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PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT.
Publie le mercredi 31 octobre 2007 par Open-Publishing12 commentaires
Le débat sur le voile s’élargit à d’autres vêtements. Pour détourner de la critique particulière du voile islamique certain(e)s ont rapproché le pantalon du voile comme instrument de protection du regard masculin. Le tout pour légitimer le voile islamique.
Ainsi le pantalon ne serait plus porté par confort mais comme voilage. Le fait serait patent pour les femmes qui ne portent que des pantalons et jamais de jupes (à l’exception des jupes très longues). En ce cas les reproches antisexistes faits au voile islamique portent aussi contre le pantalon. Mais est-ce pour autant la même chose ? Je crois qu’il y quelque outrance dans l’assimilation.
Sans plus approfondir ce sujet - qui peut faire l’objet de commentaires divers - posons la question délicate et récurrente du respect maintenu malgré le regard objectivant - dépréciatif ou concupiscent - des hommes. Sachant sans doute qu’il n’y a pas de réponse simple et sûre mais néanmoins des pistes à explorer en vue d’un effort civilisationnel à entreprendre pour améliorer les rapports hommes/femmes.
I - THEORIE : VOIR ENSEMBLE LE CORPS OBJET ET LE SUJET DESIRANT
Lire préalablement "Le machisme insidieux des "mecs lourds" sur le site Bellaciao ou sur ce blog car une partie de ce texte porte sur le regard.
http://www.bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=54238
Lire aussi : De l’influence prégnante de l’interprétation réactionnaire patriarcale sur les rapports hommes/femmes. (sur chrismondial blogg)
Les lignes qui suivent sont de Valérie DAOUST in De la sexualité en démocratie" Son propos invite à repenser la dialectique corps-objet/femmes sujet.
Il est difficile de penser, en raison de la dialectique de la rationalité, que, derrière la représentation du corps-objet de la femme, il y a un sujet. Même la critique féministe, particulièrement préoccupée par l’objectivation du corps de la femme, reprend la dialectique sujet-objet. Dans les années 1970-1980, on dénonce l’objectivation du corps de la femme, et les rôles limités que celle-ci peut jouer au sein de la société justifient ces critiques. Les rôles de la femme dans la société s’étant multipliés, on ne peut plus penser l’activité de la femme et la représentation de son corps comme étant uniquement déterminées par des forces extérieures à elle-même sans du même coup la réduire à un « agent » passif auquel on ne reconnaît pas le sujet qui s’autodétermine.
Le problème concerne tout particulièrement les adolescentes : on arrive difficilement à leur reconnaître une sexualité active puisqu’elles se présentent, selon la dialectique traditionnelle, comme objet de désir (vêtements sexy, par exemple), associé à la passivité. On a du mal à voir et à reconnaître que derrière cet « objet », il y a un sujet de désir.
Un certain courant de pensée qui voit le jour dans les années 1990 commence à redécouvrir le concept de girl power, le pouvoir du corps et du sexe. Il est clair qu’il faut repenser la dialectique sujet-objet : c’est peut-être que la femme rationnelle ne s’est jamais « résolue à considérer son physique comme un qualité inhérente à sa personne, mais comme une sorte d’avatar qui lui serait fondamentalement étranger » (1) . A l’instar de Maurice Merleau-Ponty, il faut résolument penser le corps « l’existence figée ou généralisée » et l’existence comme une « incarnation perpétuelle » (2)
Derrière l’objet il y a donc un sujet, et il y en a toujours eu un, mais non pas dans le sens qu’il y a toujours eu un sujet qu’il faut enfin reconnaître pour le faire passer du statut d’objet à celui de sujet : il y a toujours eu un sujet qui dans les faits s’est exprimé, bien que dans l’ordre de la représentation, ce sujet ait été réduit au rôle d’objet. (fin de citation)
II - PRATIQUES SOCIALES PROGRESSISTES : SEINS NUS ET JOURNEE DE LA JUPE !
Ayant déjà écrit sur le port constant du voile comme mépris des hommes concupiscents et des femmes occidentales dépravées j’y renvoie avant de passer à d’autres situations, l’une concerne la sociologie de Jean-Claude Kaufmann (1) sur les seins nus sur les plages, l’autre sur la journée de la jupe dans les collèges et lycées.
Ici le mépris ne répond pas au mépris. Mieux le respect se développe dans la vérité - relative - de la différence des sexes.
A) SEINS NUS SUR LA PLAGE : RESPECT
Commençons par le comportement des femmes et des hommes sur les plages ou le sein nu est pratiqué :
Les seins nus ne seront possibles à la plage que parce qu’on ne se touche pas, qu’on ne se parle pas, parce que l’échange entre celle qui se donne à voir et celui qui regarde en reste strictement à ce stade, dans l’anonymat complet.
La pudeur non pudibonde sera de deux sortes :
– d’une part cette capacité du regardant à voir sans voir, à banaliser ce qui est vu, de telle sorte que le sein se trouve privé de particularités ;
– d’autre part la capacité de la femme à sentir si ses seins correspondent aux normes de la plage.
Ici l’homme n’est pas renvoyé à l’enfer de sa biologie prédatrice et la femme à une nécessaire abstinence de séduction à une obligation de sobriété vestimentaire pudique afin de maintenir l paix dans les rapports hommes/femmes.
On peut penser que la banalisation masculine est toute relative . On peut aussi critiquer ce retour d’une « norme corporelle » sur la plage (ne pas montrer des seins trop plats ou trop gros) . On peux aussi penser que toutes les femmes ne suivent pas cette norme implicite, reste qu’un respect se créé entre hommes et les femmes sur la plage.
