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France Télécom mis en cause pour « homicide involontaire »

Publie le vendredi 12 mars 2010 par Open-Publishing

Un rapport de l’inspection du travail accuse l’opérateur d’être en partie responsable du suicide d’un de ses agents dans le Doubs .

De l’aveu de plusieurs spécialistes, c’est une décision « exceptionnelle », « rarissime ». L’inspecteur du travail chargé d’enquêter sur le suicide d’un salarié de France Télécom en août dans le Doubs a remis fin janvier au parquet de Besançon un rapport pour « homicide involontaire par imprudence ».

C’est ce qu’il indique dans une lettre adressée au syndicat SUD (voir déchiré) . Il s’agit d’une proposition de qualification pénale que le parquet peut retenir ou non.

Envoyé sur le terrain sans formation

Dans un courrier envoyé à la direction de l’opérateur en Franche-Comté dont nous nous sommes procuré une copie, l’inspecteur estime que le suicide est « en lien avec le travail ». En janvier 2009, Nicolas, jeune technicien énergie-climatisation, est muté d’office dans une unité d’intervention chargée de dépanner les clients de France Télécom. Le hic, c’est qu’il est envoyé sur le terrain sans formation, alors que le parcours de professionnalisation pour ce poste est censé durer entre huit et neuf mois. Ce n’est que sept mois après avoir pris ses fonctions que son employeur lui propose un apprentissage. Trop tard, quelques jours plus tard, le jeune homme met fin à ses jours. « Alors qu’il a été laissé seul face aux clients (…) et qu’il n’a pas reçu de formation théorique adéquate à son nouveau métier, notre enquête a montré que les objectifs commerciaux et de productivité de Nicolas étaient les mêmes que ceux assignés au groupe, et qu’évidemment il n’arrivait pas à atteindre certains de ses objectifs », accuse l’inspection du travail.

L’enquête révèle aussi que la médecine du travail et un cabinet spécialisé dans les diagnostics psychosociaux avaient alerté la direction de la « gravité » des risques liés à la santé mentale des membres de l’unité où travaillait Nicolas. En clair, ce dernier travaillait dans un environnement hyperstressant. Or, d’après l’inspection du travail, la direction, plutôt que de « mettre en place une grande partie des mesures de prévention » préconisées, aurait au contraire « considérablement augmenté les cadences des techniciens ». Pis, France Télécom aurait refusé « volontairement d’informer et consulter le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail » (CHSCT), contrairement à ce que prévoit le Code du travail.

Contactée, la direction de France Télécom assure qu’elle répondra au courrier de l’inspecteur du travail « dans les plus brefs délais », mais ne souhaite pas commenter le rapport envoyé à la justice car elle ne « l’a pas eu entre les mains ». SUD envisage de se constituer partie civile.

Un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (Igas), remis le 3 mars à la direction de France Télécom, recommande que quatre cas de suicide ou tentatives de suicide qui lui ont été soumis soient requalifiés en accidents de service.

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