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La question syndicale et les communistes italiens, par Rolando Giai-Levra (Rifondazione)

Publie le dimanche 31 janvier 2010 par Open-Publishing
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Quelques réflexions sur la nécessité d’avoir une seule ligne syndicale de classe

Reconquérir la CGIL et reconstruire l’organisation communiste à l’entreprise !

Reconquérir la CGIL et reconstruire l’organisation communiste sont les deux faces d’une même pièce pour le camarade Rolando Giai-Levra.

La liquidation du PCI a coupé les liens entre le monde ouvrier et le mouvement communiste. L’absence de volonté de la part de dirigeants communistes d’après 1991 de renouer ces liens a eu de graves conséquences tant sur le mouvement communiste (Refondation communiste et PdCI), coupé du monde ouvrier, que sur le mouvement syndical (la CGIL), soumis à l’hégémonie des forces réformistes.

La désorganisation est telle en Italie que les communistes italiens se retrouvent sans « ligne syndicale » mais aussi sans « ligne politique ». Certains suivent la majorité réformiste de la CGIL, d’autres soutiennent des courants minoritaires contestataires. D’autres ne voient plus d’avenir dans la CGIL et se tournent vers le syndicalisme de base sans parler de ceux qui adhérent aux syndicats « jaunes ».

Devant cet ordre de bataille dispersé, Giai-Levra propose une ligne claire : tous les communistes doivent être dans la CGIL, syndicat historique de la classe ouvrière italienne et que les communistes ont construit et fait vivre pendant tant d’années, et tous doivent contester l’hégémonie réformiste en son sein pour reconquérir l’organisation à partir de la base.

Il ne peut y avoir de reconstruction de l’organisation communiste sans implantation des communistes sur le lieu de travail. Reconstitution des cellules d’entreprise et travail syndical sur des bases de classe s’alimentent mutuellement.

AC

De Rolando Giai-Levra, directeur de la revue Gramsci Oggi et secrétaire du cercle du Parti de la Refondation Communiste (PRC) à Magenta

Traduction et introduction AC pour http://solidarite-internationale-pc...

Durant l’émission « Parla con me » [Parle avec moi] diffusée sur la RAI 3 le 20 novembre 2009, Guglielmo Epifani [secrétaire national de la CGIL] a affirmé qu’il y a plus aujourd’hui qu’il n’y en avait dans les années 1960 et 1970. Ce n’est pas un lieu commun, c’est une vérité qui ne fait que confirmer un fait objectif qui se base sur des données statistiques d’Instituts Internationaux concernant l’Italie, l’Europe et le monde entier.

Ces données statistiques qui, en soi, démolissent les théories sur « l’extinction de la classe ouvrière », dans le même temps démontrent que la contradiction capital-travail/salariat est beaucoup plus profonde et étendue que ce que l’on peut imaginer, ce dont la gauche n’a pas encore pris acte pour agir politiquement en conséquence. L’élément politique principal qui se dégage, c’est que cette profonde contradiction de classe reste sous le contrôle du camp réformiste dont le secrétaire national de la CGIL est un représentant de tout premier ordre.

La première réflexion à faire est que la lutte pour l’unité et l’autonomie communiste ne peut pas être dissociée de la lutte pour l’unité et l’autonomie de la classe laborieuse, pour qui la question syndicale est un élément fondamental pour organiser la résistance à l’exploitation du Capital. Par conséquent, le besoin se fait sentir de n’avoir qu’une seule et unique ligne syndicale de classe en mesure d’unir les travailleurs et la gauche anti-capitaliste pour mettre en échec la logique dominante du dialogue social, qui depuis des années a été mise en avant au nom de la compatibilité avec les exigences du marché capitaliste. L’objectif est de repartir des luttes pour donner un maximum de visibilité à la classe ouvrière et la remettre, ainsi que le travail et la production, au centre de l’action politique et de la société.

En réalité, on parle peu du syndicat à gauche, si ce n’est occasionnellement lorsque des luttes de travailleurs éclatent dans certaines entreprises ou lorsque cela est rendu nécessaire par la situation du syndicat qui doit assurer sa propre survie, surtout quand on se trouve au devant d’un rendez-vous très important comme celui du prochain Congrès national de la CGIL. La préparation de ce Congrès tombe au cœur d’une profonde crise capitaliste mondiale qui n’a pas épargné notre pays. Cette crise coïncide avec celle de toute la gauche et débouche de plus en plus sur la dégradation des conditions de vie des travailleurs, la hausse du chômage, des licenciements et de la précarité, la réduction du pouvoir d’achat des salariés, la prolongation de la journée de travail, les morts au travail, les délocalisations et l’offensive contre la démocratie sur et hors des lieux de travail et de production. Avec la bénédiction du gouvernement et l’aide du réformisme ainsi que des politiques de dialogue social des directions syndicales, les capitalistes ont les mains libres dans tous les domaines. La fausse opposition réformiste du PD, de plus en plus subordonné aux choix réactionnaires du gouvernement, intensifie sa fonction historique de désarmement idéologique de la classe ouvrière pour sauver le capitalisme de ses crises qui, de manière cyclique, s’aggravent de plus en plus.

