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Bilan de l’Assemblée Européenne pour les Droits des Femmes

Publie le samedi 31 janvier 2004 par Open-Publishing

Du 12 novembre 2003 à Bobigny

A l’issue du 1er Forum Social Européen (FSE) de Florence en novembre 2002,
l’idée avait été lancée d’organiser une Assemblée Européenne pour les
Droits des Femmes pour le FSE suivant à Paris (en novembre 2003). Cette
idée répondait à plusieurs préoccupations :

. un bilan très négatif de la prise en compte dans le forum des
préoccupations et revendications touchant les femmes : très peu
d’intervenantes aux tribunes dans les plénières et les séminaires ; très
peu d’interventions sur la spécificité femmes dans les thèmes abordés ; en
général, très peu d’investissement des hommes dans les ateliers et
séminaires femmesS ;
. le besoin de réunir, pour la première fois et dans le cadre du FSE, le
plus d’associations féministes européennes possible dans le but d’échanger
et de mettre en commun nos expériences ; de délimiter les thèmes
prioritaires à travailler ensemble ; de décider de campagnes communes ; de
créer, pour se faire, des réseaux européens ainsi qu’un Manifeste de
revendications européennes.
. affirmer et imposer notre place dans le mouvement altermondialiste.

Bref, nous comprenions l’urgence de construire une force féministe
européenne commune pour résister aux attaques contre nos acquis et en
gagner de nouveaux, particulièrement dans les pays qui sont en retard.

Un beau succès
C’est incontestablement un événement, le premier grand rassemblement
européen sur la question.

Le défi a été tenu et a même largement dépassé nos espérances : 3500
personnes dans le chapiteau, 360 associations et organisations de 55 pays
de 5 continents. Un afflux de monde qui prouve que le sujet de
l’émancipation des femmes reste un problème qui fait débat ; qui démontre
aussi une énorme attente et le besoin de se mobiliser. Nous avons pu
vérifier que tous les réseaux européens ont pu et voulu se mobiliser pour
cette date et ont senti qu’ils y avaient leurs places. On sent naître une
conscience européenne qui a besoin de se mobiliser pour avoir plus de
force.

Il y eu une majorité de militantes féministes et d’associations de femmes
dans cette assemblée. Mais cela a été bien au-delà, beaucoup de
participant-es ayant estimé cette journée comme partie prenante du Forum,
donc une occasion supplémentaire d’écouter et de se former sur ce thème.

Malgré quelques difficultés logistiques, tout c’est passé dans une bonne
ambiance, chaleureuse, solidaire, résolument optimiste, avec des
interventions denses et souvent émouvantes. Cette journée, avec ses
plénières et ses ateliers (Femmes et pouvoir, Femmes et guerre,
Emploi/pauvreté/précarité, Femmes et Violences, Femmes migrantes, Droit de
choisir) a vraiment permis de mieux comprendre la situation des droits des
femmes en Europe et de poser des jalons pour travailler ensemble.

Ce succès est du aussi pour une part à la façon dont nous avons travaillé à
la construction de cette initiative, collectivement, autour des thèmes que
nous avions décidé en réunions européennes, en créant en France, une
structure souple et ouverte, et, pour l’Europe, une liste de discussion qui
nous permettait d’échanger et de débattre entre deux réunions européennes.
Un processus lourd et difficile à maîtriser (problème de la distance
physique et des langues), et sur lequel nous pouvons faire des progrès.

