Accueil > Texte de Mathieu Amalric censuré aux Césars
Texte de Mathieu Amalric censuré aux Césars
Publie le dimanche 24 février 2008 par Open-Publishing7 commentaires

Mathieu Amalric, nominé pour le César du meilleur acteur, et qui ne pouvait être présent à la 33ème cérémonie des Césars, avait envoyé un texte dans l’éventualité où il recevrait le prix.
Toute la fin de son texte dénonçait la piètre programmation des multiplexes et s’inscrivait dans le combat actuel des cinémas indépendants...
Mais, à sa grande surprise, Antoine de Caunes qui a lu son texte vendredi soir, s’est arrêté dans sa lecture et pas un mot de cette revendication que Mathieu Amalric voulait publique n’a été évoquée dans cette soirée !
Le texte intégral de Mathieu Amalric ...
Amalric censuré ?
de Thomas Messias
Pas content, Mathieu Amalric, malgré son deuxième César du meilleur acteur. Récompensé pour Le scaphandre et le papillon mais bloqué sur le tournage de Quantum of solace, il avait fait transmettre à l’académie des César un discours destiné à être lu par Antoine de Caunes au cas où il l’emporterait. Ce fut chose faite. Sauf que...
Dans un mail envoyé à la rédaction des Cahiers du cinéma, Amalric explique qu’il a tout bonnement été censuré, de Caunes n’ayant lu que la première partie de son message. On entend déjà l’académie invoquer un timing à respecter. Sauf que la partie non lue est la plus critique du texte...
Commentaire d’Amalric : « Je ne savais pas que c’était si simple que ça, la censure. »
Voici ci-dessous une retranscription du texte lu par de Caunes à l’antenne vendredi soir :
« (Antoine, tu le lis avec hésitation et bafouillements)
Oui bon ben... euh... alors là on frôle le n’importe quoi :
Lindon ; trois fois nommé, zéro compression
Darroussin ; deux fois... nada
Michel ; quatre fois comme acteur... résultat blanc
Et le pompon, Jean Pierre Marielle. Sept fois nommé !!! Et jamais la fève, même pas pour les Galettes.
Chapeau ! ... De Panama, d’où je vous fait un vrai faux-Bon...D.
L’autre vilain de Lonsdale aussi il paraît.
Enfin, mouais, mais... non ce qui fait plaisir, c’est que le Scaphandre, c’est bien la preuve qu’un acteur n’existe qu’à travers, qu’en regard de ses partenaires. Parce que qui voit-on à l’image, qui fait prendre vie au Jean-Do de fiction ?
C’est Chesnais, c’est Ecoffey, Arestrup, Watkins. Ce sont Marie-José, Olatz, Consigny penchées vers lui, vers moi, vers vous, tendres, drôles et attentives. C’est Marina en Vierge Marie, c’est Emmanuelle Seigner qui joue pas la Sainte et qui du coup donne corps, chair et souffrance à Bauby. Ta fille aussi, Emma qui carrément provoque le miracle. Et c’était Jean-Pierre Cassel, doublement.
Le Papillon c’est la preuve que, quand il y a un réalisateur, les techniciens sont des roseaux pensants. Que tout se mélange, que sur un plateau tout est dans tout, qu’on peut être, (ce joli mot), une équipe PAS technique... parce que franchement qui c’est l’Acteur quand c’est Berto, le caméraman qui fait, qui EST le regard. C’est LUI qui, par les mouvements de sa caméra crée les mouvements de la pensée de Jean-Do.
Oui, quand il y a un réalisateur... Julian.
Je pense fort à une autre équipe. Celle, médicale, de l’Hôpital Maritime de Berck-sur-Mer où on a tourné et où Bauby a passé un an et demi. Le vrai et le faux, la réalité et la fiction... on ne savait plus. D’ailleurs c’est drôle, je me souviens. Le décor de la chambre, pour avoir plus d’espace, était reconstituée dans une grande salle au rez de chaussée de l’Hôpital, la salle des fêtes. Avec au dessus de la porte, une enseigne en grosses lettres rouges : CINEMA.
Ça ne s’invente pas. »
Voici maintenant la partie non lue :
« Mais la salle de cinéma. Oui, la SALLE de cinéma, elle, doit pouvoir continuer à s’inventer.
"A lire à la lumière. Et à diriger sur notre nuit" Notre musique.
Insupportable "trompe l’œil" des multiplexes. Les chiffres comme seule ligne d’horizon. Aveuglement, brouillage, gavage, lavage. Et quelle solitude. Vous avez déjà parlé à quelqu’un dans un multiplexe ? Pas moi. D’ailleurs c’est impossible, ce qui compte c’est le flux. "Circulez s’il vous plaît, y’a rien à voir" . Au suivant ! bande de Brel.
Alors que le travail souterrain, patient, divers, dédié au public, aux écoles, aux rencontres que font et on envie de faire tellement d’exploitants de salle se voit de plus en plus nié aujourd’hui.
La Question humaine n’aurait par exemple jamais fait autant d’entrées sans le travail de curiosité des exploitants de province et de l’ACRIF.
Ce tissu de salles, que le monde entier nous envie, est notre cœur, nos poumons.
Sinon...
Sinon on va tous finir devant nos "home cinéma" à se tripoter la nouille...
Bons baisers de Panama...