B) JUPES COURTES ou STRINGS APPARENTS AU LYCEE : UN TRAVAIL CIVILISATIONNEL EN COURS
Ce respect disparaît au collège ou au lycée dans la mesure ou les jeunes filles ont quasiment cessé de porter des jupes (sauf des jupes longues) pour ne pas encourir les propos sexistes des jeunes hommes mais aussi des filles. Les filles et les femmes font preuve d’une sévérité étonnante et inadmissible – « tu fais la pute ! » contre les jeunes femmes qui s’habillent de façon séduisante, qui portent des jupes courtes ou des strings apparents.
Une réaction salutaire a été organisée dans un établissement d’Ille et vilaine : la « journée de la jupe » qui se répète chaque année qui vise à sensibiliser les jeunes garçons et les jeunes filles au droit à s’habiller librement sans subir d’injures. S’habiller réellement librement se comprend avec le droit de non respect d’une norme historique religieuse et patriacale de pudeur extrême interdisant d’être séduisante, « affriolante ».
Le string fait l’objet d’une stigmatisation intense dans certains pays. Que la femme puisse vouloir séduire ainsi n’est pas toléré ni par certains hommes ni par certaines femmes mais pour des raisons différentes.
Pour conclure provisoirement :
Ces quelques lignes montrent assez la nécessité de promouvoir d’autres rapports entre hommes et femmes en luttant radicalement contre le viol, le harcèlement sexuel et "le machisme insidieux des mecs lourds" . Pour mener à bien cette tâche il importe que soit reconnu la liberté de séduire franchement et de s’engager librement une relation sexuelle sans passer par le mariage. Par contre il convient de rappeler au pape que le préservatif est une protection essentielle. Et il ne s’agit pas non plus de défendre seulement les rapports hétérosexuels.
Christian DELARUE
chrismondial blogg
1 Corps de femmes, regards d’hommes : sociologie des seins nus par Jean-Claude Kaufmann
Messages
1. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 31 octobre 2007, 13:44
C’est vrai à n’a que ça à se mettre sous la dent en ce moment !!!!
1. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 31 octobre 2007, 18:48
Bellaciao serait-il un site destiné à ne traiter que les questions brûlantes ?
Mais est-on certain que ce qui brûle soit toujours ce qui importe au plus profond des questions humaines ?
Il est bien me semble-t-il qu’on prenne le temps de penser des questions qui touchent au temps plus lent mais d’autant plus essentiel des structurations de l’humain dont les rapports de sexe constituent une des ossatures.
Que sur ce site précisément (celui où interviennent des gens préoccupés de tranformer le monde) soit pensées ces questions me parait être de la plus haute importance !
Mais peut-être que bellaciao ne serait pas un lieu de pensée, seulement le dernier endroit où l’on pousse un coup de gueule ? C’est utile, nécessaire, salutaire même ! Mais pas suffisant !
Et pour dire ce qu’il est important de penser et quand, encore faut-il le dire et le penser !
Donc laisser se poser toutes les questions et accepter qu’elles cheminent en nous !
Ce qui nous concerne vraiment n’est pas toujours ce qui nous apparaît tel au premier abord.
Ce qui nous intéresse objectivement n’est pas toujours ce à quoi notre subjectivité porte intérêt.
Pouvoir personnelement (subjectivement) porter intérêt à ce qui nous intéresse qu’on le veuille ou non (objectivement) cela relève d’une conquête, d’une libération !
Les déboirs amoureux de Sarkozy sont d’un intéret objectif moindre (pour le moins) que les grèves dans les transports ! Mais combiens de nos concitoyens sont-ils déterminés dans l’intérêt qu’ils portent aux choses de ce monde par ce qui leur est offert comme hautement intéressant : les "pipoles" ? Et dont on aimerait qu’ils soient moins friands , moins esclaves ! (ah l’heureux jours ou l’huma se vendra mieux que "voici").
Il n’est pas du tout sûr que la question des rapports hommes/femmes, si elle paraît moins urgente ( la violence faite aux femmes, le rapport violants aux filles dans certains quartiers, pas urgent ?) ne soit pas tout aussi fondamentale (parce qu’ intimement liée à elle) que la lutte contre la soumission des rapports humains aux logiques libérales.
Ce qui est intéressant n’est pas toujours proportionnel à ce qui est préoccupant.
Gilles.
2. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 31 octobre 2007, 20:00
Le sujet apporté (à nouveau) par Christian, traite de questions travaillantes qu’on retrouve souvent sur le boulot, des travailleuses et des travailleurs, femmes et hommes, parents et parentes en parlent, et ce sont des questions d’importance touchant les rapports humains profondément, il n’y a donc là rien de choquant d’aborder ça sur Bellaciao.
L’apprentissage d’une société de libertés est à ce prix. Au prix du débat sur des questions touchant à l’intime de la liberté, le corps.
Copas
2. PANTALON ou VOILE / JUPE , 31 octobre 2007, 23:53
Le pantalon n’est pas qu’une protection....
Tout le problème... en psycho, socio et photos :
http://minijupe.maxitabou1.site.voila.fr
1. PANTALON ou VOILE / JUPE , 1er novembre 2007, 09:46
Après un coup d’œil rapide sur le site mis en lien…
– Je préfère parler de séduction que de féminité qui sent bon le naturel éternel
– La séduction n’est pas hors du temps et de l’espace (nous vivons avec les normes diffuses du moment qui ne sont ni naturelles ni éternelles)
– Du coup il n’y a pas en principe de normes à respecter (la société libre doit promouvoir une pluralité de normes et de modèles voir aucun modèle ou aucune norme) même si en fait on ne fait que de choisir parmi l’existant dans les sociétés ouvertes et libres.
