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L’édifiant témoignage de Gaël Roblin concernant les obsèques de son père

Publie le lundi 8 décembre 2003 par Open-Publishing

Testenni Gaël Roblin diwar-benn an abadenn vezhus en deus bet da
c’houzanv da geñver obidoù e dad

Témoignage de Gaël Roblin détaillant la cérémonie grotesque qu’il a
dû endurer lors des obsèques de son père

Da skignañ diwar e c’houlenn / à diffuser à sa demande

« Contrairement à ce qui a été écrit ici ou là, je n’ai pu assister à
la cérémonie civile suite au décès de mon père, pas plus qu’à
l’incinération. J’accuse l’état français de s’être livré à une
sordide mise en scène à cette occasion à des fins de propagande.
(lire : http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=3752-ndlr)

Voilà ce qui s’est réellement passé.

Vendredi 21 novembre j’ai été informé par mon avocat du décès de mon
père. Le jour même il a fait une demande à la chambre d’instruction
afin que je puisse assister aux funérailles. J’ai été informé lundi
24 novembre de la décision positive de la chambre. Mardi 25 au départ
de La Santé je me suis rendu en fourgon cellulaire à Saint Brieuc.
L’escorte était forte numériquement, bien plus que pour un jugement
où je m’étais rendu avec un autre prisonnier politique breton en 2002
à Nantes.

Arrivé à 16h30 à la gendarmerie de St Brieuc après 400 km menotté,
j’ai été placé dans une cellule d’une saleté repoussante, ignoble et
glaciale. Les cellules du palais de justice de Paris sont d’une
propreté comparables aux toilettes du roi d’Espagne si on compare le
palais de justice de Paris avec la gendarmerie de St Brieuc. Les
connaisseurs apprécieront.

Vers 17h j’ai été emmené dans un cortège de sirènes hurlantes et de
gyrophares au crématorium. On avait imposé l’itinéraire du funérarium
de Lanvollon à St Brieuc à ma famille, tout en insistant sur la
nécessité d’une présence minimum au crématorium.

Arrivé là on a refusé que mon oncle (qui pourtant dispose d’un permis
lui permettant de me rendre visite à La Santé) puisse venir me
saluer, on a refusé sèchement que j’embrasse la compagne de mon père.

Aucune condition de sécurité ne justifie que l’on me
refuse ce droit élémentaire à assurer mes proches d’un minimum de
gestes de compassion en ces circonstances pénibles. C’est là un
geste d’une incroyable sauvagerie morale faite à mon endroit, mais
aussi à ma famille en deuil qui est restée sidérée par le vacarme
assourdissant et le déploiement militaire indécent autour du
crématorium. D’autant qu’elle avait déjà dû enduré les filatures et
relevés de plaques d’immatriculation entre le domicile de mon père,
le funérarium de Lanvollon, et la salle polyvalente de Pléguien où
lui a été rendu hommage.

Je me suis donc retrouvé dans un petite salle du
crématorium de St Brieuc entouré de quatre militaires français
robocopisés dont deux étaient armés, seul et toujours menotté alors
que ma famille se trouvait à quelques mètres. Comprenant alors que
j’aurais seulement le droit de me recueillir dans ces conditions
délirantes, j’ai décidé de mettre fin à cette mascarade indécente.
Contrairement à ce qui a été écrit je n’ai pas eu le droit d’assister
à la crémation et je suis rentré dans les mêmes conditions sur Paris.

Le risque de fuite était nul, car ce que se gardent bien
de rapporter certains c’est que je suis détenu contre l’avis du
parquet anti-terroriste et que celui-ci a demandé à trois repises ma
mise en liberté considérant que j’avais de très nombreuses garanties
de représentations. Je suis maintenu en détention sur la base des
allégations du juge d’instruction et de la chambre d’instruction, qui
se gardent bien de détailler ma prétendue participation à la
réalisation d’actions clandestines, tout en se gardant d’arguer de ma
qualité de porte-parole d’Emgann, mouvement toujours légal à ce jour.

Ce déploiement de force n’était justifié que pour faire
croire à ma prétendue dangerosité, alors que de plus en plus de gens
en Bretagne se posent des questions sur la répression féroce que
subissent militants culturels et politiques bretons, et bien sûr par
la proximité notoire qu’entretenait mon père jusqu’à son dernier
souffle avec ceux et celles qui défendent les prisonniers politiques
bretons et les droits du peuple breton.

Tout ceci prouve s’il en était encore besoin l’incroyable
indécence d’un état qui n’a même pas le respect des morts et se livre
en toutes circonstance à d’infâmes campagnes de criminalisation pour
justifer la répression.

J’invite chacun à faire connaître son sentiment aux
autorités françaises. J’ai décidé de rendre tous ces faits publics
afin que chacun puisse décider en sa conscience si ma présence aux
obsèques de mon père aurait créé plus de « troubles à l’ordre
public » que la remise en liberté de monsieur Papon, ou la dernière
opération spectacle de la Direction Nationale Anti-Terroriste dans la
région de Guingamp. »

 http://www.emgann.org