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La facture salée de la grippe H1N1 met l’OMS sur la sellette
L’apparition de la grippe H1N1 a réveillé en avril 2009 le spectre d’une pandémie meurtrière, mais un an plus tard, les critiques fusent contre une dramatisation jugée excessive et les milliards dépensés.
"Des sommes énormes ont été dépensées par beaucoup de pays pour acheter des antiviraux et vaccins qui n’ont jamais été utilisés et n’allaient jamais l’être", a expliqué à l’AFP le parlementaire britannique Paul Flynn, qui dirige une commission d’enquête du Conseil de l’Europe sur le sujet.
Avec d’autres, M. Flynn accuse l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et les autorités sanitaires nationales d’avoir "crié au loup" sous la pression des laboratoires pharmaceutiques.
En Grande-Bretagne, 110 millions de doses, permettant de vacciner deux fois 80% de la population, ont été acquises pour un milliard de livres (1,13 milliard d’euros), selon le parlementaire britannique.
L’achat de millions de vaccins a coûté 600 millions d’euros à la France, 1,88 milliard de dollars (1,4 milliard d’euros) aux Etats-Unis, 283 millions d’euros à l’Allemagne et 93 millions d’euros à l’Espagne.
"C’est un gâchis", s’indigne la sénatrice Marie-Christine Blandin, rapporteur d’une commission d’enquête parlementaire française sur la gestion de la grippe. De fait, moins de 10% de la population, réticente, s’est laissée vacciner.
Devant la menace du virus d’origine porcine transmissible à l’homme découvert au Mexique et aux Etats-Unis, le comité d’urgence de l’OMS avait sonné l’alarme dès le 25 avril.
Un mois et demi plus tard, le 11 juin, la grippe H1N1, qui s’étendait très rapidement dans le monde, était déclarée 1ère pandémie du XXIe siècle.
L’OMS recommandait aux gens de se laver les mains, de rester à distance des personnes infectées et d’éternuer dans le creux du coude. Les malades devaient rester chez eux et éviter si possible tout contact avec des personnes saines.
La communication de l’organisation est parfois contradictoire : rassurante sur la faible virulence du virus, et brandissant en même temps le spectre de la grippe espagnole qui fit au moins 40 millions de morts en 1918.
Un vent de panique se mit à souffler dans le monde : de Tokyo à Bogota, on s’arrachait masques et alcools désinfectants pour les mains, fermetures d’écoles et interdictions de rassemblements publics se multipliaient.
Le H1N1 s’est avéré rapidement moins meurtrier qu’une grippe saisonnière. Toutefois, l’OMS prévoit dans un premier temps la production de 5 milliards de doses de vaccin par an.
En pleine crise économique mondiale, c’est une aubaine pour les groupes pharmaceutiques : à titre d’exemple, Novartis a vendu au premier trimestre 2010 pour 1,1 milliard de dollars de vaccins et GlaxoSmithKline a livré 130 millions de doses pour 883 millions de livres (un milliard d’euros) au dernier trimestre 2009.
"Il y a souvent de la pression (sur les scientifiques conseillant l’OMS) pour exagérer les problèmes, cela signifie plus de contrats, plus de bourses, plus d’argent pour faire de la recherche sur la grippe", accuse M. Flynn.
La plupart des experts "sont nourris à la mamelle public-privé", estime également Mme Blandin.
De fait, l’autorité de l’OMS est remise en cause. "Tout ce qui mélange argent et santé constitue un problème de crédibilité pour les décisions qui sont prises", explique l’universitaire Didier Tabuteau, qui occupe la chaire de "Santé" à l’Institut d’études politiques de Paris.
"Si à l’avenir il y avait un virus très dangereux, plus personne ne pourrait croire à ses avertissements", s’inquiète M. Flynn.
Au nom de la "transparence" et pour répondre aux critiques, l’OMS, qui nie toute interférence des laboratoires et est soutenue par la majorité des virologues, a créé un comité indépendant chargé d’évaluer sa gestion de la pandémie d’ici l’automne.
http://www.lematin.ch/actu/monde/facture-salee-grippe-h1n1-met-oms-sellette-265102