– Les normes peuvent manifester une hiérarchie de contraintes sur le corps des femmes car la société ouverte et libre s’appuie sur le patriarcat la religion et la marchandisation des corps, (ce qui n’est pas aussi contradictoire qu’il y paraît mais c’est autre chose)
– La séduction passe souvent par l’usage d’artifices plus ou moins contraignants
– Les artifices (quoique marchands ) ne sont pas mauvais en soi bien au contraire : une fille vue comme laide (penser ici à celles hyper grosses que les féministes montrent sur leurs affiches) sera relativement plus belle avec des artifices.
– La question éthique est quel type d’artifice ? Certains artifices sont structurels et permanents alors que d’autres sont disponibles à l’usage selon la volonté : se faire changer les seins ou le visage par la chirurgie n’est pas la même chose que de mettre du rouge à lèvre et des boucles d’oreille.
– Pour autant les modifications structurelles n’ont pas à être stigmatisées. Leur démocratisation peut être utiles. Reste que les modifications de « petite séduction » respectent bcp plus la personnalité de l’individu tel qu’il est.
– La « petite séduction » moderne concerne les femmes comme les hommes : elle permet de marquer un changement de registre : vous avez aménagé le jardin tout l’après midi en tenu de travail moche et sale et vous changez tous les deux de tenu le soir pour une rencontre intime et coquine : les principes de l’égalité et de la réciprocité sont respectés en jouant des fantasmes ordinaires d’une société donnée.
Lak
3. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 1er novembre 2007, 11:26
Quel charabia ! Moi, comme dit un copain, au printemps, ça a beau être tous les ans pareil, je ne m’en lasserait jamais de ces jolies jambes et de ces petites jupettes qui s’agittent sous nos yeux !!!!!!! et merde aux rabat-joies !!!!!!!!!!
1. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 1er novembre 2007, 15:19
Lire "Le machisme insidieux des mecs lourds" pour comprendre que la lourdeur des propos ou des regards de certains hommes qui présentent comme naturel des effets de domination et gâchent ainsi le plaisir authentique de rapports sains mais non pudibonds entre hommes et femmes ; des femmes et des hommes soucieux d’égalité et de réciprocité. Sans parler du besoin de gentillesse et d’engagement authentique.
http://www.bellaciao.org/fr/?page=article&id_article=54238
un cran au-dessus :
S’engager pleinement, sans retenue...
AUTHENTICITE DE LA PASSION
http://bellaciao.org/fr/?page=article&id_article=52684
CD
Le texte "le machisme insidieux des "mecs lourds" est à corriger avec la précision de gil ci-dessous :
ton amie se trompe sur l’étymologie de l’expression dare-dare, et l’aasimile trop hativement à " dard" ( un faux ami :)
"dare-dare » est une expression d’origine occitane
elle vient de « d’ara d’ara » (littéralement « maintenant maintenant »), car « la répétition des adjectifs et des adverbes fonctionne en occitan comme procédé intensif
4. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 1er novembre 2007, 15:52
bizarre, tout ça... dans les années cinquante, le pantalon était interdit par certaines bonnes soeurs, parce qu’il était une revendication par les femmes de l’égalité avec les hommes et aussi pour son aspect pratique. Essayez le saut en hauteur avec une jupe...
Pour moi, les femmes et même les ados peuvent rechercher à la fois les aspects de bon goût et compatibles avec une vie active.
Enfin c’est le plus souvent les hommes qui s’en font un problème, voire décident à la place des femmes et ça, c’est vraiment insupportable. Voir nos chers représentants politiques... Si encore ils le faisaient non en fonction de leur propre libido, consciente et inconsciente, mais avec des raisonnements, cela passerait mieux. Si j’étais un homme je m’interdirais de penser à la place des femmes et surtout d’intervenir à tort et à travers. Si une femme manifeste plus de pudeur qu’une autre, messieurs, ce n’est pas forcément qu’elle vous prend pour un monstre, mais c’est un fait... Et les faits peuvent évoluer.
En revanche tout débat est possible, même sur ce sujet, à condition de rester dans l’objectivité, et de laisser les passions et les angoisses aux vestiaires. Ainsi, au lieu d’interdire le voile et surtout d’extrader hors de nos écoles les jeunes voilées, les discussions menées auraient dû aboutir à un meilleur résultat.
En conclusion l’article suscite les réflexions...
1. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 1er novembre 2007, 18:40
A propos du voile il n’y a pas une position de genre du type les hommes contre les femmes. Cela n’est pas avéré. Je n’ai rien lu confirmant un tel point de vue.
S’agissant de la loi de mars 2004, elle aurait pu être mieux appliquer mais elle est bonne dans son principe.
J’ai même trouvé un motif légitime d’extension. Mais je suis très réservé et prudent pour inciter à sa mise en oeuvre.
CD
QUE PENSER, QUE PROPOSER SUITE AU VERDICT "JULIENRUPT" ? | 10 octobre 2007
La propriétaire d’un gîte rural de Julienrupt, dans les Vosges, a été condamnée par le tribunal correctionnel d’Epinal pour avoir refusé d’accueillir une cliente qui portait un voile islamique.
http://www.lepoint.fr/content/a_la_une/article?id=204489
Cette femme de 54 ans a été reconnue coupable de discrimination religieuse.. On a discuté en séance et dans les couloirs sur le point de savoir s’il fallait caractériser la discrimination de raciale ou de religieuse. Ce n’est pas anodin. Nul doute que des débats vont se tenir sur cette différence. Cette décision peut faire date.
Cette différence souligne une double hypocrisie. La deuxième portant sur le voile indique qu’il va falloir étendre le champ ouvert en 2004.
I - LUTTER CONTRE UNE DOUBLE HYPOCRISIE.
