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Günter Grass fit partie des Waffen SS

Publie le mardi 15 août 2006 par Open-Publishing
9 commentaires

MARCEL LINDEN

Après l’avoir caché pendant soixante ans, le Prix Nobel de Littérature a fini par avouer.

C’est ce silence qui choque les Allemands, plus qu’un enrôlement qui allait de soi.

D’aucuns parlent de la fin d’une institution morale, icône de la gauche allemande.

CORRESPONDANT À BONN

Les Allemands n’en reviennent pas. Günter Grass, Prix Nobel de littérature de 1999, grand moraliste et thuriféraire de l’engagement de gauche, a été membre des Waffen SS à la fin de la guerre. Le fait considéré comme le plus scandaleux est qu’il se soit tu là-dessus pendant plus de 60 ans.

Les aveux de l’écrivain né en 1927 vont relancer le débat sur les Waffen SS. Le Tribunal allié de Nuremberg avait classé cette armée parallèle, non intégrée dans la Wehrmacht, comme une organisation criminelle. Elle a commis de nombreux méfaits comme le massacre d’Oradour-sur-Glane. A partir de 1942, elle enrôla d’office de jeunes conscrits. En 1944, elle comprit 900 000 soldats. Il ne faut pas confondre, toutefois, les Waffen SS, force combattante, avec la SS proprement dite qui gérait les camps d’extermination. En 1985, le chancelier Helmut Kohl avait provoqué un tollé en visitant, avec le président Ronald Reagan, un cimetière à Bitburg où sont ensevelis des jeunes Waffen SS.

En septembre, Günter Grass publiera un ouvrage autobiographique intitulé « En épluchant l’oignon ». Dans une interview accordée au journal « Frankfurter Allgemeine », il est passé aux aveux. Il dit : « Il fallait que cela sorte, enfin ! ». Il explique qu’à 15 ans, il s’était porté volontaire pour l’arme des sous-marins, désireux d’échapper à l’étroit milieu familial. Deux ans plus tard, il reçut l’ordre de rejoindre les Waffen SS.

Avait-il ressenti un sentiment de culpabilité ? « A l’époque non. Plus tard, ce sentiment de culpabilité a pesé sur moi comme une infamie », remarque-t-il, ajoutant qu’en 1944, les Waffen SS n’avaient rien de repoussant, mais étaient considérés comme des troupes d’élite subissant de grandes pertes.

Ce n’est que quand le dignitaire nazi Baldur von Schirach admit l’Holocauste à Nuremberg que le jeune Grass crut aux atrocités commises par le régime nazi. Ce sort, il le partagea avec des millions de soldats.

Un silence opportun

Mais pourquoi a-t-il dissimulé si longtemps son appartenance aux Waffen SS ? « Je croyais avoir apporté ma contribution en écrivant », dit-il aujourd’hui. Effectivement, son chef-d’oeuvre, « Le tambour », décrit l’ambiguïté des relations entre nazis et population. Ce qu’il ne dit pas, c’est que dans un monde hypocrite, un aveu aurait pu ruiner sa carrière. Aurait-il obtenu le Prix Nobel en 1999 si l’Académie de Stockholm avait su ? Le critique littéraire Hellmuth Karasek ne le croit pas ; selon lui, « Grass a mérité le Prix, mais maintenant tout est différent ».

Idole de mai 68

Michael Jürgs, qui a rédigé une biographie sur l’auteur, avoue sa déception et parle de la « fin d’une institution morale ». Compagnon politique du chancelier Brandt, Grass avait été adoré par la génération des soixante-huitards. En 1993, il avait rompu avec le Parti social-démocrate à cause de son attitude trop peu libérale à l’égard des demandeurs d’asile. La gauche allemande a perdu une de ses dernières icônes.