-l’ouverture de la journée : l’avis très partagé a été que cette ouverture,
à plusieurs voix plusieurs pays, très dynamique et vraiment européenne, a
donné le ton de la journée et a été une des raisons de son succès.
- Les ateliers : 4 d’entre eux ont souffert d’être trop loin du chapiteau
principal. Pourtant, ils sont quand même jugés comme positifs, avec sans
doute un peu trop d’intervenantes de la tribune, mais des témoignages
souvent passionnants. Ils se sont tous conclus sur la proposition de
continuer à travailler ensemble.
- L’après-midi : Comme pour le reste du FSE, nous avons eu le "problème"
des personnes qui viennent les unes après les autres pour témoigner et qui
n’abordent pas du tout le thème décidé, en l’occurrence le contenu des
ateliers et le Manifeste. Mais, en même temps, cela a fait largement parti
de la richesse de la journée. Préparé en amont dans les commissions de
travail, le Manifeste" n’a pu être vraiment débattu dans les ateliers et la
plènière de l’après-midi, faute de temps. Nous nous y attentdions un peu
tant l’exercice est difficile. Les responsables d’ateliers souhaitent
lepeaufiner en relation avec les européennes.
- Elargissement social : on mesure mal à quel point nous avons réussi ou
non cet élargissement parce que nous connaissons très peu le profil des
associations européennes présentes. Par contre, pour ce qui concerne la
France, il y aavait des représentant-es d’AC !, des Marches européennes, de
la Coordination des sans-papiers, deux écoles et lycées de Bobigny ainsi
que des habitantes de la ville.
- Elargissement géographique : 55 pays de 5 continents, qui dit mieux !
Pour l’Est : 7 russes, 5 polonaises, 4 roumaines, 3 bulgares, 1 moldave et
une géorgienne. Les pays absents en Europe : la Norvège, les Pays Baltes et
Malte.
- En ce qui concerne les syndicats français, le plus représenté était le
G10 Solidaires, suivi de peu par la FSU, puis la CGT qui a pris le train un
peu tard mais c’est bien rattrapée. Une déléguée de FO et 2 de la CFDT.
- Toutes les commissions femmes des partis politiques, au moins français,
étaient représentées : PS, PC, Les Verts, LCR, Rouge et Vert. Pour le reste
de l’Europe : Allemagne, Suède, Italie, Grèce, au moinsS

La manifestation
4500 personnes d’après la police ! Une manifestation très satisfaisante
puisque les personnes qui ont du repartir après l’Assemblée ont été bien
compensées par la mobilisation des associations et organisations de Paris
et banlieues. Les thèmes que nous voulions voir apparaître (avortement,
violences faites aux femmes, immigration, travail) ont bien marché et la
manifestation a été très vivante. De plus, elle a fait l’ouverture du FSE à
Bobigny.

Brefs comptes-rendus très succincts des ateliers. Chacun d’eux doit se
réunir et faire leurs bilans.

Ateliers femmes et pouvoir :
problème de logistique avec une salle très
décentrée, très mal installée, une tribune trop haut placé : toutes les
conditions étaient réunies pour que ça lui nuise. Pourtant, il y a eu une
participation de bonne tenue et l’envie de continuer à se voir. Nous avons
bien géré les interventions de la tribune mais avons manqué de temps pour
le débat avec la salle, beaucoup de personnes ayant exprimé le besoin de
parler. Il faut aller au-delà de l’état des lieux et se poser le problème
de l’élargissement générationnel.

Atelier " Femmes et guerres " :
Des interventions très émouvantes de femmes
venues des foyers de guerre : israéliennes et palestiniennes, femmes russes
qui ont appelé leurs fils à déserter, femmes tchétchènes qui ont dit que "
si elles savaient où sont enterrés leurs maris elles seraient déjà bien
contentes ". Nous avons réussi à réunir des femmes qui sont sur tous les
fronts et qui agissent, des femmes qui veulent construire la paix.

Atelier " Emploi/pauvreté/précarité :
Ont été salué la qualité des
intervenantes : chômeuses belges, paysannes espagnoles, syndicalistes
russesS Le décalage entre analyses/états des lieux et perspectives communes
a montré qu’une extrême minorité des personnes présentes s’était posée la
question de travailler ensemble. L’atelier doit aussi continuer.

