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DONNER ENVIE.
POUR QUOI, COMMENT DONNER ENVIE.
Donner envie dit-on aujourd’hui….
Il n’est pas prioritaire de donner envie. Nos concitoyens salariés, immigrés, ouvriers, femmes, jeunes ou au soir de la vie sont pleins de désirs et d’envies. Ce dont ils ont besoin prioritairement c’est d’ordonner, d’organiser leurs désirs, de leur donner cohérence.
D’abord comprendre que nos désirs ne naissent pas de rien, comme par miracle, mais de besoins qu’une société humaine de plus en plus complexe, de plus en plus développée, rend eux-mêmes de plus en plus complexes, mais dont les bases biologiques sont évidentes.
Ensuite comprendre que pour satisfaire nos désirs « satisfaisables », et cela ne les réduit pas, au contraire, il ne suffit pas de s’attaquer aux effets (baisse du pouvoir d’achat, temps libre massacré, licenciements, nature massacrée, libertés …), mais comprendre les causes et agir sur les causes :
Le capital transforme toutes les valeurs d’usage (objets courants que l’on consomme, travail que l’on vend…). Elles sont transformées en valeurs d’échange dans une circulation générale et mondiale en aliénant l’activité humaine.
Malgré l’immensité de la progression des capacités de la production humaine, tous les surproduits du travail sont transférés à la limite du crash et jusqu ‘au crash, vers la collecte de profit sans lequel la circulation capitaliste ne peut être.
La puissance de cette collecte, dans la société marchande millénaire est propre au capitalisme développé et ses lois dans le processus atteint aujourd’hui et qui ne peut faire de « marche arrière » sinon à détruire la société humaine en partie ou totalement. Je vous renvoie à l’étude et non au survol de « Das Capital » de Karl Marx.
Et en particulier à l’inversion de l’échange A-M-A’ pour toute marchandise valeur d’usage transformée en valeur d’échange, marchandise travail marchandise activité humaine compris.
La circulation capitaliste s’oppose en fait aux échanges humains. Elle est en contradiction mortelle avec le besoin de circulation des produits du travail. Cela c’est la cause. Si l’on se contente des effets, nous en serons toujours et de plus en plus à un catalogue de revendications irréalisées et à un programme de Gotha.
La circulation capitaliste a besoin de la croissance et en même temps s’oppose à la croissance et surtout à la qualité de la croissance.
L’action micro pour la transformation du travail et de l’activité humaine, respect et cohérence, doit avoir pour corollaire l’échange macro, les grands échanges mondiaux, internationaux, sur la base de la valeur d’usage c’est-à-dire des besoins. Ce qui implique une relative stabilité des échanges et des conditions de l’échange, un développement raisonné, contracté dans les échanges entre les entités humaines. La mesure quantitative de la valeur d’échange marchand est de plus en plus obsolète. Je vous renvoie à « Le paradigme ergologique » d’Yves Schwartz.
L’échange (et sa mesure) demande une transformation qualitative.
Après, comment atteindre cette transformation ?
Il est évident que des millénaires de société de classe pèsent sur les concepts et la psychologie des exploités eux-mêmes.
Pendant toute la période des sociétés de classe et aujourd’hui même, l’accès à la liberté passe par l’accession aux couches dominantes par des individus de couches dominées. Liberté illusoire mais en tout cas libération relative des douleurs des besoins insatisfaits.
L’humanisme chrétien lui-même hésite entre ses origines contestataires de la société de classe et un conservatisme illusoire de la paix civile au prix de la soumission à perpétuité. C’est la domination de classe qui est la violence et non la lutte de classe qui y répond.
Et Le Vatican comme les religions en général jouent ce rôle de détournement de l’humanisme chrétien mis au service des dominants, avec des variations correspondant aux modifications des rapports de forces dominants-dominés auxquels les croyants sont mêlés. Je vous revoie à « L’athéisme dans le christianisme » d’Ernst Bloch. Et à l’étude du « Rôle de la violence dans l’histoire » de Marx qui est une arme pour la paix, pas la Pax Romana, mais la paix basée sur une coopération humaine généralisée devenue de plus en plus nécessaire et de plus en plus possible.
