais j’assume politiquement et publiquement la pratique du sabotage". C’est pas compliqué à comprendre, tout de même !