Accueil > la presse suisse (24H) juge jacques chirac ... et le film de karl zéro
la presse suisse (24H) juge jacques chirac ... et le film de karl zéro
Publie le jeudi 1er juin 2006 par Open-PublishingDans la peau de Jacques Chirac condense quarante ans de comédie politique. Drôle. Mais peu instructif.
Jacques Chirac doit commencer à la trouver saumâtre. Déjà dépeint comme un personnage cynique dans le livre La tragédie du président, il se retrouve tête d’affiche d’un film au vitriol de Karl Zéro. / AFP
Dure fin de règne pour Jacques Chirac. Les Français s’arrachent La tragédie du président (Flammarion), le livre de Franz-Olivier Giesbert, dans lequel le directeur de la rédaction du Point dresse un portrait sombrissime du président : personnage cynique qui ne s’intéresse plus qu’aux intrigues de palais. 350 000 exemplaires vendus en quelques mois, un record pour un ouvrage politique. Depuis hier, ils peuvent aller voir dans les salles de cinéma Chirac, le vrai, tel que quarante ans d’archives de télévision le révèlent : bavard, menteur. Et si naturel.
Chirac le politique est né avec la télévision. Dès le début, il s’en sert avec gourmandise. Sur des images datant de 1967, on voit le jeune et pimpant secrétaire d’Etat chargé de l’emploi de Pompidou promettre de résoudre le problème du chômage - 50 000 sans-emploi à l’époque. On connaît la suite.
« Un côté Pierre Richard »
Michel Royer, qui connaît les archives télévisées comme sa poche, a l’idée de faire un montage de ces documents innombrables. « Chirac se prête mieux que tout autre politicien à ce type d’exercice, confie-t-il. Contrairement à Mitterrand, qui se méfiait des caméras, lui, du moins à ses débuts, les adore. Et c’est un comédien hors pair. Il a un côté Pierre Richard, il est maladroit, il trébuche sur les estrades. » Les images parlent souvent d’elles-mêmes. Chirac, réputé si curieux de la France profonde, répétant vingt fois le même bon mot à des paysans. Chirac disant tout et son contraire sur l’Europe, sur le racisme. Chirac renouvelant pendant quarante ans les mêmes promesses, jamais réalisées.
Le fil conducteur ? Une idée de Karl Zéro, co-réalisateur du film avec Michel Royer : les confessions imaginaires du président, lues par l’imitateur Didier Gustin. Un texte souvent très drôle qui donne au film une touche « Guignols de l’Info ». « Le film est léger, même si le contenu est sérieux », note Michel Royer.
Les auteurs de D ans la peau de Jacques Chirac ont eu du mal à trouver producteurs et diffuseurs. « Certains se sont défilés en nous disant : si on s’en mêle, le fisc va nous tomber dessus. » Canal + s’engage, puis se rétracte. « Karl Zéro a cassé sa tirelire et nous avons fini par dénicher un producteur. (Bonne Pioche) », confie Michel Royer.
« Séducteur, menteur, mais sympa »
Le sujet serait-il si sensible ? Son traitement à ce point impertinent ? 40 ans de Chirac mis bout à bout ne soulignent pas la cohérence du parcours, c’est un euphémisme. Mais qui croit encore Chirac sur paroles ? Ses contradictions, ses virages à 180 degrés font partie de sa légende. Cela ne l’a pas empêché d’être élu et réélu à l’Elysée. Le film, d’une certaine façon, participe au mythe. On rit beaucoup, on s’indigne rarement. Le sujet, pourtant, est si sérieux. « C’est vrai que les images nous l’ont rendu plutôt sympathique, note Michel Royer. Séducteur, menteur, responsable de l’état actuel de la France, mais sympa. Et ce film est un portrait, pas un pamphlet politique. »