Mathieu »
Messages
1. Texte de Mathieu Amalric censuré aux Césars, 24 février 2008, 15:33
il faudra le mettre sur bellaciao
1. Texte de Mathieu Amalric censuré aux Césars, 24 février 2008, 17:54, par laurent
la suite : http://www.cahiersducinema.com/article1507.html
2. Texte de Mathieu Amalric censuré aux Césars, 25 février 2008, 11:14
Pourquoi n’est il pas venu lui même faire son prêche.. Ah oui il tourne en ce moment pour une superproduction Americaine histoire d’alimenter son compte en banque...et ces maudits multiplexes.
Schizophrénie ou mauvaise foi ?
Merci camarade M.A
2. Texte de Mathieu Amalric censuré aux Césars, 24 février 2008, 16:10, par seve
Ce n’est hélas pas que son texte qui a été censuré ! J’apprécie Mathieu depuis de nombreuses années et j’ai été très déçu de n’entendre vendredi matin que France inter qui le sitait pour son césar !. pas une chaine de télé hertziene ne l’a applaudit, ni même mentionné. D’accord, Marion prenait toute la place. Alors, Mathieu, toutes mes félicitations, pour ce film et pour tout ton parcours. J’attends de lire ce discours dans son intégralité avec impatience.
3. Texte de Mathieu Amalric censuré aux Césars, 24 février 2008, 19:38, par Philippe Rupcic
Pôvre Mathieu,
Censuré en plein tournage d’un monopolistique "James Bond" qui occupera 1000 écrans ou plus lors de sa sortie en période de vacances afin que les enfants soient aussi intoxiqués par cette " daube" capitaliste et, souvent, anticommuniste, sans doute, un" ménage" pour payer des impôts trop importants pour tous ces acteurs "engagés" dans une lutte "implacable" contre le capitalisme. Je vais avoir beaucoup de mal à pleurer dans cette situation à moins qu’ils fournissent les mouchoirs. Comme je doute de leur générosité pourtant largement affiché sur tous les supports médiatiques, je m’abstiendrai de pleurer une fois de plus. Je crois que tous les commentateurs de cette censure, de ce crime de lèse-majesté contre la liberté de nos "artistes", n’ont pas vu la schizophrénie de ce positionnement. Des mots plein la gueule mais du fric plein les fouilles.
Philippe Rupcic
1. Texte de Mathieu Amalric censuré aux Césars, 24 février 2008, 20:22, par D@v !d B.
Mille excuses Brigh, c’est pas toi, mais "yvesdeeroff" qui m’a agacé comme ça.
D’autre part, pour ce qui est de la remarque (juste, au demeurant) sur "James Bond", en ce qui me concerne je connais plein de gens bien qui gagnent leur vie chez des enculés. Ça s’appelle le travail, l’exploitation de l’Homme par l’Homme, le Capitalisme, etc.
Bien à vous,
D@v !d B.
4. Texte de Mathieu Amalric censuré aux Césars, 24 février 2008, 20:16, par D@v !d B.
Excuse-moi, Brigh, mais je trouve ta réaction particulièrement conne.
Et ce mot, pour grossier qu’il soit, l’est moins que ta réaction.
Parce que c’est bien ça, l’enjeu : la RÉACTION.
Le problème, c’est l’uniformisation culturelle. Une seule forme (celle que tu trouves "pas chiante"), un seul distributeur (pourquoi pas Karmitz, ex-mao ? je suppose que tu sais que si Amalric crache dans la soupe, c’est probablement lié au procès qui oppose MK2 & UGC au cinéma municipal de Montreuil, le Méliès...).
Le public, dans ce cadre-là, plebiscite aussi Sarko, a déjà plebiscité pire dans l’histoire, et, rassure-toi, ce n’est qu’un début.
Même si le peuple, parfois, a ses éclairs de génie (et souviens toi bien de la différence entre le peuple, acteur de son destin, et le public, spectateur de ses instincts).
Reste que laisser à la notion de profit la question de savoir quels sont les films que l’on peut produire, quels sont ceux que l’on peut distribuer, sachant en outre que les aides publiques diminuent pour les autres, c’est grave ; sachant aussi que ceux qui passent ces caps le font grâce aux télévisions, promotrices de la "monoforme" en question, c’est pire.
D’ailleurs je t’invite à lire cet entretien avec Peter Watkins.
C’est très grave, puisque l’on ne se "fabrique" une personnalité que du fait de l’environnement (Ça vaut pour l’ "agri-" culture aussi bien). S’il devient impossible d’apporter de nouvelles formes à l’environnement culturel, il devient impossible de penser à l’Homme un autre avenir que celui vu par George Orwell il y a soixante ans.
Entre nous, personne n’ignore quels intérêts sert le populisme. La plupart des films que le public plébiscite sont étudiés pour plaire ! Des œuvres ? Non, des produits calibrés au goût du moment, lui-même préfabriqué.
En revanche, "La Graine et le Mulet", plebiscité par "la profession", que si peu de monde a vu... Ben c ’est excellent !
Et personnellement, je trouve moins dangereux (en ce moment, vu l’état des "luttes") un riche besancenotiste que dix millions de Pauvres Sarkozystes.
Le problème de la lutte des classes, c’est pas que les riches soient méchants, hein. C’est la plus-value.
T’es moins obligé d’aller voir les films d’Amalric que d’aller bosser. Et moi, qui n’ai pas de boulot, je vois beaucoup de films.
Au cinéma quand je peux, les rares fois où l’on ne (re-)passe pas des blockbusters monoformés, dans les festivals en particulier. Et, parfois, on peut avoir de vraies découvertes. Parce que nous, qui voulons changer le monde, on ne tombe pas amoureux de la 2798ème Barbie. Non, on tombe amoureux de la différence, de l’originalité, de la combativité.
Et c’est moins "chiant" !
Bien cordialement,
D@v !d B.