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Forza Italia : Un parti de fidèles. Fidèles au Cavaliere

Publie le mardi 27 janvier 2004 par Open-Publishing

Forza Italia est la seule organisation politique vraiment nationale. Son liant
est Silvio Berlusconi. Du Nord au Sud de l’Italie. La radiographie des azzurri
est dans le dernier livre de Diamanti : un électorat stable, répandu dans toutes
les régions, dont le catalyseur est l’image gagnante du chef.

Des dirigeants locaux, des conseilleurs régionaux, des députés et des ministres
débarqués en direct de la DC et du PSI, une marée de jeunes méridionaux en quête
de travail et une troupe tout aussi nombreuse de messieurs du Nord, plus mûrs,
au bord de la retraite. Et des femmes à la maison, naturellement. L’Italie azzurra
qui fête aujourd’hui ses dix premières années est à première vue un méli-mélo
indéchiffrable et précaire. Mais si on la regarde de plus près, comme le fait
Ilvo Diamanti, on peut découvrir, amèrement, qu’il ne sera pas facile du tout
de défaire les fils qui la tiennent ensemble.

Car s’il est vrai que le cœur de tout ce monde bat toujours et seulement pour
le leader, l’électorat magmatique de Silvio Berlusconi est beaucoup plus stable
qu’à ce qu’il paraît. Et surtout plus fidèle, puisque aux élections politiques
de mai 2001, 84% de ceux qui l’avaient déjà fait en 1996 ont voté pour Forza
Italia. Un choix d’une cohérence rare, à une époque où tout le monde semble déraper.
Refondation communiste ne garde que 59% de ses électeurs, les Démocrates de gauche
63%, Alliance nationale 76% et la Ligue, avec son 39%, touche à sa fin. Un des
atouts des azzurri est en réalité précisément leur étrange configuration, comme
l’expliquent les cartes électorales de Diamanti dans son dernier livre ("Bianco,
rosso, verde e azzurro", édité par Il Mulino). A une époque où la politique s’éloigne
de plus en plus du territoire dont elle s’était nourrie pendant cinquante ans,
Forza Italia se présente comme le premier parti pleinement "national".

Elle laisse la gauche se retrancher dans ses zones rouges, abandonne dans les
bras de la Ligue le cœur de ce qui était jadis la zone blanche et part à la chasse
de ses électeurs ailleurs. Dans la riche Lombardie, dans le nord ouest, comme
dans la Sicile, éternellement isolée. Et c’est ici que, dès 1994, Silvio Berlusconi
conquiert une grande partie de ses voix. Et il les garde, même quand il est chassé à l’opposition.
Au total, les provinces italiennes où les azzurri font mouche sont 34 : entre
1994 et 2001, ils y deviennent au moins une fois le premier parti, en gardant
après, dans une des tournées électorales suivantes, la deuxième position. En
chiffrant tout cela, dans l’Italie azzurra vivent 23 millions de personnes, c’est-à-dire
40% de la population. Mais plutôt que devant l’émersion d’un pays nouveau, comme
le souligne Diamanti, nous sommes en face d’un archipel. Ou même d’une "chaîne
d’archipels", de lieux souvent très différents, qui ne sont pas que géographiquement
distants entre eux.

La contradiction la plus grinçante est sûrement entre les électeurs azzurri du
Sud et ceux du Nord. En fait parmi les premiers, décidément plus jeunes, la classe
moyenne salariée (surtout de la fonction publique), les femmes sans profession
et les étudiants sont la majorité. Tout au contraire de ce qu’il arrive au Nord,
où l’électorat de Silvio Berlusconi, plus âgé, est plein de commerçants, d’artisans,
d’entrepreneurs et de retraités. Mais aux distances démographiques correspondent
aussi des différences plus difficiles à gérer politiquement. Car les jeunes et
les moins jeunes du Sud demandent des politiques pour l’emploi (59,6% le considère
comme le problème le plus important), tandis que leurs frères du Nord sont angoissés
surtout par la criminalité (première au classement avec 25,4 %). Selon les dires
de Diamanti, ce qui fait surface est l’"insécurité personnelle et la demande
d’efficacité économique au Nord, la demande de tutelle et de protection sociale
au Sud". Pourquoi alors choisir le même parti au moment du vote ?

Plutôt qu’à un programme politique, les azzurri semblent en réalité répondre à un
sentiment. Avant tout la passion pour leur leader, qui durera tant qu’il saura
cultiver son interprétation du mythe de l’homme à succès. Mais peut-être y a-t-il
aussi un sentiment d’égalité lié à une dimension "périphérique"commune - cette
fois la définition est de Pierluigi Corbetta - . Géographique, générationnelle,
sociale, culturelle, mais aussi et surtout politique. C’est un peuple de téléphages
(36% regarde la TV plus de 4 heures par jour, contre une moyenne de 20%) précisément
parce qu’en font partie tous ceux qui participent moins à la vie relationnelle
et sociale italienne. La probabilité de devenir un électeur azzurro diminue,
par exemple, de 40% parmi ceux qui discutent tous les jours de politique, de
30% parmi ceux qui participent à des réunions ou à des manifestations et de 20%
parmi les adhérents d’une des milliers d’associations de notre pays.

Si on associe à ce sentiment commun la puissance médiatique de Silvio Berlusconi,
la force d’un parti fait de network locaux consolidés et un corps politique composé de
petits leaders qui ont fait leurs classes dans la première république, la difficulté de
démonter l’archipel azzurro apparaît évidente. A moins, comme le dit à la fin
Diamanti, avec un peu de nécessaire optimisme, que ce ne soit le "territoire" qui
nous venge tous . Ce lien entre réalité locale et politique qui avait rendu si
forts les partis de jadis et qui semble encore aujourd’hui capable de prendre
sa revanche sur ceux qui l’ignorent, comme le démontre le score très mauvais
de Forza Italia chaque fois qu’il s’agit d’élections administratives. Mais certes
c’est un long chemin et le but est loin, puisque le lifting souriant de Berlusconi
est le premier pas d’une longue campagne pour les élections européennes de juin.
Un vote où le "territoire" ne compte presque rien.

Publié par "Il Manifesto" du 24 janvier 2004

Traduit de l’italien par MC et G.R.

par GIULIANA PAJETTA

26.01.2004
Collectif Bellaciao