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Civilisation : le discours de Sarkozy à Ryad en 2008

par Jean-Jacques Chavigné/gérard Filoche

Publie le mardi 14 février 2012 par Jean-Jacques Chavigné/gérard Filoche - Open-Publishing

Le 14 janvier 2008, Sarkozy prononçait un discours devant les 150 membres du Conseil consultatif du royaume saoudien. Ce discours avait un point commun avec la récente déclaration de Guéant sur la « civilisation » : la confusion entre « civilisation » et « régime politique » mais utilisée à des fins diamétralement opposées.

Pour Guéant, il s’agit, au nom de la « civilisation », de dresser les « civilisations » les unes contre les autres à des fins électoralistes, en estimant que le régime des Talibans ou le régime syrien sont des « civilisations » et que, notre « civilisation » (en réalité notre régime politique) est supérieure à celle des Talibans. Pour Sarkozy, il s’agissait, au contraire, au nom de la « civilisation », d’absoudre le régime infâme de l’Arabie Saoudite.

Après avoir assuré sans rire que Dieu était « le rempart contre l’orgueil démesuré et la folie des hommes », Nicolas Sarkozy affirmait, le 14 janvier 2008, devant les 150 hommes qui lui faisaient face : « La politique de civilisation, c’est ce que font tous ceux qui s’efforcent de concilier le progrès et la tradition, de faire la synthèse entre l’identité profonde de l’Islam et la modernité sans choquer la conscience des croyants. C’est ce que fait l’Arabie Saoudite sous l’impulsion de Sa Majesté le Roi Abdallah ».

Ce discours, Nicolas Sarkozy le prononçait bien à Ryad, capitale du régime wahhabite, fondé sur la doctrine obscurantiste du « retour à l’islam des origines ». Un régime où n’existe ni parti politique, ni élection, ni Parlement autonome, ni magistrature indépendante, ni syndicat, ni organisation de défense des droits de l’être humain…

Un régime où les femmes n’ont aucun droit et où la victime d’un viol collectif est condamnée à 200 coups de fouet par le Conseil suprême de la justice saoudienne. Un régime où le régime camouflé derrière une soi-disant « loi islamique » prescrit la peine de mort pour l’homicide, le viol, le vol à main armée, le trafic de drogue, la sorcellerie, l’adultère, la sodomie, l’homosexualité, le vol sur autoroute, le sabotage et l’apostasie (le renoncement à l’Islam).

Un régime où la décapitation au sabre des condamnés est publique dans les cours ou aux abords des mosquées les plus fréquentées, après la prière du vendredi.

Un régime où des êtres humains sont condamnés à l’amputation d’un membre ou à l’énucléation.

Un régime où les tribunaux continuent de prononcer régulièrement des peines de flagellations. En 2007, un jeune homme de 16 ans a ainsi été condamné à une peine de 14 ans de prison et de 4 000 coups de fouet (à raison de 50 par séance) parce qu’il aurait « tenu des propos contraires à la charia », au droit musulman.

Un régime où les travailleurs immigrés peuvent être détenus pendant des années sans jugement ni inculpation et ou ils sont beaucoup plus fréquemment que les Saoudiens condamnés à la décapitation, à l’amputation ou à la flagellation.

Un régime digne de l’ancien régime en France où la monarchie absolue pratiquait l’emprisonnement sans jugement, l’esclavage dans les comptoirs coloniaux, la question ordinaire et extraordinaire, le supplice de la roue, l’extermination des Huguenots, le bûcher pour les « sorcières »… Un moment de cette « civilisation occidentale » si chère à Claude Guéant.

Mais à ce régime saoudien, Nicolas Sarkozy ne trouvait rien à redire en janvier 2008, il estimait au contraire que le régime scélérat du Roi Abdallah menait une politique de « civilisation ».