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EXPRESSION du COLLECTIF UFAS PREVENTION SPECIALISEE (réuni le 04.11.05)

Publie le jeudi 10 novembre 2005 par Open-Publishing
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Depuis plusieurs jours voire semaines les quartiers brûlent, donnant l’impression d’une guérilla urbaine aux portes de Paris. Les médias se font échos de ces évènements semblant découvrir par là même, la vie de ces quartiers laissés pour compte le restant de l’année. La politique de provocation qui consiste à envahir le territoire par les forces de l’ordre ne fait qu’attiser les braises ; elle semble entretenir des tensions qui justifieraient des positions
politiques pour d’éventuels candidats aux présidentielles. Les voitures, les poubelles brûlent régulièrement dans les banlieues, loin de banaliser ces actes, nous nous heurtons aujourd’hui à une situation plus complexe.

Dans une société où l’image est au coeur de toute forme de communication : « il vaut mieux une mauvaise image que pas d’image du tout ! », ce qui conduit inévitablement à un enchaînement de violences dans toute la France. S’il existe une grande précarité dans les cités, il ne faut pas à nouveau faire l’erreur de stigmatiser l’ensemble des jeunes qui y vivent. Ces actes ne sont pas toujours posés par les plus démunis, certains en sont eux mêmes victimes.

Même si beaucoup pensent qu’au fond le mal être est plus profond qu’il n’y paraît, résultant d’un phénomène de cumul ; la précarité est installée et le pire est à craindre.

L’ensemble des services de villes est fragilisé avec, pour corrélation, une perte de sens de l’ensemble des institutions. Le manque de propositions concrètes, le turn over important dans les établissements scolaires et les services administratifs fragilisent la cohérence, la continuité du lien avec la population.
L’échec de la politique de la ville dans de nombreux départements fait symptôme d’un mal de vivre profond qui ne touche pas uniquement les jeunes. La paupérisation de la population est grandissante, le pouvoir d’achat diminue, la notion de travail perd du sens. En effet, si les jeunes se construisent sur un modèle, il est fort de constater que le travail n’est plus une référence étant donné qu’il ne concerne déjà plus l’ensemble des adultes. La difficulté de
nouer des relations entre les différents acteurs ne fait que renforcer l’isolement des personnes.

Mais au fond, ce n’est finalement que le reflet d’une société en déficit de projets. Le déficit des politiques pour l’accès à l’emploi, l’accès à l’éducation, aux logements laisse peu de perspectives aux jeunes.

De plus, l’échec scolaire et le manque d’orientation limitent la vision que peut avoir la jeunesse dans sa vie professionnelle. Les enquêtes soulignent une augmentation de 10 % des conduites à risque chez les jeunes.

Nous nous devons de proposer un projet de vie, un projet sociétal à la jeunesse et à la population. Les missions de la prévention spécialisée consistent à aller à la rencontre de jeunes dans leur environnement, en rupture ou en phase de rupture avec les systèmes et les institutions de droits communs. L’éducation spécialisée c’est aussi prévenir des phénomènes d’inadaptation sociale sur un territoire donné. Les éducateurs s’inscrivent dans une régularité du lien avec les jeunes et les différents partenaires. Cet accompagnement s’inscrit dans la
durée, par conséquent, il est évident, que ce travail de fond est moins spectaculaire que les actes sécuritaires. Actes qui ne diminuent que temporairement les statistiques mais qui ne règlent en rien les problèmes de fond.

Il ne faut pourtant pas jouer la même carte que celle des hommes politiques, lesquels opposent systématiquement les acteurs de terrain en pensant qu’une seule et unique méthode permettraient de résoudre les problématiques des cités . Problématiques qui sont le cumul de plusieurs années d’échec et d’absence de position et de propositions de ces mêmes politiques.

Les éducateurs ne sont pas épargnés par la précarisation de la population : le pouvoir d’achat diminue, leur possibilité d’accéder aux logements devient problématique, comme d’ailleurs l’ensemble des personnes qui ont en gestion l’humain, à savoir les infirmières, les psychologues... Ces métiers résultent d’un engagement des personnes, d’une disponibilité et d’une écoute de l’ensemble des maux de notre société.

Aujourd’hui la tâche est rude car nous nous heurtons aux limites d’un système qui ne nous permet pas de trouver des solutions ou des pistes pour accompagner ces jeunes. En effet, lorsque nous les accueillons pour un accès au logement, il nous est de plus en plus difficile voire impossible de les diriger vers un début de solution. Il en va de même pour ce qui est de l’orientation professionnelle, en effet, qui en tant qu’employeur souhaite prendre le risque et
le temps nécessaire d’accompagner le jeune dans un cursus de formation ? Il s’agit aujourd’hui de prendre ensemble nos responsabilités or, la quasi-totalité des acteurs sont entendus sauf les travailleurs sociaux !... Est-ce une volonté ou un oubli ?

Parallèlement à ces évènements, les syndicats patronaux décident de remettre en cause leur convention collective du travail (du 15/301966), à savoir les conditions de travail des salariés régis par cette même convention. Ils proposent une prime au mérite, un déroulement de carrière qui pénalise les salariés de 40% de leur ancienneté. L’accès à la formation des travailleurs sociaux se fait dans des conditions précaires. Souvenons-nous que les cours
d’emploi ont été supprimés alors qu’ils permettaient une formation dans des conditions respectables pour le futur travailleur social.

Montreuil, le 9 11 05.

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