Accueil > Alliance néo-sociale-démocrate ou union du peuple-classe face à leur crise

Alliance néo-sociale-démocrate ou union du peuple-classe face à leur crise

Publie le dimanche 30 novembre 2008 par Open-Publishing
1 commentaire

Alliance néo-sociale-démocrate ou union du (des) peuple(s)-classe face à leur crise mondialisée

Cette tâche d’union n’est pas nouvelle mais elle prend une acuité nouvelle en période de crise et de division des forces de transformation sociale dont certaines sont plus à la recherche d’une alliance de classe avec une fraction "sociale" de la bourgeoisie.

 Les possibles selon Gustave Massiah : Extrait de "Le mouvement altermondialiste et la crise de la mondialisation".

http://www.local.attac.org/35/Le-mouvement-altermondialiste-et.html

Plusieurs scénarios sont possibles à moyen terme, avec plusieurs variantes : un néolibéralisme conforté, une dominante néoconservatrice, une variante néokeynésienne. Une issue altermondialiste est très peu probable à court terme, les conditions politiques n’étant pas encore remplies ; mais le renforcement du mouvement altermondialiste pèsera sur les issues possibles. C’est dans les cinq à dix ans que se formalisera la nouvelle rationalité économique, comme le néolibéralisme s’est imposé, à partir de tendances existantes, entre 1979 et 1985. Il reste une discussion sur la suite de ce cycle à venir. Immanuel Wallerstein fait l’hypothèse d’un retournement du cycle séculaire, voire même multiséculaire, posant pour les trente ou quarante prochaines années, la question historique d’un dépassement du capitalisme et donnant ainsi une portée nouvelle à l’altermondialisme

1) LA CRISE EST MULTIPLE MAIS AUSSI PROFONDE ET DURABLE : ELLE EST GLOBALE ET SYSTÉMIQUE.

Note synthètique sur les interventions de Dominique Plihon et Michel Husson à Rennes fin novembre 2OO8

Michel Husson et Dominique Plihon deux économistes membres du conseil scientifique d’ATTAC, sont venus récemment à Rennes à quelques jours d’intervalle. Il est donc facile de faire des rapprochements. Voici quelques traits que je retiens de leurs exposés malgré les approches partiellement différentes ou des développements différents car l’un intervenait devant un public militant appelé par le groupe local Politis et l’autre appelé par ATTAC Rennes devant des citoyens soucieux de comprendre la crise. Le second débat a plus porté sur la titrisation ou les produits dérivés ou l’offre de crédits faciles à des populations "subprimes" (à haut risque) aus USA et la transformation, suite à la généralisation des saisies immobilières, de la crise du crédit en crise de la dette, etc.

La crise financière a démultipliée les effets des autres crises préexistantes - économique, sociale, écologique et finalement géopolitique - pour donner à la crise un aspect non seulement global et systémique car ces crises sont à la fois indépendante et reliée entre elles mais aussi durables. Ces deux aspects méritent développements. Le premier pour savoir quel capitalisme entre en crise, (puisque le capitalisme historique ne va pas mourir demain) le second pour prendre conscience que la crise est encore devant nous car l’opacité des mécanismes utilisés par la finance est telle que les experts sont incapables d’y voir clair sur ce qui s’est développé depuis des années. Un troisième aspect vient renforcer la gravité de cette crise systémique c’est son lieu géopolitique : il s’agit non pas d’une crise de la périphérie que l’on pourrait négliger avec cynisme mais d’une crise du "centre" qui a pour origine de développement la finance aux USA, dans l’Union européenne et au Japon. Il s’agit d’une crise du capitalisme financier de la Triade qui déploie ses effets contre ses propres peuples notamment les salariés mais aussi contre le reste du monde ; des effets qui porte aussi sur l’écologie de la planète. Nos analystes ne s’attendent donc pas à un retour à la normale avant plusieurs années. Même le pronostic est hasardeux.