Le racisme avance masqué, il faut donc le dénoncer (A). Mais à l’inverse un certain discours globalisant risque de tordre le bâton dans l’autre sens en portant des accusations injustifiées. La critique de la « voilophobie » ne sautait être sommaire ! (B)
A – Oui un "RACISME PERNICIEUX" se déploie en ce moment.
Il n’est d’ailleurs pas si nouveaux puisque déjà en 2003, donc avant la loi du 15 mars 2004 des préjugés et des actes antiarabes et antimusulmans se sont banalisés. Je ne pense pas avoir relativisé cet aspect ainsi que le laisse penser le message "en réponse à C DELARUE" posté sur Bellaciao. Simplement je pense, à la différence de Mouloud AOUNIT, que des compréhensions se sont fait jour depuis 2004. Une prise de conscience s’est développée entre islamophobie globale débouchant sur du racisme et critique ou blasphème du voile soit comme signe religieux ostensible oppresseur des autres soit comme symbole d’aliénation pour les femmes.
Reste que le racisme sous toutes ses formes constitue un réel problème en France et en Europe qui nécessite le renfort du mouvement antiraciste. Car il y a besoin d’un mouvement antiraciste fort en France mais un mouvement en capacité d’éviter les amalgames .A cette heure je suis dubitatif. . Je ne conçois pas un tel mouvement qui se met sans débat en ordre de bataille derrière un rapport, que dis-je derrière quelques passages d’un rapport . Autrement dit , on ne peut prendre comme un dogme la phrase répétée ces jours-ci : "Selon le rapport de l’ONU de sept 2007 , l’islamophobie constitue, dans le contexte actuel, la forme la plus grave de diffamation des religions. C’est une forme contemporaine de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance". Il existe un racisme généré par l’islamophobie mais aussi des rejets de certains abus de l’islam et notamment d’un islam politisé qui ne sont pas raciste.
Le mouvement antiraciste doit s’attacher plus encore à développer son volet social, son ancrage altermondialiste, notamment sur l’extension des logiques sécuritaires et guerrières.
B - DERRIERE LE VOILE : LAICITE et FEMINISME ou RACISME ANTI-ARABE / RACISME ANTI-MUSULMAN
Derrière le voile, il ne faut pas s’abstenir de l’analyse avant de conclure. La "voilophobie" n’est pas systématiquement raciste. "LA VOILOPHOBIE N’EST PAS NECESSAIREMENT L’ISLAMOPHOBIE INDISTINCTE". Le voile met en jeu plusieurs éléments :
– d’une part la ‘liberté de religion’ qui n’est pas sans limite. Des compromis sont à rechercher. Le droit international protège la liberté religieuse mais ignore la laïcité.. La mentalité laïque est à conquérir contre l’esprit religieux ostensible ou ostentatoire
– d’autre part le racisme caché derrière le refus du voile car en ce cas c’est en fait toute la personne avec sa croyance voir son appartenance ethnique qui est rejetée. C’est du racisme islamophobique ou du racisme anti-arabe (il faut analyser de près).
Mais on ne saurait procéder constamment par soupçon facile et générateur d’amalgame. Les choses sont plus compliquées dans la vie réelle. Ainsi, de nombreuses personnes non racistes ( y compris des musulmanes ) ne supportent pas le voile soit comme féministes soit comme personnes attachées à la mentalité laïque.
Mais il faut bien prendre garde à distinguer le comportement ou l’apparence de la personne elle-même. Autrement dit distinguer le voile comme accessoire facultatif (outil objectif d’oppression) qui peut être enlevé
au moins pendant le temps du vivre en commun et la personne qui ne doit pas se sentir rejetée pour sa croyance religieuse (de quelque religion qu’il s’agisse) encore que la croyance religieuse puisse elle aussi être critiquée sans que cela se comprenne comme une attaque à la personne même.
– Le voile est ressenti d’une part comme une OPPRESSION EXTRAVERTIE
Autrement dit comme un message offensif vers l’extérieur, c’est-à-dire contre les autres, les proches, ceux qui subissent la présence constante du signe ostensible.
– Les personnes de mentalité laïque, sensibles au prosélytisme religieux insidieux mais permanent (je crois, je crois, je crois, croyez, croyez...) refusent souvent le voile à ce titre. Ils ne rejettent ni les arabes ni les musulmanes, ni l’islam. Ils sont tolérants. Ils s’opposent juste à un instrument d’oppression, pas plus. Ils ne sauraient être accusés de racisme.
– Des hommes non sexistes ou antisexistes éprouvent comme une oppression le message insidieux du voile : les hommes seraient tous incapables de maîtriser leurs désirs, ils seraient trop concupiscents et même aisément violeurs. Le même message signifie aux femmes "occidentalisées" qu’elles sont aussi "dépravées" que les hommes et qu’en cas d’agression elles sont responsables.
– Le voile est d’autre part perçu comme outil d’OPPRESSION INTROVERTIE
Autrement dit comme une aliénation, c’est-à-dire tournée à l’encontre de la personne même qui le porte. Les féministes sont sensibles à cet aspect. On pourrait dire que l’on ne libère pas une personne malgré elle. Que c’est à la personne elle-même de faire son trajet de libération. Les féministes n’ignorent évidemment pas cela. Reste que de nombreuses femmes ne supportent pas le voile à ce titre et uniquement à ce titre et que dès lors elles ne sauraient être assimilées à des racistes.
Les deux volets - laic et féministe – de la critique se combinent souvent dans la réalité.
II – LUTTER SUR PLUSIEURS FRONTS : ANTI RACISME, ANTISEXISME, COMBAT SOCIAL ET ALTERMONDIALISTE...
MAIS AUSSI EXTENSION DE LA LAICITE !
Qu’il faille poursuivre la lutte antiraciste comme la lutte antisexiste le tout dans un cadre élargi d’un combat social de type altermondialiste est une nécessité . Il faut aussi poursuivre le travail engagé en 2004 (A) en tenant compte des effets pervers (B).