© La Libre Belgique 2006

http://www.lalibre.be/article.phtml?id=10&subid=91&art_id=300781

Messages

  • Soixante ans après ?
    Un gamin de 15 ans déshonore un vieil homme ?
    Notre culte de la repentance et de l aveu atteint des sommets d absurdité...
    Que faisiez-vous à 15 ans ?
    Rien dont vous ne soyiez aujourd hui honteux ?
    Cette frénésie ne vous rappelle pas les "biographies" obligatoires des partis communistes d autrefois ?
    Et cette manie de compter pour plus importante une erreur de jeunesse que toute une vie d écrivain honnête et militant...
    Heureusement qu il n a rien dit, nous aurions été privés de ses livres !
    Pendant qu on s obnubile sur le rétroviseur, on fonce dans un mur qu on ne reconnaît pas : il ne porte pas de croix gammée, ses victimes ne sont pas marquées d une étoile jaune.
    Ce zèle dénonciateur est mortifère.
    MC

    • tout à fait d’accord avec vous mc. ja m’attendais à tout sauf à celle-la. à 15 ans quel crime peut-il commettre ? où va t-on avec ce délire ? non mais vous vous rendez compte de l’état de percecution dans lequel se trouve le peuple allemand ? pas plus tard qu’aujourd’hui le ministre allemand a annulé sont voyage pour la syrie, raison invoquée : antisemitisme du president assad lors d’un discours prononcé. ce dernier ne contient absolument aucune phrase antisemite mais fais une critique sur israel concernant la guerre au liban. aller basta ! le chantage

    • Ce qu’on lui reproche je crois, ce n’est pas de s’être engagé a 15 ans. C’est d’avoir passé sa vie à fustiger les Allemands anciens nazis, sans avoir avoué lui-même qu’il l’avait aussi été. C’est dommage, parce que cette honnêteté l’aurait rendu plus sincère et donc, crédible...

    • Les informations de ce jour , montrent que les americains qui l’ont fait prisonnier , savaient qu’il etait incorporé dans une division de la waffen ss .
      Il avait dix sept ans et etait un prisonnier de guerre comme des centaines de milliers d’autres , il n’etait pas ce qu’il est devenu ensuite , tout au long de sa vie .
      Je pense que proche de la fin de sa vie (que je lui souhaite encore longue ) il a voulu poser au grand jour , ce qui l’a sans doute marqué de façon indélébile .
      Qui peut etre sur de ce qu’il aurait fait dans des circonstances terribles , à dix sept ans ?
      je pense trés fort au film " Lacombe lucien " qui m’a montré à tout jamais que le fil du rasoir est bien mince , et que l’on peut tomber d’un coté ou de l’autre .
      claude de Toulouse .

    • l’honnêteté commande juste de le reconnaitre ... surtout quand on fait profession de révéler les turpitudes d’autrui en dissimulant bien les siennes. c’est ça qui fait malaise ... je veux pas jouer les pères la morale mais tout ça laisse une impression bien désagréable renforcée par la clémence dont font preuve certains ( rushdie ou werner herzog ). j’ai 45 ans, je n’ai pas connu la 2ème guerre mondiale et je n’ai de leçon à donner à personne. mais de ce que j’ai appris par mes lectures, je sais qu’il n’était pas innocent de s’engager dans les waffen ss. la nature de ces unités, leur lien organique avec la doctrine et le régime nazi, le fait qu’elles étaient l’expression même de cette doctrine, son enfant, son bras armé et agissant, le fait qu’elles aient été utilisées et coupables des pires atrocités ( et les allemands le savaient à l’époque ), tout cela recquéraient des recrues acquises au régime. on peut croire qu’un gosse de 17 ans en mal de repères, porter par je ne sais quoi, se laisse berner mais c’est aller un peu vite en besogne en ne voyant et en ne justifiant cet engagement que par l’ignorance, l’ennui ou l’envie d’échapper à son milieu ... cessons de faire les autruches parce qu’un écrivain qu’on admire tombe le masque, il n’y a pas d’innocents ...

    • BIEN D’ACCORD AVEC TOI !

      Je n’ai jamais aimé ceux qui posent des étiquettes définitives et classent les gens sans leur laisser la moindre chance de trouver leur humanité...