Il y a consensus sur certaines solutions : si l’intervention gouvernementale massive dans l’économie est à l’ordre du jour certains la voie au plan européen et d’autres au plan national ou en articulant les deux espaces territoriaux. L’accord porte aussi sur la nécessité de mesures importantes à la hauteur des enjeux et non sur des "mesurettes" type G20 incapable de réduire la crise (cf JMH). Il s’agit aussi de faire vite mais de le faire t dans le bon sens notamment par rapport aux premières victimes qui sont les salariés licenciés et les salariés appauvris. Nos deux conférenciers ont en effet soulignés la baisse de la part des salaires par rapport aux profits dans de nombreux pays et depuis plusieurs années. Si les salaires n’augmentent pas non seulement les salariés vont souffrir mais encore "le capitalisme va s’autodétruire" (les deux ont évoqué le livre d’Artus et Virard) puisque les profits partent vers les hauts rendements de la finance et non vers l’investissement dans l’économie réelle ; puisque les bas salaires entraine la baisse de la consommation qui entraîne les faillites et les licenciements, qui viennent à leur tour renforcer la baisse de la consommation . Le fait que l’économie soit fondée sur la consommation à crédit bien plus que sur la production le risque de dépression est important. Michel Husson a de plus insisté sur la protection des travailleurs qui perdent leur emploi en défendant l’interdiction des licenciements et la réduction du temps de travail. Les pays qui ont bradé leur protection sociale vont plus souffrir que les autres. D’où la nécessaire défense de la gestion publique des biens publics.

Des biens publics on passe à la question du pôle financier public et des nationalisations des banques qui a été abordée in fine et trop brièvement pour une des deux réunions. Il s’agit de nationaliser aussi les avoirs et ce de façon non provisoire (1). Car, il faut passer dit Dominique Plihon à "l’euthanasie du rentier" (Keynes) ; autrement dit ce sont les actionnaires et dirigeants des banques qui devront subir les pertes, et non les ménages comme c’est le cas actuellement. Il y a aussi besoin d’une régulation publique européenne notamment pour tarir le marché des “credit default swaps” échangés irrationnellement entre les institutions financières pour les assurer mutuellement des pertes subies par les défauts de paiement . Une régulation publique européenne pour une autre BCE, non soumise au marché.

Un doute que je partage avec Michèle Brand (1) : "Prétendre éviter, par les réglementations, que les banques prennent des risques, n’a aucun sens : prendre des risques est dans la nature même des banques privées, puisque c’est dans le risque que réside le profit."

Pour un éclairage sur les expressions plus personnelles de chacun des auteurs, voici deux vidéos :

Michel Husson à La Rochelle.

http://hussonet.free.fr/rochelle.htm

Les alternatives en économie par Dominique Plihon - Fondation Gabriel Péri donc autre chose que son intervention rennaise.

http://www.gabrielperi.fr/spip.php?page=video&id_document=304&id_article=410

2 ) LES SUITES DE LEUR CRISE : LES POSSIBLES, LES CHOIX, FRONT OU ALLIANCES DE CLASSES ?

Rebond sur la conclusion de Gustave Massiah (même texte que celui cité en introduction) . Gus dit : Il permet de lutter contre l’alliance possible entre les néolibéraux et les néokeynésiens en poussant les résistances et les revendications pour la modernisation sociale. Il permet de pousser le néokeynésiannisme radical dans ses limites. Il permet d’esquisser les alternatives qui caractériseront un autre monde possible. Mais il faut aller plus loin. Après tout, si le capitalisme n’est pas éternel, la question de son dépassement peut être d’actualité. Et nous pourrions commencer dès maintenant à revendiquer et à construire un autre monde possible

 La critique de la politique sociale-démocrate ou que faire face au capitalisme structurel, celui des temps pluriséculaire ?

La crise systémique met à l’ordre du jour la formule de Lénine sur la contradiction majeure à l’origine de la crise révolutionnaire (qui elle aussi est durable) : quand ceux d’en-haut ne peuvent plus dominer comme avant et ceux d’en-bas ne veulent plus subir comme avant. La question de l’unité du peuple-classe est donc à l’ordre du jour pour réaliser sa propre émancipation et à travers elle l’émancipation de l’humanité. Je prends là une hypothèse théorique et pratique qui n’épuise pas les possibles car l’option social-démocrate (portée par le nouveau parti de Mélanchon-Dolez et une fraction du PCF) incline à ne pas attendre l’unité de ce peuple-classe avant de travailler à la scission des élites en vue de dégager une fraction progressiste susceptible d’animer sur le long terme un régime économico-social néo-kenésien plus favorable aux travailleurs et au peuple-classe. Cela recoupe un débat qui se nommait jadis "front unique ouvrier (FUO) ou hégémonie" (cf .Stratégie et Parti publié en mai 1987 par La Brèche coll Racine ).