A) LA FRANCE DISPOSE D ‘UN POINT D APPUI...
– UNE AVANCEE : La loi interdisant les « signes religieux ostensibles » a constitué une avancée par rapport aux textes fondateurs (les lois de 1881, 1882 et 1886) qui ne concernait que les locaux, les programmes scolaires et le personnel enseignant mais pas les élèves ou les mères accompagnatrices. Une avancée car l’envahissement pénible des signes religieux ne provient pas seulement du crucifix isolé en hauteur sur le mur d’une classe ou d’éventuels propos religieux d’enseignants mais aussi du nombre de personne supportant constamment du matin au soir des signes religieux
ostensibles ..Le partage entre l’institution soumise à la laicité et ses usagers libres est dépassé. Ce partage est en fait maintenu mais la loi du 15 mars 2004 va plus loin encore.
– UNE DISTINCTION CAPITALE : La distinction entre signes discrets autorisés et signes ostensibles interdits constitue un principe fondamental pouvant donner contenu clair pour l’humanité à ce que l’on peut appeler « la mentalité laïque » . L’esprit laïc, que n’est pas l’athéïsme, doit enfin progresser au plan historique et mondial . Pour l’heure la mentalité laïque peine à sortir de la préhistoire du fait de la puissance du pouvoir religieux et patriarcal archaïque. De plus en plus d’individus, y compris des croyants, et de quasiment toutes les religions, sont gênés par l’affichage de signes par trop ostensibles. Ils préfèrent adopter des signes discrets voire garder pour eux leur croyance.
B) ... MAIS IL FAUT ËTRE TRES PRUDENT !
– DES INSUFFISANCES DANGEREUSES : Si la loi du 15 mars 2004 pouvait encourir la critique c’était plutôt du fait que rien n’était prévu, notamment dans le privé, pour recevoir les jeunes musulmanes à l’affichage religieux ostensible . La déscolarisation des élèves est un fait à prendre en considération pour des militants laics responsables tout comme d’ailleurs pour des féministes. Je le souligne, même si cela ne fait pas plaisir aux laics et aux féministes anti-voile, car il ne faudrait pas qu’un gouvernement prenne pour les lieux de production des mesures irresponsables génératrices d’exclusion .
– POUR UNE EXTENSION : Pour moi, cette philosophie de la loi du printemps 2004 ne saurait rester limitée aux portes de l’école . Sont également concernés les autres lieux clos qui sont des lieux de partage contraint de l’espace . Cela concerne principalement les lieux de travail . Toutes les entreprises ne peuvent prévoir des lieux distincts pour les femmes voilées et les femmes non voilées. Le passage par la loi semble difficile, sauf s’il s’agit d’une loi indicatrice qui ouvre sur des discussions et des compromis. Le principe étant de favoriser le vivre ensemble le plus possible et donc d’éviter le licenciement.
– UNE METHODE : Le principe se couple aussi avec l’idée que l’émancipation ne s’obtient pas par la répression. Il s’agit de trouver un compromis entre liberté de porter un signe et souci de ne pas oppresser une autre personne par ce port constant et proximal.
Christian DELARUE
Secrétaire national du MRAP
2. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 2 novembre 2007, 00:24
"Le voile est d’autre part perçu comme outil d’OPPRESSION INTROVERTIE
Autrement dit comme une aliénation, c’est-à-dire tournée à l’encontre de la personne même qui le porte. Les féministes sont sensibles à cet aspect. On pourrait dire que l’on ne libère pas une personne malgré elle. Que c’est à la personne elle-même de faire son trajet de libération. Les féministes n’ignorent évidemment pas cela. Reste que de nombreuses femmes ne supportent pas le voile à ce titre et uniquement à ce titre et que dès lors elles ne sauraient être assimilées à des racistes."
Que c’est à la personne elle-même de faire son trajet de libération. C’est un principe auquel des femmes comme moi restent terriblement attachées.
Sinon, comment comprendre que des femmes, de surcroît féministes, ne supportent pas la vue de femmes voilées, mais qu’elles ne trouvent rien à redire à toutes les excentricités vestimentaires qui dégoulinent de nos sociétés d’argent facile ? Comme enseignante, bien des choses m’ont agacée, me demandant comment de jeunes cerveaux pouvaient être attentifs, tant des pieds à la tête l’imagination était sans limite. J’avais la courtoisie de me taire et de passer outre. L’enseignant est qqun qui projette l’avenir.
J’ai aussi entendu dire que des femmes féministes craignaient que le voile leur soit imposé, mais par qui, comment et pourquoi ? Faut pas délirer, quand même, là-dessus. Accompagner le parcours de qqun de différent, ce n’est pas d’avoir peur de devenir comme lui. Au contraire, c’est d’espérer avec la culture générale des prises de conscience.
C’est le seul point de votre exposé précédent pour lequel j’achoppe
3. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 2 novembre 2007, 09:01
Dans certains quartiers, dans certaines familles le voile est imposé. Les islamistes ne sont pas une vue de l’esprit de gens malade. S’il arrive au MRAP qu’on en parle il est rare que l’on écrive cela car on ne peut affirmer une telle causalité sans le prouver. Le but du MRAP n’est pas effectivement de conforter le délire parnoïaque issu de la diffusion du "Choc des civilisations" (SH)
Dans les pays du sud ou la religion fait corps avec l’Etat le voile est bel et bien imposé. Il faudrait ici relativiser le propos car les situations bougent favorablement mais vraiment très faiblement.
Vous avez raison de souligner qu’il n’y a pas que le voile en cause. Je renvoie à ma conclusion du texte posté tout en haut.
