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le droit opposable en pratique

Publie le jeudi 11 janvier 2007 par Open-Publishing
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Le droit opposable en pratique.

C’est une erreur que de croire que le fait d’inscrire un droit dans la constitution constitue une garantie pour qu’il soit applicable à chacun. C’est ce que voudraient nous faire croire tous les politiciens qui, surtout, ne veulent pas être confrontés à cette situation qui résulte de leur laissez faire durant les trente dernières années.

Pour m’en être réclamé devant les tribunaux administratifs, je pense être assez bien placé pour évoquer cette question du droit opposable.

J’ai cru que chacun d’entre nous pouvait se prévaloir des droits inscrits dans la constitution. C’est sur cette base que j’ai demandé à la justice administrative de condamner l’état pour ne pas m’avoir permis de bénéficier du « droit d’obtenir un emploi ».

Avant de me lancer dans cette aventure judiciaire, j’avais potassé un minimum le sujet. J’avais trouvé des arguments qui semblaient me donner raison. En particulier un arrêt du 23 juin 1959 dans lequel le Conseil d’Etat affirme que Les principes généraux du droit, résultant notamment du Préambule de la Constitution, s’imposent à toute autorité réglementaire, même en l’absence de dispositions législatives.

Je m’étais étonné que personne avant moi n’ait pris l’initiative de se prévaloir de ce principe pour essayer de résorber ce problème du chomage. J’ai pris contact avec des syndicats, des associations, des partis politiques pour leur parler de mon intention de demander à la justice l’application de ce droit constitutionnel et mettre ainsi fin à mon statut de chomeur. Lorsque l’on m’a répondu, c’était pour me faire savoir qu’ils utilisaient d’autres moyens pour combattre le chomage.

C’est donc seul que j’ai accompli ce parcours du combattant devant la justice administrative. Cela a abouti à l’Arrêt de la Cour d’Appel de Nantes qui me déboutait de mes demandes au motif que le principe posé par les dispositions du cinquième alinéa du préambule de la Constitution du 27octobre 1946, auquel se réfère la Constitution du 4 octobre 1958, aux termes duquel « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi… », ne s’impose au pouvoir réglementaire en l’absence de précision suffisante, que dans les conditions et les limites définies par les dispositions contenues dans les lois ou dans les conventions internationales incorporées au droit français.

C’était en contradiction avec la jurisprudence antérieure et à tous les principes soutenus par les spécialistes du Droit Adminstratif.

Dans les principes généraux du droit administratif Georges VLACHOS affirme que La valeur constitutionnelle du Préambule a été affirmée par la décision du 16 juillet 1971 du Conseil Constitutionnel (A.J. 1971.537,n. Rivero). Il a considéré que le Préambule de la Constitution de 1958 en fait partie intégrante et possède donc la même force juridique que le texte constitutionnel. Ainsi, le contrôle de la constitutionnalité s’étend aux dispositions que la Déclaration des droits et le préambule de 1946 consacrent...

Il poursuit Lorsque le Préambule énonce une disposition suffisamment précise pour avoir immédiatement valeur de droit positif, le juge administratif en assure le respect au même titre que les dispositions du texte de la Constitution
Charles DEBBASCH, dans son traité de Droit administratif affirme que le préambule établit les principes fondateurs du contrat social. Et à ce titre, à l’évidence ses dispositions sont source de droit positif...le Conseil constitutionnel a consacré expressément la valeur positive et constitutionnelle du préambule. Celui ci a une valeur juridique obligatoire. Il s’impose aux autorités administratives dans toutes les dispositions.

Monsieur René CHAPUS va dans le même sens. Dans son livre intitulé Droit administratif général, il soutient que les dispositions du préambule régissent l’administration et s’imposent aux juges, réserve faite de l’hypothèse de l’écran législatif...Contrairement à une erreur souvent commise et procédant d’une prudence excessive, les décisions précitées signifient que le préambule a force de loi constitutionnelle dans la totalité de ses dispositions...

Insatisfait par la décision de la Cour d’Appel de Nantes, j’ai donc saisi le Conseil d’Etat où le dossier serait à l’instruction.

Pour ceux qui voudraient en connaître davantage, je me permets de donner le numéro d’arrêt de la Cour administrative d’Appel de Nantes du 30 juin 2006 qui est 06NT00655. Et mon pourvoi au Conseil d’Etat est référencé sous le numéro 298072.

J’avais pensé que ce sujet pouvait intéresser tous ceux qui étaient concernés par le chomage. J’ai donc pris contact auprès de la majorité des médias. Mais à part un entrefilet dans le nouvel obs, personne n’a donné suite. J’ai essayé de comprendre les raisons d’un tel silence. J’ai cru comprendre que ce n’était pas tant les conséquences sociales ou économiques pour le pays qui inquiétaient ces gens mais plutot les conséquences pratiques que cela pourrait amener dans leur propre fonctionnement.

Tout le monde s’est habitué à cette situation et beaucoup en profitent pour leur usage personnel. Nous ne sommes plus au temps où il n’y avait que les patrons et la grande bourgeoisie qui pouvaient « exploiter » les pauvres gens. Avec les aides fiscales, le moindre fonctionnaire peut s’offrir les services d’une femme de ménage, d’une nounou ou d’un jardinier quelques heures par semaine…Lorsqu’un système profite à une majorité de gens, il est bien difficile de le changer.

J’ai bien peur qu’il en soit de même pour ce droit au logement qui ne risque que d’être un droit virtuel.

Messages

  • tu as tout à fait raison. Le droit opposable ne permet au mieux qu’une "réparation financière", qui peut prendre la forme, quand au droit au travail, de l’assurance chômage. Autant dire, bientôt plus grand chose.

    Sur ce qui est du droit au logement "opposable", lire une critique fort documentée de Michel Rolin

    http://frederic-rolin.blogspirit.com/

    en conclusion :

    RESISTANCES et SOLIDARITE

    Patrice Bardet