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Jeux de société

Publie le dimanche 11 mars 2007 par Open-Publishing
6 commentaires

de Alina Reyes

Ici on parle de mettre les délinquants mineurs dans des camps tenus par l’armée, là on tabasse des Don Quichotte devant le ministère de la "cohésion sociale"…

Ce tableau de Véronèse, Suzanne et les vieillards, j’en ai déjà parlé, mais je vais le dire ici plus crûment que je ne l’ai fait dans un article publié naguère dans le Monde : le type en rouge, à gauche de la toile, m’a tout l’air de se branler sous son brocart en forme et couleur de flamme.

Et personne ne le voit, pas plus que nul ne se demande : comment se fait-il que la chaste Suzanne, cette jeune beauté prétendument si vertueuse, se pince fermement un téton en regardant ce type mûr qui la regarde, les traits douloureusement tendus, les yeux mi-clos sur les feux rentrés de sa passion lubrique ?

La violence des mineurs alimente la masturbation chronique de ces vieux cochons avec lequel nous couchons tous, Médias et Discours politiques.

Et on se repaît en secret du plaisir que prennent en retour les "jeunes" et les moins jeunes à les exciter. Dans l’escalade de la perversion, messieurs Sarkozy et consorts se sont mis à serrer la jeunesse de plus en plus près avec leurs ligues de BAC et autres CRS armés, bottés et casqués comme pour de sombres orgies. Comme dit Sade "la posture s’arrange", et nul doute que spectateurs et acteurs y éprouvent les plus vifs pincements. Comme un modèle réduit d’ « une bonne guerre ! », de quoi réveiller un peu les morts que nous sommes plus ou moins devenus, en somme…

Décidément la France est libertine. Avec ou sans esprit. Les traditions ne se perdent pas tant que ça. Tandis que par milliers des têtes bien réelles refroidissaient sous la lame de la machine à tuer institutionnelle et révolutionnaire, un cerveau solitaire s’échauffait à imaginer les délices du crime, précédé ou accompagné de toute une littérature d’aristocrates convaincus de leur condition surhumaine, et du droit qu’elle leur conférait d’user d’autres humains comme de jouets. Un peu plus de deux siècles après, la démocratie blasée ne se soucie guère d’écouter la parole des poètes-philosophes susceptibles d’éclairer son noir ou trouble fonctionnement.

Sans doute existent-ils, mais qui les entend, dans l’énorme bruit de fond de violence que nous servent continument Médias et Politiques pour détourner l’attention de ce qu’il sont en train de faire sous leur brocart, et pour mieux nous cacher à nous-mêmes (sinon, qui sait, nous pourrions avoir honte) l’œil concupiscent que nous jetons au spectacle qu’ils nous offrent ? Spectacle derrière le spectacle, plus obscène qu’obscène…
Dans un roman d’Elfriede Jelinek, Les exclus :

"Pourtant il y a en toi un sentiment, ton amour pour moi, dit Rainer. Quand tous deux nous enfonçons les doigts dans l’œil d’une victime, ce geste nous lie plus solidement que le mariage ne le ferait."

http://www.alinareyes.com/

Messages

  • votre image me paraît juste en effet à dessiner le comportement de cette société puritaine capitaliste que nous subissons depuis deux siècles.

    elle est horrible et malsaine de collaboration intime et mêlée dans sa fondation par le mal commun, donc partagé comme boureau-victime : ils se retrouvent tous à communier au spectacle de la reproduction sacrificielle de l’ordre fondé sur le crime commun

    les opposés sont rivaux dans la construction culturelle : salomé valorise autant son narcissisme et la société qui la regarde que sa mère manipulatrice d’un ordre social dont elle se venge, emprisonnant hérode et son peuple dans la culpabilité du désir et de la jalousie et celui de l’éxécution du seul coupable de lucidité qu’est le penseur distant et sauvage, c’est à dire non enfermé dans les murs de la peur, les murs de la cité... tous jouissent des frustrations qu’ils partagent et du crime qu’ils se permettent.

    je fais allusion à une lecture des idées girardiennes dans le "bouc émissaire" et "la violence et le sacré".

