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Autorité indépendante de lutte contre les discriminations - Réaction du MRAP
Publie le lundi 22 mai 2006 par Open-PublishingAutorité indépendante de lutte contre les discriminations
Réaction du MRAP au Rapport annuel 2005 - 22 mai 2006
Le MRAP revendiquait depuis 1999 la création d’une autorité indépendante de lutte contre les discriminations racistes. Cette création était imposée par l’ampleur du phénomène et par une directive européenne (directive 2000/43 du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe d’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique). Nous avons travaillé, au sein du « collectif pour une autorité indépendante de lutte contre les discriminations » pour que celle-ci ait de réels pouvoirs, de réels moyens, et soit réellement efficace pour faire reculer les discriminations.
Nous ne pouvons donc que nous réjouir de l’existence de cet organisme et de sa première année d’existence, même si, au regard du premier bilan présenté par L. Schweitzer, beaucoup reste encore à faire.
Si l’activité de l’année 2005 a principalement été tournée vers le traitement de saisines individuelles, elle a aussi permis d’élaborer des propositions très concrètes pour intervenir sur des discriminations systémiques, en particulier les suites données par la HALDE aux 2 dossiers dont le MRAP l’avait saisie :
– Le décret qui retirait le droit de vote aux élections des Chambres de métiers aux artisans non européens : la HALDE a recommandé sa suppression
– Inégalités de traitement concernant les médecins étrangers : la HALDE a recommandé une égalité de rémunération, et une reconnaissance des expériences acquises dans les hôpitaux français. La question générale des personnels de santé et des enseignants devra aussi être traitée par la HALDE.
Il reste de très nombreuses évolutions nécessaires, et un travail important de propositions et recommandations pour changer les pratiques qui conduisent, de manière volontaire ou non, à des discriminations. Si les discriminations racistes représentent 40% des saisines, c’est parce qu’un travail en amont a été réalisé de longue date par les associations et les institutions pour réagir à ces faits inacceptables. Mais, comme nous l’indique ce premier bilan, un énorme travail reste à faire pour que la société vive de manière positive la diversité, et qu’une réelle égalité de traitement existe concernant l’accès à l’emploi, au logement, aux services publics et aux loisirs.
Si les médiations et les recommandations sont utiles, nous nous inquiétons du faible nombre de saisines de la justice, et nous craignons que la possibilité donnée à la HALDE par la loi sur l’égalité des chances de prononcer des amendes, ait pour effet une dépénalisation des discriminations. Nous attendons que de nombreuses condamnations au caractère exemplaire puissent être prononcées par la justice, et aient pour effet de casser le sentiment d’impunité actuel.
Alors que l’existence de l’Autorité est encore peu connue, et que le développement de sa notoriété devrait avoir pour effet une augmentation importante des sollicitations, des moyens humains et matériels importants devront être déployés pour donner des réponses à tous dans des délais raisonnables. Car il est évident que le nombre de saisines est très endeça de la réalité des discriminations, et que le fatalisme des victimes ne doit pas perdurer.
Une véritable campagne d’information sur l’existence de la HALDE est nécessaire afin que tous soient informés de son existence, de son rôle et des modalités de sa saisine.
L’Etat doit mettre en place le plus rapidement possible des structures d’accueil, d’information et d’aide à la rédaction des saisines des victimes. Il doit également soutenir le travail des associations qui oeuvrent dans ce domaine depuis de nombreuses années.
Le rôle de ces associations dans la lutte contre les discriminations doit rester central, comme le préconise le rapport de la CNCDH du 21 mars. Nous souhaitons que de véritables échanges et partenariats soient mis en place, pour que l’information circule mieux entre les associations et l’Autorité dans le cadre de saisines individuelles, mais aussi pour l’élaboration de réponses systémiques. Le rôle des délégués départementaux est dans ce domaine primordial, doit se développer, et nous attendons avec intérêt le résultat de l’expérience lancée dans quelques départements.
Nous regrettons de constater que le champ de l’Autorité ne lui permette pas d’intervenir en matière de propos et de violences racistes, et en particulier en matière de violences policières.
Nous nous étonnons du satisfecit donné à de grandes entreprises, et appelons à la prudence car les grandes annonces doivent trouver une application réelle et concrète sur le terrain.
Une attention particulière devra être portée aux services publics, notamment à l’application de la Charte d’accueil de tous les publics.
Nous attirons en particulier l’attention de la HALDE sur le traitement discriminatoire des étrangers demandeurs de séjour dans les tribunaux du 35bis.
Nous souhaitons que la HALDE prenne position, comme l’avait fait le GELD, sur la discrimination légale des emplois réservés aux européens : l’état et les grandes entreprises publiques doivent montrer l’exemple, en rétablissant un égal accès des emplois à tous, quel que soit l’origine, comme l’a fait la RATP.
Nous nous étonnons qu’aucune information ne soit donnée quant aux travaux du Conseil consultatif et à ses recommandations.
Nous restons dans l’expectative quant aux propositions de l’Autorité en matière de campagnes de communication en faveur d’une égalité des droits réelle pour tous.