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Rencontre de partis de gauche européens

Publie le jeudi 13 novembre 2003 par Open-Publishing

Une vingtaine de partis et forces politiques communistes et de gauche venus de 16 pays d’Europe se sont réunis à Paris le dimanche 9 novembre, à la veille de l’ouverture du Forum social européen, à l’invitation du Parti communiste français. Ils ont adopté la déclaration suivante.
Une dynamique nouvelle pour une autre Europe

Le FSE se tient alors que grandissent les contestations des politiques néolibérales, de la militarisation, de l’impérialisme et de l’hégémonie américaine, à la veille d’une année 2004 cruciale pour l’avenir de l’Europe avec l’élargissement à 10 nouveaux pays, le débat sur la « Constitution européenne » et les conclusions de la Conférence intergouvernementale, les élections européennes. C’est dire combien les débats du Forum social européen intéressent et peuvent influer sur les batailles à venir.

Tous, chacun dans nos pays, nous subissons les politiques du capitalisme mondialisé avec la mise en cause des solidarités et d’acquis sociaux conquis de haute lutte. C’est l’attaque générale contre les systèmes de retraite, le démantèlement et la privatisation de la protection sociale, la soumission des services publics et de secteurs aussi essentiels que la santé, l’éducation, l’agriculture, la culture aux règles du marché, la précarisation et la déréglementation du marché du travail. C’est l’accentuation de la répression anti-syndicale et une politique de criminalisation de l’immigration.

L’Europe devrait être un facteur de progrès et de promotion des droits humains. Au contraire, alors que l’accumulation des richesses et des connaissances permettraient de nouvelles avancées de civilisation, les politiques libérales accélérées par la mise en œuvre du traité de Maastricht aggravent les inégalités, le chômage, la précarité, l’exploitation. Elles alimentent aussi le sentiment d’impuissance avec pour conséquence la désaffection envers cette Union européenne, la montée de l’abstention, de la droite et de l’extrême droite, de tous les populismes.

C’est un grand défi pour tous les citoyens, le mouvement social, pour des forces politiques qui comme nous sont totalement partie prenante de ce mouvement, s’opposent à ces politiques, et se réclament de la transformation sociale en agissant pour une alternative au capitalisme.

Le temps d’une transformation en profondeur, sociale et démocratique, de l’Europe est venu. Oui, le temps est venu d’intensifier les luttes qui mettent en cause les dogmes de la sacro-sainte "économie de marché où la concurrence est libre", les pouvoirs des marchés et des multinationales, qui fassent des citoyens les acteurs des politiques menées en leur nom.

Face à la récession et à la montée du chômage, il faut mettre en cause le Pacte de stabilité, les pouvoirs et les orientations de la Banque Centrale Européenne pour mettre en œuvre une autre politique économique et sociale, avec d’autres priorités, au profit de l’emploi et la formation, des services publics, pour une politique audacieuse d’investissement pour l’environnement. Il faut imposer une taxation des mouvements de capitaux. Il faut changer les priorités : l’être humain et non pas l’argent.

De telles priorités peuvent contribuer à changer les règles dans le monde. C’est à cela que doit servir l’Union européenne et non pas à accélérer la déréglementation mise en œuvre par l’OMC ou le FMI, ou à se lancer dans une compétition militaire avec les Etats-Unis, que ce soit dans ou hors du cadre de l’OTAN élargie. Nous refusons toute militarisation de l’Europe.

Nous voulons une Europe indépendante des Etats-Unis, respectueuse des souverainetés, active dans le monde pour la paix, le désarmement, la solution politique des conflits, la promotion de l’ONU et du droit international. Une Europe réellement engagée pour le développement, particulièrement en Méditerranée et en Afrique. Une Europe qui contribue à sortir le Proche-Orient du cycle sanglant engagé depuis tant d’années, avec le soutien aux initiatives de paix, à la création d’un Etat palestinien viable dans les frontières de 1967 et dans une sécurité partagée avec Israël. Nous soutenons les initiatives prises par des personnalités israéliennes et palestiniennes pour une solution politique, comme celle du Plan de Genève.

C’est cela qui s’est exprimé avec une force inégalée dans tous nos pays, contre la guerre en Irak et la politique impériale de Bush, le 15 février 2003, et qui continue à s’exprimer dans l’exigence de la fin de l’occupation.

Enfin, ce qui est au cœur de la crise de l’Union européenne, c’est la démocratie. Pendant des décennies, l’Europe s’est faite par en haut, au mépris de la grande diversité de ses cultures et de ses langues, sans les peuples, et souvent contre eux.

Aujourd’hui, quelle que soit notre opinion globale sur le projet de « Traité constitutionnel » en discussion, nous nous opposons à un directoire de grandes puissances. Nous n’acceptons pas qu’on veuille nous imposer des critères économiques ultra-libéraux entraînant d’importants reculs au plan social. Nous nous prononçons pour la consultation des populations, dans chaque pays, par référendum.

Déjà quelque chose est en train de changer.

Les grandes luttes sociales, syndicales, citoyennes et contre la guerre ont commencé à changer la donne. Le FSE de Florence a marqué une étape, entre Porto Alegre, la mise en échec de l’OMC à Cancun, et demain le Forum social mondial de Mumbai. Aujourd’hui, le FSE de Saint-Denis/Paris/Bobigny/Ivry-sur-Seine est un moment très important de débat, de confrontation, et de construction pour des alternatives populaires et citoyennes à l’Europe libérale actuelle. Les mouvements sociaux, les luttes sociales et citoyennes ont leur dynamique propre, leur indépendance d’analyse, de propositions et d’initiatives. En quelques années, ils ont contribué à de larges rassemblements pour la paix, l’égalité des droits humains, le respect de la planète. Comme forces politiques de la transformation sociale, nous voulons contribuer à cette dynamique nouvelle qui s’attaque résolument aux politiques libérales. Pour cela nous souhaitons instaurer des dialogues à la fois nécessaires et fructueux.

Nous disons ensemble : une autre Europe est possible. D’autres politiques sont possibles à gauche.

Paris, le 9 novembre 2003

Parti communiste français, PDS (Allemagne), Parti communiste d’Autriche, Parti communiste de Belgique, Akel (Chypre), Izquierda unida (Espagne), Esquerra unida i alternativa (Espagne-Catalogne), Socialist Campaign Group of Labour Party (Grande -Bretagne), Parti communiste de Grèce, Synapismos (Grèce), Parti de la Refondation communiste d’Italie, Parti des communistes italiens, La Gauche (Luxembourg), Parti socialiste des Pays-Bas, Parti communiste portugais, Parti communiste de Bohème-Moravie (République Tchèque), Parti communiste de Slovaquie, Parti suisse du Travail, ODP (Parti de la Liberté et de la solidarité de Turquie).