      NOSE DE CHAMPAGNE

  • " Heureusement qu’il n’a rien dit, nous aurions été privés de ses livres ! " celui qui a écrit ça a je crois bien résumer le fond de l’histoire ... céline en france a fini banni et misérable pour avoir dans les années 40 commis ses écrits antisémites. il ne faut pas pour autant tout rejeter de son oeuvre. il écrivait dans guignol’s band que " sa bignole comme elle jugeait bas, elle jugeait juste ". a 15 ans on ne sait pas ce qu’on fait, c’est vrai. ophüls dans le " le chagrin et la pitié " a fait témoigner un ancien volontaire français des waffen ss qui combattit les russes. jeune homme d’à peine 20 ans lui aussi, il disait avec une ironie amère que les soviets l’avaient ramenè à une " juste vision des choses " ... Il ne dissimulait rien de son passé, il l’assumait et assurait qu’on ne l’y reprendrait plus. il n’avait pas pour autant viré coco, juste libéral. revenons à gunther grass et à la bignole de céline, jugeons bas et jugeons juste. gunther grass a tout simplement dissimulé son passé nazi par opportunisme comme mitterand dissimula son passé vichyste. une carrière ça se bâtit ! il a certainement au lendemain de la guerre pris conscience de ses actes, il a dû vivre avec pendant 60 ans, qu’en est - il resté au fond ... ? ses états d’âme d’aujourd’hui ne valent rien, il a manifestement très bien su faire avec. il utilise son statut d’icone morale et se réfugie derrière comme mitterand le fit avant lui. à savoir si ça le soulage ou s’il nous dit " allez vous faire foutre ! " ... ? on abordera maintenant son oeuvre avec un nouveau regard ...

    • Le président de l’épiscopat polonais, l’archevêque Jozef Michalik, et l’ancien opposant du régime communiste et directeur de la rédaction du grand quotidien Gazeta Wyborcza, Adam Michnik, ont salué mercredi la décision de Günter Grass de révéler son passé chez les Waffen SS à l’âge de 17 ans.

      En Pologne, l’émotion soulevée par cet aveu est très vive, en particulier parce que Günter Grass est né à Gdansk, qui s’appelait alors Dantzig, et a été fait citoyen d’honneur de cette ville symbole, où a débuté la Seconde guerre mondiale.

      "C’est un vieil homme aujourd’hui et pourtant il veut s’épurer. Je pense qu’en avouant et en demandant pardon, il devient plus grand dans ses qualités d’homme, d’autorité morale et d’écrivain, plus grand même que lorsqu’il a reçu le Prix Nobel", a déclaré Mgr Michalik, cité mercredi par le quotidien Rzeczpospolita.

      Selon Adam Michnik, "l’attitude de l’écrivain est digne d’admiration et de respect (...) il ne reste qu’à s’incliner (devant lui) car c’est un exemple absolument unique".

      "Il a profondément réfléchi sur cet acte et l’a effacé par sa vie ultérieure, par tous ses livres", estime M. Michnik.

      Dans son éditorial, M. Michnik dénonce "les hordes de rabatteurs" qui ont attaqué Günter Grass, parmi lesquels s’est trouvé le Prix Nobel de la Paix, Lech Walesa.

      "Günter Grass n’avait pas été le seul à se tromper du chemin", a également rappelé Adam Michnik. "Un autre Allemand, de la même classe d’âge, avait également endossé un uniforme de l’armée nazie pendant quelques mois, à la fin de la guerre (...). Cet Allemand s’appelait Joseph Ratzinger, plus connu ces derniers temps comme le pape Benoît XVI".

      Selon une depeche d’agence .

      claude de toulouse .

    • quel courage et quel sens y - a - t - il à revenir et à avouer au crépuscule de ses jours les turpitudes de sa jeunnesse ? quand il s’est habilement et définitivement mis à l’abri ... soulager sa conscience ? les confessionnaux sont remplis ? m. grass aurait été indubitable si cet aveu avait été l’acte fondateur de son oeuvre. s’il avait bâti toute son action artistique ou politique sur cet acte posé non pas en repentir mais en reconnaissance de ce qu’il fut pleinement et entièrement. ce courage aurait été reconnu. une telle vertu est malheureusement bien improbable, il ne vaut pas plus que ceux dont il a dénoncé les turpitudes, il y a mis du talent c’est tout.