La conception du capitalisme financier comme phase contemporaine en cours d’extinction est liée à l’idée que le capitalisme structurel existe et perdure car lui est solide et installé depuis très longtemps (XVI ème siècle). Chez certains membres d’ATTAC, il y a donc l’idée que le capitalisme est quasiment indestructible et qu’il est toujours pour reprendre la formule de Jean-Paul HUCHON (sauf erreur) et du PS du congrès de l’Arche "l’horizon indépassable de notre temps". Ou comment retomber sur ses pieds pour promouvoir un néo-keynésianisme, c’est à dire une politique social-démocrate d’alliance avec une fraction "progressiste" de la bourgeoisie . Celle qui voudrait refonder "un capitalisme régulé" social et écologique sans attendre d’unir le peuple-classe en vu du socialisme possible (2).

Dans tout ce propos il y a un oubli, les révolutions du XX ème siècle qui dans leur bégaiements ont quand même montré qu’autre chose était possible. Si pour moi le communisme est une utopie (3) le socialisme est bien la perspective du XXI ème siècle, car il est réalisable. Réalisable car l’Etat est toujours présent quoique profondément changé et que parallèlement l’autogestion partout n’existe pas. Par contre les salariés interviennent dans les entreprises, les citoyens interviennent dans les choix de planification pour un alterdéveloppement des valeurs d’usage grâce à la gestion publique des biens publics, les services publics non marchand étant la force motrice du néo-socialisme. Cette intervention caractérise l’alterdémocratie, soit un état de la participation du peuple-classe sans aucun rapport avec la misère démocratique existante. Une telle démocratie socialiste suppose de libérer la force de travail des longues journées de travail et de son complément de reconstitution dans la télé-divertissement ou la consommation addictive. Ce néo-socialisme est clairement laic et combat le sexisme, le racisme ainsi que le gaspillage des ressources naturelles. C’est un écosocialisme qui épanouie la civilisation humaine contre la barbarie.

 Qui doit travailler à cette unité du peuple-classe et comment ?

Toutes les forces politiques de "gauche" sont requises mais aussi les syndicats et les associations. Evidemment il ne faut pas perdre de vu que certains acteurs sont plus pressés d’aboutir à des compromis en vu de stabiliser une micro conquête mais qui à mon sens freine surtout l’unité du peuple-classe. Sur le fond un auteur a récemment abordé la question alors autant lui donner la parole in extenso : Jacques Bidet dans "Unir le peuple pour gagner à gauche" paru dans l’Humanité en novembre 2008 (4).

Christian Delarue
membre du CA d’ ATTAC France

Notes :

1) Que faire face à la crise financière ? Nationaliser le secteur bancaire ! Par Michèle Brand
http://www.mouvements.info/spip.php?article335

2) En finir avec ce capitalisme, ouvrir des perspectives vers le socialisme - C Delarue

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article434
et
Vers un néosocialisme vert : Etendre le marché ou le circonscrire ? - C Delarue

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article354

3) Une critique socialiste du texte de L Sève sur le communisme - C Delarue

http://www.legrandsoir.info/spip.php?article7320

4) Stratégie sociale et politique : unir le peuple-classe
Une introduction à un texte de Jacques Bidet qui développe l’union du peuple en fonction de sa propre conception des rapports sociaux "croisés" avec les rapports politiques.

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article472

[Amitié entre les peuples] Le peuple-classe, une catégorie intermédiaire - C Delarue

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article463

Comprendre la crise, par Isaac JOSHUA

http://bridge.over-blog.org/article-23584097-6.html

Messages

  • Le peuple-classe, une notion "anarchiste" ?

    Oui et non. En l’espèce, au-delà de l’invective, l’auteur critiquait la notion de peuple-classe comme participant au rabaissement du fait démocratique. La notion de peuple-classe que j’ai mis en valeur (1) se comprend peut-être mieux en lien avec l’idée de peuple-nation. Je renvoie donc aux textes qui explicitent ces problématiques.

    Le peuple-classe, une catégorie intermédiaire - C Delarue (ce lien renvoi aux autres textes)

    http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article463

    Rien de complexe à lire ici à mon sens. Et ces catégories, à l’articulation du social et du politique, me semblent opératoires à la fois pour les partisans et les détracteurs du peuple-classe, donc bien en-deçà d’une sollicitation maximaliste.