Sur la pédagogie nous ne sommes pas d’accord. Cela renvoie au fait que l’on ne saurait véritablement raciser les femmes voilées que si islam et voile ne faisait qu’un ; ce qui est faux. Le racisme anti-voile est un abus de langage.
Je l’explique ci-dessous :
UN SIMPLE FOULARD ? UN VULGAIRE FICHU ? ou AUTRE CHOSE... (GITE "JULIENRUPT" VOSGES) | 27 octobre 2007
– "DISCRIMINATION RELIGIEUSE"
Tel est le verdict du jugement du 9 octobre 2007 tranchant le conflit entre Horia DEMIATI musulmane voilée et Fany TRUCHELUT propriétaire du gite de Julienrupt dans les vosges. D’une part c’est une victoire contre le racisme qui frappe les musulmans, d’autre part la présence de l’objet-voile laisse planer une ambiguité, donc une insatisfaction. D’un côté un motif de contentement, de l’autre le sentiment de confusion. Car peut-on généraliser ce verdict de discrimination religieuse à chaque demande d’enlèvement du voile ou ce cas était-il particulier car le voile n’était que masque d’un racisme anti-musulman. Avec un contexte différent - épuisement de l’idéologie du ’choc des civilisations" - que va-t-on choisir comme positionnement ? Est-ce que l’on distinguera enfin la musulmane et sa religion ou le seul voile. Pout l’heure il semble bien qu’il faille recevoir les musulmanes voilées et donc éviter l’exclusion discrimination, mais rien n’empêche de dire nonobstant que le voile est honni . En effet le verdict aurait été différent si la musulmane ostensible avait été reçu dans le gîte mais en précisant que son accoutrement offensif indisposait ! Car on peut haïr les signes religieux trop ostensibles mais se garder de préconiser l’exclusion du travail ou du logement. Reste le problème de devoir travailler plusieurs heures et plusieur jours avec une femme voilée à ses côtés, qui est une situation jugée insupportable par beaucoup car ressentie comme une oppression religieuse plus pénible encore qu’un crucifix sur un mur.
– TRANSFORMER PAR LE LANGAGE LE COUTEAU EN PETITE CUILLERE
Du coup, sous l’effet de ce jugement, on contate paradoxalement un retour de textes banalisant le voile islamique . Pourtant le port d’un fichu ou d’un foulard ne pose de problème à personne y compris à la propriétaire du gîte vosgien. Je pourrais parier qu’elle a pu en mettre un dans les dix ans qui viennent de s’écouler. Pour ma part, j’avoue qu’il m’arrive de mettre un bonnet (quand il neige) et un casque (quand je suis en moto). Donc si l’on veut être sérieux, il faut bien dire qu’il s’agit d’autre chose. A partir du moment ou le voile est porté été comme hiver, dehors comme dedans ce n’est plus un simple fichu c’est autre chose.
NB : La "découverte" par le climat date de juin 1989 à Epinal (dans les Vosges déjà et encore)
L’ article de Ghislaine Ottenheimer (2) explique qu’à la faveur de récréations, alors qu’il faisait très chaud, la Directrice, voyant une fillette suer, lui aurait demandé de retirer son foulard, ce que la fillette refusa de faire. Au delà de l’anecdote[2], Ghislaine Ottenheimer insiste bien sur l’époque et sur le climat : « Mais de quel droit, sous quel prétexte s’offenser du port d’un couvre-chef quel qu’il soit, en plein hiver ? Là, à la faveur des premiers rayons de soleil, la directrice a testé le caractère emblématique et religieux de ce fichu. ». (archive MRAP)
I – ANALYSES CRITIQUES D’UN EMBLEME
A) DECONSTRUIRE
– DONC AUTRE CHOSE
Le voile islamique est outil de voilage et outil d’un certain islam. Il est d’une part un étendard pour l’extérieur et d’autre part pour de nombreuses féministes un instrument d’aliénation pour celles qui le portent. Cet outil de communication idéologique dit objectivement deux choses : je crois en Dieu, je crois en Dieu en permanence ce qui finit par insupporter. L’intolérance suscite le rejet. Il dit aussi je suis une femme respectable, ce qui signifie un double insulte :
– pour un femme sans voile : tu n’es qu’une femme-objet (pour s’en tenir à des termes neutres qui ne sont pas ceux ordinairement employés) ;
– pour les hommes : vous ne me verrez pas comme femme séduisante car vous êtes violeur ou du moins trop concupiscent pour me voire aussi comme être humain dans le même mouvement.
– L’AMALGAME D’UN CERTAIN ANTIRACISME
La phrase ci après montre que le travail de "désimbrication" n’a pas été suffisamment fait : "les personnes interrogées (9) qui adoptent des positions à la fois féministes et antiracistes sont celles qui s’opposent le plus à la loi (de mars 2004), qui refusent de la justifier au nom de la laïcité, de désigner l’Autre (ici les Musulman-e-s) comme différent et de le stigmatiser". Il ne faut en effet pas se tromper de stigmatisation.
Cependant, il y a un réel mensonge à amalgamer la critique et la phobie du voile islamique à la phobie de l’islam dans sa globalité. C’est le piège du "faux nez" (7). C’est contraire aux pratiques d’analyse que le MRAP met en oeuvre par ailleurs. D’une certaine manière on pratique ici ce que l’on critique sous le terme d’islamophobie ! On reste dans la prise de position inverse - technique classique du mauvais antiracisme de simple renversement - sans passer par la distinction.