Ce qui rend possible une société sans classe et non une tyrannie historiquement « déterminée » soeur ennemie de la société de classe qui se contestent mutuellement, c’est l’entrée massive des humains dans le salariat à condition qu’ils contestent l’état salarié massivement.
Le contre feux Mitterandien aux objectifs recherchés par le programme commun, qui se poursuit encore aujourd’hui dans le P.S. et ailleurs, consistant à intégrer le programme commun pour mieux les combattre, le rôle de l’humanisme bêlant de ceux qui rejoignent les dominants à la fois par crainte et par intérêt personnel, illustre politiquement et philosophiquement la bataille de l’abolition de l’Etat de classe qui passe par l’hégémonie provisoire du salariat et son auto abolition. Ce qui est très différent de « l’auto-destruction de la classe ouvrière » vue comme l’effet négatif d’auto effacement d’elle-même face à l’action des dominants. C’est même le contraire.
Ces contre-feux conservateurs s’appellent aussi, à la fois volontairement et à la fois à leur corps défendant (ainsi vont les contradictions), Aron, Rocard, Fessard, Bourdieu dans ses primes relations amicales avec Aron (surprenant, non ? Moi j’aime Bourdieu), Foucault, Arendt….Ils ne sont pas tous du même « type », mais ils contiennent tous à un moment plus ou moins marqué (pour Aron, c’est une vie) ce conservatisme qui nous habite, pourtant dans « l’absolu » contradictoire avec l’anti-nazisme ou l’anti-colonialisme exprimés par plusieurs de ces noms.
Aron reconnaissait en 1975 la baisse tendancielle du taux de profit pour les 25 années suivantes, sans reconnaître son essence capitaliste. Il reconnaissait les luttes de classe mais contestait leur essence en matière de processus social. Il avait l’oreille des Etats et organismes du capital. Et fondamentalement ses positions contre « les utopies communistes » s’appuyaient sur un christianisme conservateur à la différence d’une Simone Weil qui malgré ses errements humains ordinaires retournait systématiquement vers la solidarité avec les exploités, au prix de son confort et plus que cela encore, comme dans tout engagement réel.
Il ne s’agit pas ici de stigmatiser mais de voir le rôle des idées dominantes millénaires sur nous-mêmes.
L’on voit bien dans ces exemples, positivement ou négativement le rôle créateur d’histoire des concepts, leur utilisation de la recherche à l’application, de la philosophie à la politique.
Pour ce qui est de la critique des concepts, je vous renvoie au « Concepts d’histoire » de Walter Benjamin
Et à la « Métaphilosophie » d’Henri Lefebvre, particulièrement sur le structuralisme.
Pour ce qui est du concept d’Aron sur l’usage du langage de classe par le salariat en voie de libération qui détournerait les chrétiens du christianisme (moi je dirai du conservatisme se réclamant du christianisme, que l’on retrouve dans tout dogme y compris se réclamant de la laïcité), je vous renvoie à l’usage progressiste inverse de ce concept dans « Pensée et langage » de Vygotski.
Il y a cependant face aux conservatismes philosophiques et politiques une fidélité à la libération humaine qui consiste à ne rien céder aux dominants, même si les dominés sont aussi tenus, pour survivre, à négocier les marges de manœuvres avec les dominants. Lorsqu’on tente de s’en tenir à cette fidélité intelligente, en mouvement, nous réussissons à abandonner relativement les errements auxquels sont soumis les humains dans leur approche de la santé de leur espèce. La vie inclut la maladie mais la santé est nécessaire à la survie. Et la vie a besoins du développement de la conscience de la nature sur elle-même que constitue l’humanité.
Nous partons souvent, preux chevalier, dans les combats généreux. J’en suis et j’en serai encore, je l’espère.
Mais il nous faut encore avoir l’intelligence tactique et stratégique, dans le quotidien, le long et le très long terme. C’est l’avenir qui préoccupe l’humain, de l’avenir le plus quotidien à l’avenir le plus énigmatique. Quand au présent nous ne le connaissons que par le passé, une fois l’immédiateté passée. La dialectique c’est ce jeu difficile d’aller-retour avec pour arme l’accumulation des perceptions, avec les outils scientifiques de la perception et de sa conceptualisation qui rendent notre intuition fine ou grossière, tout dépend de leur usage.
Pierre Assante Cassandre, 24 janv. 10
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