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Thibault chez les ‘Molex’ ...

Publie le vendredi 11 septembre 2009 par Open-Publishing
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de Jacky Sanudo

« Le secrétaire général de la CGT était hier sur le site de Molex, à Villemur-sur-Tarn. Il a fait de cette usine, dont la fermeture est prévue pour le 15 septembre, « un cas d’école »

Au sein même de la CGT, il s’en trouve pour railler Bernard Thibault, qui a fait de Molex un combat presque exclusif dans le domaine de l’industrie. Pour le secrétaire général, l’usine de Villemur-sur-Tarn, qui produit des boîtiers dans le secteur pointu de la connectique automobile, est un « cas d’école ». Il estime que le combat des salariés est exemplaire, car il correspond à la philosophie de la centrale : maintien de l’activité et préservation des emplois. Les batailles pour les meilleures indemnités de départ possible, accompagnées parfois de menaces ou de violences, ne sont pas au goût de la CGT loyaliste.

Depuis le 23 octobre dernier, date à laquelle la direction américaine a fait part de son souhait de fermer le site pour le délocaliser, il l’a dit et redit, « Molex est l’exemple type de la manière dont fonctionnent certaines multinationales avec pour seuls critères la rentabilité et davantage de profits à l’autre bout du monde ».

Hier, alors qu’une partie de sa base syndicale lui reproche de plus fréquenter l’Élysée et les bureaux ministériels que les piquets de grève, Bernard Thibault est revenu à Villemur, heureux de rappeler qu’il avait fait une première apparition tout juste huit jours après le début du conflit.

Plan d’action

Beaucoup de choses ont changé depuis cette première visite. Aujourd’hui, la direction a avancé unilatéralement la date de la fermeture du site au 15 septembre. Qui plus est, les ouvriers n’ont plus le droit de rentrer dans l’usine depuis le 7 août, alors que la reprise du travail avait été votée après un mois de grève. Des vigiles d’une société privée sont là pour veiller au grain. Ajoutons à cela que 97 des 283 salariés ont assigné leur patron aux prud’hommes pour non-paiement des salaires d’août. Les réunions de médiation quasi quotidiennes en préfecture sont depuis lors glaciales.

Bernard Thibault n’est pas arrivé les mains vides face aux ouvriers, qui savent de moins en moins de quoi leur avenir sera fait. Il a annoncé que les négociations ont repris entre Molex et le gouvernement pour accepter un repreneur. Avec les représentants de l’Union départementale 31, il a mis en place un plan d’action. Une réunion à Bercy qui comprendrait les représentants syndicaux, le repreneur potentiel et les clients actuels de l’usine, Renault et Peugeot, va être demandée. Une façon de repousser la date couperet du 15 septembre, inimaginable si une autre piste se dessine. Enfin, en attendant la décision des prud’hommes, il va être proposé à l’État qu’il prenne un relais temporaire de paiement des salaires. « Le problème politique du gouvernement, c’est qu’il va falloir qu’il montre une cohérence entre son discours et ses actes », assure Bernard Thibault. Le secrétaire général dit sa satisfaction d’avoir pu influer dans les plus hautes sphères concernant le sort des Molex. « Je me suis entretenu à plusieurs reprises avec le président de la République et lui ai signifié les dérives de ces dirigeants américains, qui bafouent le droit du travail français. Je lui ai également expliqué que l’activité industrielle se retrouvait à son niveau d’il y a douze ans. Nicolas Sarkozy a été obligé de reconnaître le bien-fondé de nos analyses. »

Bras de fer

Depuis, le président de la République demande régulièrement des nouvelles de l’usine de Villemur et, pas plus tard que la semaine dernière, il déclarait : « Ce qui se passe chez Molex ne me va pas. » Son ministre de l’Industrie, Christian Estrosi, lui a emboîté le pas en menaçant de boycotter les produits Molex, si ceux-ci sont délocalisés en Chine et aux États-Unis. La direction n’a pas apprécié et a claqué les portes de la négociation en cours. Le bras de fer continue. Ici et ailleurs.

C’est ce qu’a tenu à dire Bernard Thibault, en soirée, aux syndicalistes venus de toute la France devant la barrière baissée. Il a appelé la population et les élus à la vigilance pour que les usines ne soient pas dépossédées de leur savoir-faire. Une manifestation nationale pour défendre l’activité industrielle est prévue le 22 octobre à Paris. Pour l’heure, les employés de Molex ont décidé de ne pas lever le camp. S’ils doivent « mourir », ce sera avec leur outil de travail, dont l’histoire remonte à 70 ans.

Le curé, premier défenseur des Molex

Toute la journée d’hier, les Molex sont restés plantés devant leur usine. La plupart ont revêtu le T-shirt couleur bleu de travail avec dans le dos une carte de France des usines en perdition, façon Gaule d’Astérix. Car ici on résiste depuis onze mois. L’arrivée de l’abbé Bashet, bras dessus bras dessous avec le maire de Villemur-sur-Tarn, n’est pas passée inaperçue. « C’est notre Don Camillo », s’amusent les employés à l’heure du casse-croûte.

Monsieur le Curé est avec eux. Juste après le 15 août, il a mis sur pied un comité de soutien aux salariés. « Jusqu’à présent, ils n’avaient pas besoin de nous. Le CE faisait affaire. Mais avec la coupure des vacances, on a senti une certaine démobilisation et il nous fallait réagir. »

Les objectifs avoués sont la remobilisation de la population autour de son usine, un appel à la solidarité financière pour les salaires non versés et, après la fermeture, l’accompagnement moral des ouvriers qui vont se retrouver seuls.

« Depuis le début, je suis auprès de ces gens qui, pendant près d’un an, ont défendu leur outil de travail. Je suis là pour la défense de la dignité de l’homme. On ne peut pas accepter ce capitalisme outrancier qui bafoue le droit. Ici, on est constamment dans le mensonge. Vous croyez avoir gagné quelque chose un jour, le lendemain on vous l’enlève. C’est inadmissible », affirme l’abbé Bashet.

Lorsqu’on le surnomme « le curé rouge », il sourit. Son engagement est sans faille. Le 4 septembre, il a envoyé une lettre ouverte au président de la République. On peut y lire : « Faire appliquer à l’encontre de la direction de Molex les décisions de la justice de notre République, notamment celle de laisser les salariés rentrer sur leur site de production, il en va de la crédibilité et du respect de notre nation. » Bernard Thibault n’aurait pas mieux dit. (sud-ouest-10.09) »

http://www.sudouest.com/accueil/actualite/france/article/701639/mil/5083925.html#xtor=RSS-3

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