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Viande et virus : accuser les pays sous-développés et la Chine ?

par Christian DELARUE

Publie le vendredi 20 mars 2020 par Christian DELARUE - Open-Publishing

Viande et virus : accuser les pays sous-développés et la Chine ?

Remarques sur : « Tip of the iceberg’ : is our destruction of nature responsible for Covid-19 ? » | Environment | The Guardian

https://www.theguardian.com/environment/2020/mar/18/tip-of-the-iceberg-is-our-destruction-of-nature-responsible-for-covid-19-aoe

« Research suggests that outbreaks of animal-borne and other infectious diseases such as Ebola, Sars, bird flu and now Covid-19, caused by a novel coronavirus, are on the rise. Pathogens are crossing from animals to humans, and many are able to spread quickly to new places. The US Centers for Disease Control and Prevention (CDC) estimates that three-quarters of new or emerging diseases that infect humans originate in animals. »

Renvois à " Zoonotic Diseases | One Health | CDC : https://www.cdc.gov/onehealth/basics/zoonotic-diseases.html

et Global rise in human infectious disease outbreaks | Journal of The Royal Society Interface

https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rsif.2014.0950

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Animaux, viande, virus, partout du nord au sud.

Il nous semble que cet article du Gardian ne manque pas d’intérêts sur un grande partie concernant la biodiversité et la disparition des forêts (bien que ce soit plus l’étalement urbain que l’extension du domaine agricole qui est noté). Mais vers la fin, quand à la recherche des causes , il y a une accusation implicite - avec usage de photos d’animaux sauvages pendus : singes et autres - des modes nuisibles de la production des viandes sauvages au Sud et en Chine - ce qui n’est hélas pas faux - mais pour mieux innocenter la production carnée du Nord qui serait plus propre, plus sécurisée . Outre les photos, la distinction entre « marchés informels » ou « marchés humides » (au sud) et marchés formels« et »marchés sec" (au nord) permet trop aisément (fin spéculative de l’article) cette accusation-exemption. C’est oublier que c’est bien au nord que l’on trouve surtout le fort confinement industriel de masse des animaux à forte source de virus.

Il importe donc de revenir au lien - certes connu mais trop relativisé par les consommateurs - entre la production de viande (notamment celle industrielle) et les épidémies de maladies comme COVID-19, et ce partout dans le monde, y compris au nord. Ce lien n’est pas à faire pour les seuls pays dit sous-développés, avec défaut de règles de séparation des animaux entre eux (espace de vie et espace de vente) et de séparation des animaux et des humains (non promiscuité) et de défaut d’hygiène dans les pratiques sociales de conservation, transformation et consommation carnée.

Même dans les pays développés (ou du Nord) les règles de l’OMS ne sont pas respectées. Que dit l’OMS en l’espèce ? « Pour vous protéger, par exemple lorsque vous visitez des marchés d’animaux vivants, évitez tout contact direct avec les animaux et les surfaces en contact avec les animaux. Assurer en tout temps de bonnes pratiques de sécurité alimentaire. Manipulez la viande, le lait ou les organes animaux crus avec soin pour éviter la contamination des aliments non cuits et éviter de consommer des produits animaux crus ou insuffisamment cuits. »

Au nord, les animaux destinés à la consommation sont entassés durablement avec leurs matières fécales et avec des cadavres et sont transportés pareillement dans des camions sales et abattus sur des sols maculés de sang, d’urine et de matières fécales. Et le niveau de saleté est d’un niveau si élevé que seules les personnes très habituées peuvent respirer sans avoir de haut-le-coeur face aux odeurs pestilentielles.

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Au-delà des producteurs de viande.

Dans cette pandémie, il nous semble qu’au-delà des producteurs de viande à cibler comme responsables principaux il nous faut aussi viser le consommateur qui n’est nullement innocent. Car il y a bien une chaine systémique entre la production des produits d’origine animale et sa consommation. Sortir de la production construite de l’ignorance chez le consommateur est un enjeu d’émancipation.

En 2013, la directrice générale de l’OMS, Margaret Chan, a illustré l’influence des lobbys sur la santé publique17 (wikipedia) :

« Les efforts de prévention des maladies non transmissibles vont à l’encontre des intérêts commerciaux des puissants opérateurs économiques. [...] il ne s’agit plus seulement de Big Tobacco. La santé publique doit également faire face aux Big Food, Big Sodaet Big Alcohol. Toutes ces industries craignent la réglementation et se protègent en utilisant les mêmes tactiques que des travaux de recherche ont bien documentées. Elles comprennent des groupes de façade, des lobbys, des promesses d’autorégulation, des poursuites judiciaires et des recherches financées par l’industrie qui brouillent les pistes et maintiennent le public dans le doute. Les tactiques comprennent également les cadeaux, les subventions et les contributions à des causes louables qui donnent à ces industries une apparence respectable aux yeux des politiciens et du public. Elles comprennent des arguments qui font porter aux individus la responsabilité des dommages causés à la santé et qui présentent les actions du gouvernement comme une ingérence dans les libertés individuelles et le libre choix. Il s’agit là d’une formidable opposition. [...] Lorsque l’industrie est impliquée dans l’élaboration des politiques, soyez assurés que les mesures de contrôle les plus efficaces seront minimisées ou totalement écartées. Cela aussi est bien documenté et dangereux. Selon l’OMS, la formulation des politiques de santé doit être protégée contre les distorsions causées par des intérêts commerciaux ou particuliers. »

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Ecouter Samantha Saunders

Pour aller plus loin, et pour prévenir de futures pandémies, il importe donc très probablement d’écouter Samantha Saunders qui nous incite à un changement de paradigme quand à notre alimentation (sur terrafemina)