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Tony Blair justifie l’invasion de l’Irak par le 11-Septembre
Publie le vendredi 29 janvier 2010 par Open-PublishingPar Michael Holden et Keith Weir
LONDRES (Reuters) - Tony Blair s’est montré offensif durant son audition sur l’invasion de l’Irak, vendredi, expliquant qu’on ne pouvait plus seulement contenir Saddam Hussein après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.
Devant la commission d’enquête sur les conditions de l’engagement militaire britannique en mars 2003, l’ex-Premier ministre britannique a défendu la décision la plus controversée de ses dix années de mandat, de mai 1997 à juin 2007.
Le déploiement de 45.000 soldats aux côtés des forces américaines afin de renverser le régime de Saddam Hussein avait provoqué de grandes manifestations, des dissensions au sein de son parti et a valu à Tony Blair d’être accusé d’avoir trompé l’opinion publique sur les raisons de cet engagement militaire.
Prié de s’expliquer, Tony Blair a fait valoir que l’échec des tentatives de maîtriser le programme d’armes de destruction massive irakien n’avait laissé d’autre choix que l’invasion.
"Il ne s’agit pas de mensonge, ou de complot, de supercherie ou de tromperie, c’est une décision", s’est-il défendu avec ardeur, après avoir laissé transparaître un peu de nervosité au début de l’audition.
"Et compte tenu du passé de Saddam, de son utilisation des armes chimiques, du million de personnes et plus dont il a causé la mort, des dix ans passés à enfreindre les résolutions de l’Onu, la décision que j’avais à prendre revenait à se demander : pouvions-nous prendre le risque de laisser cet homme reconstituer son programme d’armement ?"
"Je crois (...) que nous avons eu raison de ne pas courir ce risque", a-t-il ajouté, affirmant qu’il était alors convaincu de l’existence d’armes de destruction massive en Irak, quand bien même elles n’ont jamais été retrouvées.
"CRIMINEL DE GUERRE"
La guerre en Irak a grandement érodé la popularité de Tony Blair et de son parti. Sept ans après l’invasion et près de trois ans après la passation de témoin avec l’actuel Premier ministre Gordon Brown, la colère n’est pas retombée.
Les familles de certains des 179 soldats britanniques morts en Irak et une centaine de militants pacifistes l’attendaient vendredi matin, scandant "Tony Blair, criminel de guerre" et réclamant des poursuites à son encontre.
Mais il est arrivé tôt et a pénétré par une porte dérobée dans ce bâtiment proche de Westminster et placé sous haute surveillance policière.
L’audition de Tony Blair était très attendue parce qu’elle met en jeu tant sa propre réputation que celle du Parti travailliste, largement distancé par l’opposition en vue des élections législatives qui doivent avoir lieu d’ici juin.
Pour les observateurs, l’enquête pourrait nuire au Labour dans la perspective de ce scrutin et ce, d’autant que Gordon Brown, alors chancelier de l’Echiquier, doit aussi être entendu.
Soumis aux questions de la commission mise sur pied par son successeur, Tony Blair n’a montré aucun remords pour son soutien sans faille au président américain George W. Bush en 2003.
"LE CALCUL DU RISQUE A CHANGÉ"
Vêtu d’un costume bleu rehaussé d’une cravate rouge, il a expliqué avec aplomb comment les attentats du 11-septembre menés par Al Qaïda aux Etats-Unis avaient modifié la donne.
"Jusqu’au 11-Septembre, nous pensions que (Saddam) constituait un risque mais nous pensions que cela valait la peine de tenter de le contenir. L’élément crucial après le 11-Septembre, c’est que le calcul du risque a changé", a-t-il dit.
"Le fait est qu’à propos de cet acte à New York, ils auraient tué bien plus que 3.000 personnes s’ils l’avaient pu. Aussi, après cela, mon avis était qu’on ne pouvait plus prendre aucun risque", a-t-il ajouté.
Tony Blair s’est en outre dit préoccupé par la persistance de ces risques, citant à plusieurs reprises les craintes suscitées par le programme nucléaire iranien.
Il a encore été interrogé sur la date à laquelle il aurait promis le soutien britannique à une action militaire contre l’Irak - dès 2002 selon ses détracteurs - et sur les éléments de justification de la guerre invoqués par la suite sans qu’ils n’aient jamais été établis.
"Le seul engagement que j’ai pris, et je l’ai pris publiquement, a été celui de nous occuper de Saddam", a-t-il fait valoir.
"Le fait est qu’il s’agissait d’un régime écoeurant et que nous ne pouvions courir le risque de laisser un tel régime développer des armes de destruction massive", a-t-il insisté.
"Si cela signifiait un changement de régime, qu’il en soit ainsi. Comme nous avons essayé la voie de l’Onu et qu’elle a échoué, mon avis a été qu’il fallait nous en occuper."
Avec Kylie MacLellan, version française Jean-Stéphane Brosse et Grégory Blachier