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Vive le libéralisme : réforme de l’urbanisme commercial ?

Publie le mardi 26 février 2008 par Open-Publishing
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http://jurisconsult.canalblog.com/archives/2008/02/26/8107886.html

Luc Chatel, secrétaire d’Etat à la Consommation, a annoncé lundi au 13 heures de France 2 qu’une réforme de l’urbanisme commercial va être engagée dans les prochains mois afin, notamment, "d’augmenter la concurrence dans les zones de chalandise"

En période électorale, ce genre d’annonces est très mal vécu par les municipalités, qu’elles soient de droite ou de gauche : à l’heure où les élus locaux se mobilisent pour créer un dynamisme et une densification urbaine autour des "coeurs de villes", la priorité est plutôt de favoriser la lutte contre la monoactivité et la désertification commerciale. Il y a trois semaines, la ville de Charleville-Mézières faisait, par exemple, le pari de l’appui au commerce de proximité, y compris dans les quartiers "politique de la Ville".

Les élus locaux, dont la Ville de Paris, on attendu des dizaines de mois la publication des décrets d’application de l’article 8 de la loi Dutreil mettant en oeuvre un droit de préemption au profit des communes sur les cessions de baux commerciaux, dans un objectif de "sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité" (art. 214-1 du code de l’urbanisme).

La reforme, annoncée en urgence par le libéral Luc Chatel ne risque-t-elle pas de réduire tous ces effets à néant ? Et pour quel impact sur la baisse des prix ? Quasiment aucun, puisque toutes les études montrent qu’à qualité égale, les différences tarifaires entre commerces de villes et hypermarchés étaient minimes, et que la concurrence entre les hypermarchés n’était pas efficiente, les "concurrents" s’entendant plus ou moins entre eux pour pratiquer les mêmes prix.

Dailleurs, dans les mesures annoncées hier par le Premier ministre, à l’issue d’une réunion sur la lutte contre les "abus" et les "comportements inacceptables" des industriels et des distributeurs, il n’a pas été fait mention de ce sujet qui pourrait malmener la majorité gouvernementale encore un peu plus.

Face aux silence de Matignon, il est permis de s’interroger sur l’information et sur l’après-élections : que comprendra la "grande réforme de la règlementation afin de permettre la négociabilité des tarifs et une compétition accrue entre les distributeurs" promise hier de manière vague ?

Certes, le système de gestion de l’urbanisme commercial est tiraillé, par son instrumentalisation politique (depuis la loi Royer de 1973 jusqu’à la loi Raffarin de 1996), entre libéralisme et protectionnisme, le législateur n’ayant fait baisser la superficie (de 3.000 m2 à 300 m2) à partir de laquelle les projets doivent obtenir une autorisation que pour écarter les "hard discounters".

Mais il est inexact de dire que la loi empêcherait le développement de l’urbanisme commercial : un million de mètres carrés autorisés en 1997, 3,5 millions en 2005. Les commissions départementales d’équipement commercial (CDEC), sont d’ailleurs traitées de "passoires" puisque 80% des demandes sont satisfaites.

Alors quel sens que cette annonce, que ce cadeau fait aux grandes surfaces, sinon une sorte de "donnant-donnant", pacte plus ou moins occulte entre le ministre et les distributeurs : vous baissez les prix, et nous vous laissons bétonner partout...

Messages

  • Merci Martine pour cet article.

    C’est en effet très probable car Luc Chatel l’a annoncé lundi soir.

    Cela va dans le sens des préconisations du rapport Attali, note bien, et dans le sens des diverses modifications subies par la loi Royer puis Raffarin.

    Sur le droit de préemption des fonds de commerce, je me permets juste d’ajouter que de toute manière, en l’état il est quasiment inapplicable. Pour des tas de raison.

    Deux bons articles sur la question :

    Droit de préemption des fonds de commerce, ici

    Je partage en tout cas, pour avoir bien étudié le mécanisme, les difficultés qu’ils évoquent. Je crois que tout ou presque est fait pour retirer aux collectivités locales leurs moyens d’action publique spécifique, il faut voir aussi la réforme des fameux PPP.

    Sans parler de l’essor des "pôles de compétitivité" depuis 6 ans.

    Bref, toutes les digues sont en train de céder. Ceux qui vont vouloir résister vont être ringardisés - on a fait entrer la mentalité de la société de consommation dans la gestion publique - c’est à dire on offre beaucoup en prenant bien soin de cacher les coûts réels véritables à moyen et long terme ; il n’y a qu’à voir comment on traite les mairies vraiment de gauche qui refusent de plier devant la libéralisation européenne et continuent, bon gré mal gré , à faire leur petit bout de chemin avec des moyens de droit public "classique"....

    Ca nous apprendra à fricoter avec les soc’ et leur notion de dette publique.

    La Louve