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États-Unis : condamné à la peine capitale, il échappe de justesse à son exécution

Publie le mercredi 23 août 2017 par Open-Publishing

Condamné à mort pour meurtre, Marcellus Williams a bénéficié d’un sursis après que le gouverneur du Missouri a institué une commission d’enquête, estimant que les preuves n’étaient pas suffisantes pour appliquer le jugement initial.

C’est un rebondissement judiciaire assez rare pour être signalé. Le gouverneur de l’État américain du Missouri a institué mardi une commission d’enquête chargée d’examiner le cas de Marcellus Williams, prisonnier noir condamné à mort et dont l’exécution par injection létale était prévue seulement quelques heures plus tard.

Il s’agit d’un sursis inespéré pour l’homme de 48 ans, reconnu coupable d’avoir poignardé Felicia Gayle, une femme blanche et ancienne reporter, en août 1998. Il faut dire que Marcellus Williams clame depuis bientôt deux décennies son innocence et ses avocats, criant à l’erreur judiciaire, avaient lancé ces derniers jours des recours de la dernière chance, y compris devant la Cour suprême à Washington.

"La peine capitale est le châtiment ultime et permanent. Pour procéder à une mise à mort, la population du Missouri doit avoir pleine confiance dans le jugement de culpabilité", a déclaré dans un communiqué Eric Greitens, gouverneur du Missouri. Ce dernier doit préciser prochainement qui siégera dans la commission d’enquête. Laquelle sera composée de cinq membres, dont des anciens magistrats.

Des objets personnels de la victime retrouvés dans la voiture du condamné

Ce sursis est en revanche un revers pour les procureurs du Missouri. Ces derniers estimaient que Marcellus Williams était entré par effraction au domicile de Felicia Gayle dans l’intention d’y perpétrer un cambriolage. Il aurait alors surpris la femme de 42 ans sortant de la douche avant de lui porter 43 coups de couteau.

Une version des faits un temps consolidée par des éléments troublants. La police avait en effet affirmé avoir retrouvé dans le coffre d’une voiture du suspect des effets personnels de la victime, dont une calculatrice et une règle qu’elle utilisait lorsqu’elle travaillait au journal Saint-Louis Post-Dispatch.

Deux témoignages accusateurs

Par ailleurs, Marcellus Williams avait été condamné à son procès sur la base de deux témoignages l’accusant directement de meurtre. L’un émanant d’un détenu ayant partagé sa cellule, l’autre de l’une de ses ex-compagnes, Laura Asaro.

Pour les soutiens et défenseurs du condamné, les deux témoignages recueillis auprès de personnes au passé trouble n’avaient aucune valeur, d’autant que les deux intéressés avaient été rétribués financièrement par le bureau du procureur.

Une analyse ADN qui relance l’affaire

Mais le rebondissement survenu mardi a surtout été déclenché par une récente analyse ADN réalisée sur l’arme du crime, qui a permis de développer un profil masculin ne correspondant pas à celui de Marcellus Williams. "Pas une seule preuve matérielle n’a été présentée (au procès) et aujourd’hui il existe une preuve matérielle qui l’innocente complètement", a déclaré Kent Gipson, l’avocat du condamné.

"L’ADN est irréfutable, il ne peut pas se tromper, tandis qu’un témoin oculaire peut se fourvoyer, un indic en prison peut mentir, ce que nous affirmons en l’espèce. Quant aux éléments de preuve indirects, ils peuvent s’expliquer de façon simple", a poursuivi l’avocat.

De son côté, l’État du Missouri avait très vite balayé cette nouvelle analyse ADN, préférant accorder davantage de crédit aux témoignages. Une posture jugée "surréaliste" par Kent Gipson.

Quant aux objets retrouvés "un an après" par la police, l’avocat en avait atténué la portée : Marcellus Williams côtoyait des marginaux et des petits délinquants chez qui l’échange du fruit de cambriolages est courant, a-t-il expliqué. La voiture dans le coffre duquel ont été retrouvés des effets de Felicia Gayle n’était selon lui qu’une épave, au coffre forcé, où d’ailleurs Laura Asaro avait l’habitude de dormir.

Les associations de défense des Noirs américains montent au créneau

Cette affaire a déclenché la colère des associations de défense des Noirs américains avec, en première ligne, la NAACP qui déplore que ce procès regroupe "tous" les travers souvent constatés dans les condamnations pénales des Noirs : "l’injustice raciale, les disparités dans la défense et la sentence, les fautes des procureurs".

L’accusé avait été condamné par un jury composé de 11 Blancs et un Noir, après que six jurés noirs ont été écartés lors d’un processus de récusation controversé. Constatant le "manque de preuves solides" contre Williams, Amnesty International avait exhorté le Missouri à ne pas l’exécuter.

http://www.bfmtv.com/international/etats-unis-condamne-a-la-peine-capitale-il-echappe-de-justesse-a-son-execution-1240723.html

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