Effectivement le MRAP dénonce à raison " l’amalgame entre islam -intégrisme -islamisme radical" avec pour exemple "l’affaire des bagagistes de Roissy qui se sont vu retirer leurs badges en raison de leurs pratique religieuse" (qui n’avait rien d’anti-laïque ou de sexiste). Effectivement, une argumentation historique et sociologique dès plus conséquente pèse pour dire que la phobie du voile PEUT cacher un racisme anti-musulman. Mais il n’y a pas de causalité automatique. Il importe de dire qu’il s’agit d’une possibilité de dérapage, d’une forte probabilité mais pas d’une nécessité absolue. De nombreux laïcs et de nombreux antisexistes ou féministes sont critiques et phobiques du voile sans être raciste . "N’allons pas dire - écrit Eric FASSIN - que les femmes des quartiers, en dénonçant la violence qu’elles subissent, ou les féministes laïques, en s’insurgeant contre l’oppression sexiste, sont racistes, ni même qu’elles ne sont que les alibis du racisme" (8)
B) RECONSTRUIRE
– PEDAGOGIE ANTIRACISTE : LES DISTINCTIONS A REPETER CONSTAMMENT
– De nombreux antiracistes critiquent le voile, ils le haïssent mais cela s’arrête strictement au voile. Autrement dit ce rejet ne porte ni sur la personne ni sur la religion. Donc pas sur l’Autre. La religion musulmane est diverses : certains religieux pensent que le voile est une obligation mais pas tous. L’islam d’emprisonnement et d’affichage offensif est très minoritaire en France : peu de jeunes filles et de femmes musulmanes portent le voile.
– En conséquence plutôt que de reprendre la distinction l’islam invisible et l’islam visible je distinguerais s’agissant des individus l’islam discret et pacifique d’un l’islam ostensible et offensif. A l’égard de ce dernier on ne saurait se montrer tolérant.. Il faut certes respecter la loi mais être aussi à l’offensive.
– LA PEDAGOGIE LAIQUE
A l’égard de l’islam discret et pacifique dans les relations interpersonnelles la rencontre est possible et même source de richesses. Par contre l
e signe religieux ostensible voile ou kippa est contraire à la mentalité laique qui se contente de signes discrets, ceux-ci manifestant un bon compromis entre liberté d’afficher sa religion sans oppresser l’autre. Le signe religieux discret symbolise le souci d’un espace pacifique, ce qui caractérise la laïcité. Comme le souligne le comité de Vitrolle du MRAP (1) un tel espace permet la rencontre sans que les croyances, restant intimes (ou du moins discrètes), soit un obstacle relationnel.
Un exemple de résistance anti-laïque : "Demander qu’on enlève le crucifix dans l’enceinte de l’Assemblée nationale du Québec, c’est méconnaître l’historicité des civilisations et réduire la laïcité à des gestes mesquins." Geste mesquin que de vouloir enlever un voile comme un crucifix ? Car un voile comme une croix ou une kippa çà s’enlève aisément. Il suffit d’adopter des signes discrets pour satisfaire la mentalité laïque et les critiques de nombreuses féministes. Parler de racisme anti-voile c’est, à la limite, ne pas comprendre ce qu’est le racisme réel, ce que subissent celles - ceux qui ne peuvent enlever tout qui les racise : cheveux frisés, peau mat ou noire, etc.... Et de plus, cela ne signifie pas mépris de la religion (que nous pouvons néanmoins critiquer) que les croyants peuvent pratiquer librement en respectant la législation sur la laïcité. Cela ne signifie pas acceptation des discriminations pour les croyances religieuses.
II – ANALYSE CRITIQUE DES AUTRES PRESUPPOSES
– SORTIR DE LA VISION DES TROIS COMMUNAUTES FONDAMENTALES
Dans une contribution au Monde Mouloud AOUNIT (3) écrit : "La France républicaine des années 2000 serait-elle composée de trois communautés, une majoritaire "catho-laïque" repliée sur elle-même, et deux minoritaires, juive et musulmane, qui seraient susceptibles de s’affronter à tout moment ?" Le propos vise à sortir la lutte antiraciste de la sectorisation de la tribalisation. Ce qui est positif.
Mais le même propos devrait conduire à une vision plus contrastée des processus de communautarisation. En fait il n’y a pas plus UNE communauté catho-laique unifiée qu’UNE communauté musulmane unifiée. On pourrait en dire de même pour les juifs de France. Sans doute y a-t-il des points communs qui justifient cette vision en trois communautés mais les différences voire les conflits internes semblent plus importants. Ce qui devrait inciter à relativiser la vision tricommunautaire bien rigide. D’autant que le fractionnement en de multiples sous communautés est renforcée par la diversité du religieux.
– PRENDRE ACTE DE LA DIVERSITE DES INTERPRETATIONS RELIGIEUSES
Quand on évoque le "retour du religieux" on oubli pour les trois grandes religions monothéistes que l’unanimité d’interprétation des textes et plus encore que l’uniformité dans la diffusion des normes et prescriptions religieuses est un mythe. Au-delà d’un corpus fondateur de chacune, on repère rapidement en quelque sorte des "théologies" dans chaque religion et les pratiques qui en sont issues sont encore plus diverses dans chaque religion. La diversité domine tant au plan historique qu’au plan géographique. On trouvera donc pour chaque religion toute la gamme des visions du monde allant du libéral progressiste acquis relativement à la laicité et à l’égalité des sexes aux visions réactionnaires, à l’intégrisme le plus violent.
– PRENDRE ACTE DES EFFETS D’INTEGRATION
Il faudrait ajouter certains effets de la logique républicaine d’intégration-assimilation qui quoi qu’on en pense (elle est passible de vives et justes critiques) vient renforcer la tendance à mentalité laïque.
La vision tricommunautaire qui est à l’arrière plan de « l’amalgame antiraciste » me semble donc obsolète.