    l’horreur que m’inspire les petits napoléons en costard sombre et en cravate de truands mafieux se prétendant digne de confiance parce que bêlant ce que la foule enragée de bêtise rivalitaire et jalouse tient tout entier dans ce schéma fondateur de notre époque... qui semble remonter à plus loin encore quand on lit certains mythes bibliques... est à la mesure de l’horreur de toute société fondée sur les bouc-émissaires et le puritanisme ou lois de l’ignorance, du désir interdit et du désir mimétique.

    paul

    • Oui Paul, mais ce n’est pas tout à fait la même histoire... Dans la mienne il y a bien aussi des seins (de Marianne, par exemple) et des masturbateurs (téléspectateurs et internautes, par exemple), mais pas le moindre saint.

      Et s’il fallait reconnaître une Salomé et sa mère, ce serait plutôt la tentation de certaines des "ni putes ni soumises" et surtout de la symbolique Magma Ségolène de vouloir... décapiter... les jeunes hommes par trop virils et révoltés qui ne daignent pas rester derrière un écran... (et non les penseurs que les électeurs ignorent ou qui sont déjà vendus au système).

      Guillotin a définitivement épousé sa guillotine, en France, on ne supprimera pas l’une sans supprimer l’autre. Je veux dire, le Bourgeoisisme kapitaliste et sa promise soumise la Sozialisme.

      Alina

    • Je sais bien qu’il ne s’agit pas tout à fait de la même histoire

      je ne sais pas grand chose d’ailleurs sauf qu’il me semble reconnaître derriere des histoires différentes le même schéma de reproduction culturelle fondé sur l’ignorance des victime inconsciente de leur soumission ou consentement à un système dont elles sont autant victimes que reproductrices

      donc je ne pense pas du tout lire le schéma du quatrin salomé hérodiade hérode jean baptiste de la même façon que vous

      il me semble que salomé code pour tous les artistes ou les "monstres" (vedettes sportives et certains politiques aussi...) qui dansent pour réaliser les fantasmes d’un publique et d’un "non-pouvoir"

      que hérodiade (mère de salomé) code pour toutes les parties prenantes traditionalistes familialistes du système culturel de l’humanité fondé sur un capitalisme de chair et dont l’ordre à l’inférieur ou à la progéniture ou au subalterne est "rends moi fier mon esclave... exécute pour moi sans culpabilité" : ce sont donc les commanditaires et les exécutantes comme papon et les silencieux collaborateurs, les heichmann de tous les pays, mais aussi la grande majorité des gens qui font des mômes par nécessité d’identification et de fierté sociale...

      que hérode est un des bouc émissaires comme tout chef il est le sommet hiérarchique faisant tenir l’ordre sociale entre fausses solutions et faux coupables : il est semis conscient et représentatif des non pouvoir empêtré dans le désir mimétique du pouvoir et la ressemblance rivalitaire avec le médiateur...

      hérode comme hérodiade codent pour des victimes aliénées reproductrices consentantes car bénéficiaires relatives du système : ils sont parmis ceux qui se branlent presque au vu et au sus de tout le monde mais de façon plus perverse encore puisque moins "sexuée" mais totalement "sadique" ils se branlent avec du pouvoir sur l’autre, sur son désir, sur son pouvoir suggestif, sur sa douleur et son ignorance

      jean baptiste ne code pour aucun saint mais pour la lucidité libérée ou non aliéné : il code effectivement pour tous ceux et celles de tous âges qui ne se branlent pas devant la télévision et sont constructeurs productifs de cultures : donc j’y mettrais volontier les gens du mouvement "ni putes ni soumises" par exemple (mais j’y mettrais aussi marie-george buffet, na ! entre autres)

      les pseudo penseurs auxquels il me semble que vous faites allusion me semblent être codés par salomé : ce sont des "monstres" sacrés donc des "mis à distance" intouchables des bouc-émissaires d’une autre forme que celles des chefs et des victimes émissaires ou des skandalons

      voilà

      mon utilisation des théories girardiennes est certes débatable

      il me semblait que sans l’avoir voulu vous en faisiez à votre façon une à partir de la situation décrite par cette oeuvre picturale montrant dans son schéma de scène un triptique, objet de désir, médiateur rival, d’un sujet désirant... mais bon...

