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(DIS)CREDITS DE LA RECHERCHE ?

Publie le vendredi 20 mai 2005 par Open-Publishing

Nous devrions parait-il être satisfaitEs car le gouvernement débloque des
fonds pour la recherche. Mais à quoi va servir cet argent ? Car tout ce
qui s’est passé ces dernières années le montre clairement : le
gouvernement a agi avec la recherche et l’enseignement supérieur comme
avec d’autres services publics avant eux. Après avoir fortement réduit
les financements, il a décrété que le système était devenu obsolète et
qu’il fallait de toute urgence le réformer pour plus de compétitivité et
de productivité.

Des technologies au service de quoi ?

Le Progrès aujourd’hui, nous dit-on, ce sont les bio et autres
nanotechnologies, qui sauveront les vieux de la sénilité et les miséreux
de la famine. Pourtant, combien d’innovations techniques sont inutiles
voire nuisibles, et combien permettent véritablement notre émancipation et
notre autonomie ? Les dispositifs récemment mis en place par décrets
(Agence Nationale de la Recherche, Pôles de Compétitivité...) vont
renforcer encore le développement incontrôlé de technologies dont la seule
justification est la rentabilité à court terme des grands groupes
financiers (voir les thématiques fléchées sur le site internet de l’ANR
par exemple), au détriment de toute alternative et de toute réflexion
commune. Pourtant les tragédies engendrées par l’amiante ou l’utilisation
des farines animales devraient nous rendre méfiants...

Il nous semble donc que la première question qui devrait être posée avant
toute « réforme » de la recherche c’est :
« Des crédits pour quoi faire ? »

Explosion de la précarité des personnels

Malgré les postes qui ont été obtenus par la lutte, les réformes de
structure mises en place par le gouvernement vont dans le sens de la
généralisation de la précarité à moyen terme. L’ANR - dont le budget doit
croître énormément ces prochaines années - et les "pôles d’excellence" ne
sont rien d’autre que des machines à CDD : c’est le seul type de contrat
de travail qu’elles financeront. Or la situation est déjà catastrophique.
Par exemple, parmi les docteurs qui ont fait un post-doctorat en Amérique
du Nord (ce qui nous est présenté comme la panacée pour trouver un poste
par la suite), seul 35% des docteurs trouvent un emploi 3 ans après la
thèse, et 36% des docteurs ne trouvent toujours pas d’emploi stable dans
les 6 ans qui suivent leur thèse ! Ces constatations font apparaître le
post-doctorat comme un substitut à l’emploi stable introuvable.
Parallèlement, le nombre des personnels non-titulaires à l’Université
s’est envolé : vacataires et ATER assurent désormais une partie importante
des enseignements, tandis que l’externalisation des catégories C
s’amplifie au profit de la sous-traitance.

Or la précarité est un très bon outil pour éviter le développement de
critiques au sein même du milieu de la recherche : plus on se pose de
questions sur ses fins de mois, moins on s’en pose sur la finalité de son
travail...

Renforcement des inégalités du système éducatif

Le système éducatif est déjà largement inégalitaire : l’Etat dépense deux
fois moins pour un étudiant à l’Université que pour un étudiant en classe
préparatoire aux grandes écoles. Ces classes préparatoires sont d’ailleurs
réservées à l’élite (elles contiennent 48,5% d’enfants de cadres alors
qu’ils ne représentent que 15,8% des jeunes de la même classe d’âge). La
réforme LMD/ECTS (censée favoriser la mobilité des étudiants dans
l’ensemble de l’Union européenne) n’autorisera que la mobilité de ceux qui
en ont les moyens car aucune aide financière généralisée n’est prévue.
L’instauration de « pôles d’excellence » financés par l’ANR va amplifier
ces inégalités en concentrant les financements des universités et des
industries dans les régions riches au détriment des autres. Quant à
l’offre de formation, elle va se rétrécir. En effet, les disciplines
jugées non-rentables sont progressivement écartées les unes après les
autres - exemple de l’anthropologie à Paris 8 - tandis que se multiplient
les cursus abusivement qualifiés de "professionnalisant". Ils sont en fait
conçus directement par et pour les besoins à court terme des employeurs
locaux : tout le contraire d’une ouverture à l’international. Les
formations généralistes sont plus que jamais réservées à l’élite, alors
que la majorité des étudiants doivent se contenter de formations vite
dévaluées, donc d’emplois menacés par la précarité.

L’Université aurait-elle définitivement jeté aux orties sa mission
d’élaboration et de partage des savoirs critiques ?

Cette "modernisation"-là, nous n’en voulons pas !

A quoi bon vouloir négocier une "bonne loi" pour la recherche alors que le
gouvernement n’a pas attendu la fin des Etats Généraux pour mettre sa
réforme en place ? Il est urgent d’informer correctement les personnels et
les étudiantEs, et de construire un véritable rapport de force sans éluder
les vraies questions : quelle recherche, quel enseignement, pour quelle
société ?

Assemblée générale 20 mai 2005 à 17h30 Paris 3 Censier, Amphi A 13 rue Santeuil, M° Censier-Daubenton

Soutien aux lycéenNEs inculpéEs : débat à 17h puis concert à 19h, le 22 mai à Alternation, 19-21 rue Bourdan, M° Nation ou Reuilly-Diderot contact :

comite.soutien@laposte.net

Collectif des Jeunes Chercheurs Contre la Précarité JCCP :

jccp_paris@yahoo.fr