Christian DELARUE
Addendum : - CIRCONSCRIRE L’OPPRESSION
Dire et répéter que le voile signifie, au-delà de la conscience de celle qui le porte, « oppression » (religieuse et/ou sexiste) doit s’accompagner d’un propos de prudence qui vise à relativiser "l’agression". Il faut ici promouvoir une sorte intelligence des rapports humains car il est facile de devenir soi-même oppresseur en luttant contre l’oppression. Au cas présent de devenir raciste islamophobe.
Pour être plus précis - vu mes responsabilités antiracistes - je ne voudrais pas être mal compris . Mon net rejet du voile ne m’empêche nullement de réagir quand par exemple un chauffeur de bus de ma ville interpelle de façon injurieuse une jeune femme voilée dans son bus. Pas d’injure aux jeunes filles voilées ! Le respect de l’humanité de la personne est de droit au-delà de ce qui nous heurte dans son comportement.
Quant à l’éventualité d’une loi sur l’interdiction des signes religieux ostensibles dans les lieux publics clos ceux ou l’on doit rester en permanence avec de tels individus offensifs, je renvoie au texte écrit sur ce sujet (5).
Notes :
1 cf. Différences n° 254 Article intitulé Laîcité, soupçons,tensions... Comment tenter de « désarmer Dieu ? »
2 cf. site MRAP rubrique archive sous rubrique voile
3 Contre l’antiracisme tribal, par Mouloud Aounit LE MONDE 15.06.06
http://www.mrap.fr/interventions/monde
4 Lire la suite sur sisyphe : Laïcité et accommodements raisonnables au Québec par Léon Ouaknine
http://sisyphe.org/article.php3?id_article=2752
5 Que penser, que proposer suite au verdict "julienrupt" (voile vosgien) sur ce blog
6 Lire aussi : Qu’est-ce que la laïcité ? par Bernard Teper du vendredi 19 octobre 2007
article publié dans la lettre 31
http://www.ufal.info/media_flash/1,article,181,,,,,_Qu-est-ce-que-la-laicite.htm
7 Gérard Bouvier, cité dans la presse avec ces propos : « Le tribunal ne s’est pas laissé abuser par les arguments pseudo-féministes et pseudo-laïcs avancés par Madame (...). Ces arguments sont un faux-nez derrière lequel on trouve un comportement raciste. » .
8 Eric FASSIN p 242 de "De la question sociale à la question raciale".
9 De l’affaire du voile à l’imbrication du sexisme et du racisme site du Mouvement des indigènes de la République
4. PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT., 3 novembre 2007, 13:17
Lak pose la question :
VOILE ET SEDUCTION
La séduction est un rapport spécifique de rencontre entre les femmes et les hommes. Le lien ou la rencontre est de l’ordre du sexué mais selon des codifications les plus variées. Dès qu’il y a séduction il y a initiative d’une femme à l’adresse d’un homme. Il y a pouvoir relatif exercé par une femme à l’égard d’un homme ou des hommes. Ce pouvoir peut être exercé malgré elle(s). Ce pouvoir peut faire peur à certains hommes.
Par ailleurs ce pouvoir s’exerce au sein d’un cadre plus ou moins codifié de ce qui est susceptible d’entraîner la séduction. Les femmes entrent peu ou prou dans un jeu de rôle qui est plus ou moins contraignants selon les sociétés. Les artifices de la séduction ne sont pas neutres dans des sociétés marquées par l’oppression des hommes sur les femmes .
– Le voile comme injonction de non séduction.
Mais dans les sociétés ouvertes et libres les femmes peuvent choisir néanmoins les artifices les moins contraignants . Elles peuvent aussi refuser totalement la séduction quand elles n’en n’ont plus envie . Mais la séduction reste de l’ordre du possible. En quelque sorte : "si je veux je peux". La séduction n’est donc pas totalement frappée d’interdit comme dans les sociétés ou l’islam rigoriste et pudibond donne aux femmes une injonction totale de non séduction et de voilage.
Le voile est en quelque sorte une critique radicale de la rencontre sexuelle passant par des artifices sociaux, des codes sociaux, des jeux (dont on sait qu’ils sont jeux d’excitation) . Le voile incite donc à n’avoir que des rencontres amicales ou du moins non sexuées d’être humain à être humain.
Certaines féministes radicales peuvent défendre le voile en ce sens . Quoique venant d’un patriarcat religieux très réactionnaire le voile correspond à une « injonction de non séduction » qui s’oppose à l’injonction publicitaire et marchande (une injonction très indirecte qui est loin de peser autant que les normes ancestrales religieuses de pudeur pour les femmes). Le voile étant porté de façon manifeste et permanente, c’est un outil militant idéal. C’est là un militantisme inespéré pour une minorité de féministes radicalement anti-séduction, celles qui voient la séduction comme une transformation de la femme en objet sans y voir aussi le sujet désirant (V DAOUST), une transformation qui n’est plus jeu maîtrisé entre individus libres mais aliénation totale et permanente.
En tant qu’homme qui apprécie le cas échéant la séduction je risque faire des propositions insuffisantes, c’est pourquoi je renvoie aux revendication féministes pro-sexe. Au cas précis, je crois important que les femmes soient libres d’entrer (ou non) dans le jeu de la séduction comme elles le veulent . Il faut militer pour qu’elles puissent aussi en sortir comme bon leur semble. Mais entre le refus pour soi de « l’injonction de séduire » et la manifestation militante d’un refus de la séduction entre les femmes et les hommes il y a une différence. Or au plan mondial cette idéologie rigoriste est mondiale. Ce n’est pas l’islam qui est en cause mais la conception de la sexualité qui est diffusée et quia pour arme le voile.
Le fond du fond reste que ce sont les hommes qui violent et qui insécurisent les femmes. Ce sont encore les hommes qui sont des « mecs lourds ». C’est pourquoi l’antisexisme est aussi la chose des hommes progressistes.
Christian DELARUE