    Le message reçu affirme, pour le déplorer, que cette notion est dangereuse car elle opère un rabaissement du fait démocratique et citoyen et plus globalement de la nation à une époque ou la mondialisation tend à :fortement à détruire ces vecteurs d’émancipation . Tel est dans ses grandes lignes le reproche adressé à la notion de peuple-classe telle que développée dans "Pour une approche du peuple-classe". Une notion qui se comprend peut-être mieux en lien avec l’idée de peuple-nation. Je renvoie donc aux deux textes qui explicitent ces problématiques. Rien de complexe à lire à mon sens. Et ces catégories à l’articulation du social et du politique sont opératoires à la fois pour les partisans et les détracteurs du peuple-classe. Dans une compréhension dynamique et politique on peut y lire une portée collective-autogestionnaire. Mais son usage ne s’inscrit pas nécessairement dans cette perspective.

     Y-a-t-il une sous-estimation du fait citoyen dans la notion de peuple-classe ?

    Le peuple-classe a vocation à former une communauté politique. Cela survient ou surgit en de rares périodes de l’histoire des peuples au sens large (peuple-nation). Une communauté politique digne de ce nom fonctionne sous des modalités fort différentes de celle de la démocratie libérale qui connait un régime restreint de la participation citoyenne. Je renvoie à des développements sur l’alterdémocratie (2). Pour autant, les élections ne sont pas qu’une formalité mais ces dernières ne disent pas tout du peuple et de son ascension car les élections sont ambivalentes, certes source d’émancipation très contenue mais aussi de dépossession le reste du temps. Cette ambivalence est donc réelle dans les démocraties libérales réellement existantes. On pourrait même soutenir que la dynamique démocratique y est enfermée par le carcan du système démocratique restreint . Le peuple-classe sous le régime de la démocratie libérale est structurellement rabaissé, dominé, renvoyé soit dans ses foyers soit à l’usine ou au bureau et dans les deux cas loin des lieux de décision. Il n’est donc pas souverain, ou rarement, mais soumis. Pour autant la "raison démocratique" n’est pas bradée et encore moins la question de la souveraineté du peuple-classe et donc les moyens de son accès qui passent par son unification, une unification différente de celle fréquemment invoquée a propos du peuple-nation autour des élites couches d’appui de la bourgeoisie. Le front uni du peuple-classe ce n’est donc pas l’alliance de ce peuple avec la bourgeoisie au sein du peuple-nation ou tous les chats sont gris.

    Pour reprendre les grandes lignes des propos d’André Bellon et Anne-Cécile Robert (3) je dirais du peuple-classe qu’il "marque le retour du peuple" en vue son "expression autonome" alors que les élités et l’oligarchie néolibérale s’emploie à "cacher ce peuple que l’on ne saurait voir" . Ils veulent cacher le peuple-classe sous le voile d’un peuple-nation qui se montre accommodant pour ceux qui brade la volonté populaire. Quand le peuple est exhibé c’est pour le réduire aux couches sociales populaires entendez par là les ouvriers et les employés auquels on ajoute les chômeurs. Autrement dit le peuple est reconnu que pour attirer les couches moyennes - techniciens, cadres moyens, cadres supérieurs vers les sommets de la société dans un bloc hégémonique qui se délite du fait de l’écart énorme entre la couche de la bourgeoisie financière qui accumule les profits et les richesses alors que le niveau des couches moyennes supérieures ne cessent de décliner .

    Christian Delarue

    1) Si Abraham LEON a employé le terme, ainsi que me l’a fait remarqué récemment Pierre Ruscassie, c’est dans un autre contexte et un autre sens (celui de "caste") et pour un autre but (question de la permanence de "l’identité" juive à travers le temps). Et depuis, à ma connaissance, la notion n’a guère été mobilisée, encore moins hors du champs de "la question juive". Il s’agit donc plus que d’une mise en valeur ou d’une réactualisation.

    2) DEUX CONCEPTIONS DE "L’AUTRE DEMOCRATIE" - C Delarue

    De l’alterdémocratie "de complément" à l’alterdémocratie "globale" et alternative

    http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article218

    3) in "Le peuple inattendu" Syllepse2003