Atelier " Femmes et Violences " :
c’est le lieu où ont pu se rencontrer la
plupart des associations qui se battent en Europe contre les violences
faites aux femmes. Nous avons été impressionnées par l’exposé des femmes
autrichiennes qui avaient les lois les plus avancées en Europe et qui ont
beaucoup reculé. Il y a une grande attente par rapport à l’Europe. Le 25
novembre est déjà une date européenne contre les violences faites aux
femmes. Nous voulons faire du 25 novembre 2004 une grande journée de luttes
en Europe sur ce thème. De plus, la Grèce accueille les Jeux Olympiques ; à
cette occasion, " on " recrute pour la prostitution et tout le monde le
sait. Proposition d’une action à organiser

Atelier " Femmes migrantes " :
Un atelier au début balbutiant. On a voulu
privilégier les femmes migrantes des autres pays que la France d’où des
difficultés de traduction. Par exemple, une femme albanaise qui vit en
Grèce et pas de traduction, ni en grec ni en albanais. À part cela,
beaucoup de passion dans les débats, notamment sur la prostitution, le
voile et " l’intégration ".

Atelier " Droit de choisir " :
les pays où il y a des problèmes avaient été
invités en priorité pour intervenir. 150 personnes à l’atelier et 75 au
séminaire dans le FSE le lendemain. Vu les problèmes qui se font jour avec
des législations très différentes ou hostiles ou en régression, ce peu de
monde est jugé préoccupant. De plus, il faut travailler ensemble sur la
montée des intégrismes religieux.

La suite
Toute la tonalité de la discussion de bilan et ce que nous avons vécu
pendant l’Assemblée montre une énorme attente et le besoin de se mobiliser
ensemble en Europe. Alors, comment continuer, le problème est posé ? Le
grand nombre d’interventions n’a pas permis de vraiment aborder cette
question de la suite, mais quelques pistes ont quand même été proposées.
Elles seront débattues et renforcées lors de la prochaine réunion du
collectif. En attendant, quelques pistes :
- garder les listes de discussion française et européenne au moins pour le
bilan, la dernière mise en forme du Manifeste et la clarification des dates
de campagne ;
- 8 mars 2004 : nous avons besoin d’une journée vraiment européenne, contre
les guerres mais aussi axée sur l’Europe (l’idée aussi d’une vraie journée
mondiale des femmes) ;
- 9 mai 2004 : manifestation " Pour une Europe des droits sociaux " qui
doit être une date importante dans notre agenda ;
- 25 novembre 2004 : faire une vraie journée européenne contre les
violences faites aux femmes ;
- qu’allons-nous faire pour le FSE 2004 à Londres ;
- faut-il une structure pérenne ou pas ? laquelle ?

L’Assemblée des femmes et le reste du FSE

L’Assemblée des femmes a marqué le reste du Forum Social Européen et ce
pour plusieurs raisons :
. sa tenue a obligé les féministes à participer à toute la préparation du
FSE, à être plus vigilantes ;
. elle a permis, pendant la préparation du FSE, d’avoir plusieurs fois le
débat sur la place des femmes dans le forum ; ce qui fait que tout le monde
a été plus vigilant sur la présence des femmes dans les plénières et
séminaires même si l’objectif généreux de parité affiché au début a été un
peu oublié sur la fin. Quoiqu’il en soit, la présence des femmes aux
tribunes est passé d’environ 20 % à Florence à environ 35 %. Encore des
efforts à faire ! Le mouvement des femmes que l’on construit doit aider le
mouvement social et altermondialiste à prendre en compte les problèmes des
femmes.

Nous avons fait l’ouverture du FSE, c’est ainsi que cette journée a été
vécue par le public et les médias ; cette Assemblée a permis un saut
quantitatif de la participation des associations féministes au FSE ; les
personnes qui sont venu-es à l’Assemblée des femmes sont rentré-es dans le
mouvement altermondialiste. Tout cela est très positif.

L’impact et le succès de cette journée sont la démonstration qu’elle était
nécessaire et que l’on avait raison de se battre pour l’obtenir. Le
sentiment général et que, puisque nous avons fait la preuve de son
importance, elle devrait maintenant se pérenniser à l’intérieur du FSE.

Par ailleurs, nous faisons la demande que la parité soit inscrite dans le
Charte mondiale

Nelly Martin - Marche mondiale des femmes - France (texte basé sur les
notes de la réunion de bilan du Collectif de préparation de l’Assemblée
européenne des droits des femmes)