      les vieux salaupards se branlent, en rivalisant de perversions car ils sont médiateurs des désirs de pouvoirs auto frustrés par leur puritanisme social et culturel les uns des autres, se branlent en méprisant les "salomé" qu’ils mettent à distances intouchables par autant d’interdits que de projections : les bouc émissaires sont sacrifier à la reproductions des interdits collectifs.

      c’est ce que nous font subir actuellement les acteurs que vous désignez dans votre lecture de cette peinture (sociale)

      le monde actuel est anciennement bourgeois et devenu petit bourgeois désireux, autant que le bourgeois gentilhomme décrit par molière, de se faire grenouille aussi grosse que le boeuf... mais cela va plus loin et pire encore dans des schémas de domination sadique de plaisir à la souffrance de l’autre comme de soi-même...

      c’était aussi pour souligner combien notre époque prétendument éclairée du progrès scientifique technique et héritière des lumières générant laicité et acquis soiciaux est en pleine perversion et régression psychosociale, ethnologique, anthropologique....

      le retour à la barbarie et au canibalisme rituel de la haine du prochain générée par le désir mimétique frustré

      la moralité du puritanisme est, de part son schéma générateur et sa reproduction ainsi que ses intentions, profondément malsaines : c’est le mal (et j’ai fait le lapsus le mâle mais c’est idiot comme projection unilatérale car le schéma est symétriquement partagé)

      bien à vous
      et merci pour vos pages

      paul

  • Très beau travelling sur les obscènes spadassins qui nous gouvernent. Merci.

    Tzigane

    • Merci à tous les 2. Paul, j’ai répondu un peu rapidement, mon texte aussi est écrit un peu rapidement... mais le développement autour de l’affaire de la danse des voiles est intéressant, oui...

      Alina

    • Ce qui est aussi très intéressant dans votre texte est l’exemple qu’il donne du double personnage que, dans un schéma de désir mimétique, la jeunesse violente, rivalitaire et dominatrice représente d’abord une autre sorte de salomé à l’égard du schéma dont je parlais, mais peut aussi représenter, quand on y ajoute les analyses des procédures internes de reconnaissance de membre (dans les gangs), un rival et un sujet désirant.

      Les vieux saligauds sont sujets et médiateurs. Mais la jeunesse qu’ils stygmatisent peut être bouc émissaire sacralisateur du désir interdit (salomé dansant et ayant le droit d’être belle et de se montrer impudique et cruelle, toute chose interdite de façon monstrative).

      Or de par son fonctionnement interne, une certaine jeunesse violente est rivale des vieux saligauds en costard cravate, je parle des voyoux patentés, fascinés par le pouvoir de la violence de la hiérarchie qu’ils reproduisent et par laquelle ils se construisent en gang.

      je ne mets pas dans le même lot la jeunesse manifestante et militante qui serait plutôt représentée par jean baptiste, en fait, puisqu’on cherche à la faire taire par tous les moyens y compris la pression de violence d’autres "jeunes"...

      ces jeunes en gang là fonctionnent avec les mêmes rêgles guerrières et les mêmes fantasmes phaliques de toute puissance que nos ennemis...

      bien... en fait les encarts formulaires de réponse sont bien peu pratiques pour développer ces quelques idées que je maltraite ici et j’en suis désolé

      pourquoi ne pas travailler de concert à l’exposition de ce type de sujet ?

      je pense qu’il y a une liason rationnelle et causale entre le désir mimétique, le puritanisme, le capitalisme et la violence qui nous est faite quelque soit notre sexe par les phallocrates de toutes classes et ethnies

      le schéma de véronèse des vieillards convoitant une certaine jeunesse est au centre d’une volonté de pouvoir sur la vie qui passe par une éducation des sens à la vie, du sens de la sensualité, donc de l’amour au sens large.

      fraternellement
      paul