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L’épineuse question des champs d’application de l’accord

Publie le mardi 25 novembre 2003 par Open-Publishing

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3246,36-343156,0.html

L’épineuse question des champs d’application de l’accord

Une remise à plat de la liste des professions concernées par le régime est
souhaitée par la CFDT, la CGT et la coordination des intermittents.

Le Monde a posé à différents acteurs du dossier la même question : "Faut-il
remettre à plat les champs d’application des annexes 8 et 10, qui listent
par métiers les professionnels ayant accès au régime des intermittents ?"
Ils proposent aussi des solutions pour réduire le déficit du régime.

Danièle Rived (secrétaire générale de la CFDT-Culture et communication)
:Oui, il faut mieux identifier les champs d’application : aujourd’hui tous
les employeurs peuvent embaucher des intermittents en passant, entre autres,
par le guichet unique. La CFDT est favorable à ce que l’on réserve le
système aux personnes qui travaillent uniquement dans les professions
listées dans les champs d’application.
Il faut garder le régime d’assurance et ses annexes, mais mettre en place,
complémentairement, une caisse professionnelle - sur le modèle de celles qui
existent dans les sociétés d’auteurs et ont 60 % de fonds mutualisés - pour
subventionner les spécificités du secteur (comme les jeunes qui ont un tout
petit salaire journalier de référence parce qu’ils n’ont pas eu suffisamment
de jours chômés, par exemple). L’idée de taxer davantage les télévisions
n’est pas bonne parce que ce sont elles qui font rentrer le plus de
cotisations.

Jean-Claude Quentin (responsable national de l’emploi Force ouvrière) : On
l’a fait partiellement. Il faut attendre les effets. La base des relations
de travail doit être le contrat à durée indéterminée. Le problème de
l’assurance-chômage en France est celui de la précarisation du travail. Les
intermittents ne doivent pas être des boucs émissaires. En France, 1,6
million de salariés vivent entre deux missions d’intérim. Le système
d’assurance-chômage dérive : il sert chaque jour à "subventionner" le
travail précaire, donc le déficit est énorme. Les cotisations, pour le
travail précaire, représentent 1,4 milliard d’euros et les allocations
versées à ces chômeurs s’élèvent à 7 milliards d’euros. Le travail précaire
contribue pour 5,6 milliards au déficit de l’assurance-chômage. Il faut
appliquer le principe du "pollueur-payeur". Pour les intermittents, on a
pris le problème à l’envers, il fallait mettre en place de quoi lutter
contre les abus. On ne l’a pas fait, on ne le fera pas.

Jean Voirin (secrétaire général de la fédération des syndicats CGT du
spectacle) : Nous sommes attachés à une définition des champs d’application.
Il existe deux particularités dans le travail des intermittents : il est
discontinu - sans prime de précarité en fin de contrat - et suppose,
contrairement aux intérimaires, un entretien d’un savoir-faire spécifique
(des acteurs, des danseurs...) entre deux contrats. Nous souhaitons que
l’accord Maurice Michel de 1998 soit renégocié pour que le recours aux CDD
d’usage ne soit plus une passoire. Ce sera l’objet de discussions avec la
Fédération des entreprises du spectacle vivant, de la musique, de
l’audiovisuel et du cinéma (Fesac) début décembre. Salariés et employeurs
feront des propositions concrètes, qui pourraient modifier les listes des
métiers donnant accès à l’intermittence. Il faut faire le ménage.
Trop d’intermittents, surtout des techniciens, occupent des emplois pendant
plus de dix-huit mois. Il faut demander des requalifications de ces postes
pour ne pas être en dehors du droit social. A France 3, à l’Opéra de Paris
ou chez Delarue, par exemple, c’est intolérable, on fait tourner plusieurs
intermittents sur un même poste. Le recoupement des fichiers des différents
organismes sociaux va dans le bon sens pour éviter ces tripatouillages.
Le Medef et l’Unedic n’ont pas souhaité répondre à nos questions.

La coordination des intermittents et précaires d’Ile-de-France : Nous sommes
favorables à une remise à plat des annexes, pour revenir à la définition de
ce qui caractérise les intermittents, la discontinuité de l’emploi. Il faut
prendre en compte l’apparition de nouveaux métiers, et on peut imaginer
d’inclure d’autres artistes.
Il est aussi envisageable de faire payer davantage certains employeurs,
comme les télévisions, de déplafonner les cotisations patronales et
salariales ou d’augmenter les cotisations patronales du régime général, qui
avaient été baissées en 2001. La réforme que nous proposons réduirait le
déficit, puisqu’il s’agit d’un système qui inciterait à déclarer le travail
et donc à indemniser moins de jours chômés.
Propos recueillis par Nicole Vulser