Les partis de « gauche » après leurs diverses affaires internes qui ont provoqué leur dissociation organique d’avec la classe ouvrière et leur déclin consécutif, encore plus aggravé par leurs divers fiasco électoraux, se trouvent en fait dans un état de paralysie totale, incapables de réagir parce qu’ils ont aucune alternative à proposer à cette société ! Leurs groupes dirigeants pensent pouvoir sortir de leur crise avec un nouvel « arc-en-ciel » à travers le projet de « Fédération de gauche » dans laquelle on va phagocyter et diluer les diverses organisations politiques qui y adhèrent (y compris le PRC et le PdCI) et on va éluder encore une fois la question communiste qui attend une réponse tout de suite dans notre pays. Le projet politique est clair et c’est celui de jeter les bases de la création d’une nouvelle organisation politique de « gauche » dans laquelle les communistes seraient placés dans une sorte de ghetto, une insignifiante tendance culturelle, pour renouer des liens avec le PD à partir du prochain rendez-vous électoral, les régionales de 2010. La soi-disant « gauche radicale extra-parlementaire » engluée dans sa logique institutionnelle et pragmatique, se nourrit de l’illusion qu’avec une « nouvelle parure arc-en-ciel » elle pourra se raccrocher aux luttes des travailleurs pour renaître et sortir de sa crise.

Pour les communistes, en revanche, ce ne sera pas une vague fédération sans identité, bercée d’illusions électorales et à la remorque du PD, qui permettra à la gauche de pouvoir s’enraciner dans la société ; mais, ce sera seulement avec la reconstruction d’un Parti Communiste organique à la classe ouvrière et implanté dans les lieux de travail et dans les quartiers, avec un programme clair de dépassement du capitalisme et de transformation de l’organisation syndicale de masse en un syndicat de classe.

L’évidente incapacité de la gauche et sa crise, désormais chronique, est aggravée par l’ambiguïté constante qui existe justement sur la question syndicale qui n’a pas été résolue depuis que le PCI s’est auto-dissous. Depuis lors, beaucoup de confusion a été semée sur ce terrain et nous en sommes là, car à l’intérieur du PRC et du PdCI étaient présentes, et le sont encore, des tendances syndicales hétérogènes situées dans diverses formations. En effet, parmi ceux syndiqués à la CGIL, certains ont comme référent la majorité réformiste, d’autres les minorités « Réseau 28 avril » ou « Travail et société », d’autres encore ont comme référent des organisations syndicales extérieures ou même, dans certains cas, des syndicats corporatistes comme la CISL. Des tendances transversales aux deux partis et qui ne permettent pas d’avoir une seule et unique position de classe dans le syndicat de masse parce qu’il manque, en réalité, une seule et unique vision de classe et cela a représenté une des causes majeurs qui ont contribué à éloigner ces partis et la gauche des masses laborieuses ! Une confirmation supplémentaire de la manière dont on a traité la question syndicale, nous l’avons dans les deux derniers congrès du PdCI et du PRC au cours desquels (avec des différences tout de même) les poussées syndicales qui prenaient comme référent essentiellement le courant de « Travail et Société » n’ont pas permis aux deux partis d’élaborer une ligne de classe basée sur une analyse sérieuse, gramscienne et léniniste, du syndicat. Cela démontre toute la faiblesse idéologique de ces organisations et ne peut se produire seulement parce qu’il existe une grande confusion théorique qui ne permet de faire aucune distinction entre la nature, la fonction et le rôle d’un parti politique et ceux d’un syndicat et donc qu’il manque, justement, une seule et unique ligne de classe qui puisse servir de point de ralliement à tous les communistes où qu’ils soient, avec ou sans la carte du parti. Au contraire, le grand vide existant a été non seulement perçu mais surtout utilisé par le groupe dirigeant réformiste du PD qui, jouant sur ces contradictions de la gauche, renforce et étend sa propre influence idéologique surtout dans la CGIL pour la faire glisser de plus en plus vers la droite. Si elle ne tient pas compte de cette situation, la gauche, sans aucune base théorique, continuera à rêver les yeux ouverts et myope qu’elle est, elle s’éloignera de plus en plus des travailleurs. Aujourd’hui, quelle est la réalité syndicale du pays ?

1)Il y a la CGIL qui représente historiquement la plus grande organisation syndicale de masse qui rassemble aujourd’hui 5 500 000 adhérents : ouvriers, employés, techniciens, les travailleurs en général, immigrés et retraités et qui, depuis sa naissance, incarne l’histoire des plus grandes et importantes expériences vécues par le prolétariat Italien. Les grandes mobilisations des travailleurs sont passées et passent encore par cette organisation qui, compte tenu de la faiblesse et de l’incapacité des organisations politiques de gauche, représente objectivement (avec toutes ses contradictions internes) l’unique grande forteresse dans laquelle peuvent être défendus les intérêts généraux de classe des travailleurs, des retraités, des immigrés ainsi que la démocratie. Ce n’est pas un hasard si, après avoir mis hors jeu toute la gauche, on assiste actuellement à une attaque croissante du gouvernement, de la Confindustria [le MEDEF italien], des différentes forces politiques du centre, y compris le PD et le centre, avec la pleine complicité de la CISL et de l’UIL pour la mettre définitivement au service du capital.

2)A l’intérieur de la CGIL, il y a la catégorie des métallurgistes organisés dans la Fiom dont l’appareil n’est pas sans souffrir non plus de quelques contradictions, avec des poussées réformistes et arc-en-ciel [la Gauche arc-en-ciel est cette alliance électorale présentée en mars 2008 par Bertinotti dont la stratégie d’effacement/disparition des deux Partis Communistes a débouché sur un fiasco électoral : 3%] ou mouvementistes ; mais cette catégorie représente dans le pays la partie la plus forte et la plus combattive qui, pour le premier congrès, a décidé de présenter un document alternatif à celui du groupe dirigeant de la CGIL avec l’adhésion des éléments du « Réseau 28 avril », des catégories de la Fonction Publique et des Employés du Commerce et des Services de la CGIL, ainsi que tant d’autres adhésions individuelles issues des autres catégories.

3)Au sein de la CGIL, il existe aussi le courant « Travail et société » qui est, en grande partie, encore influencé par les vieilles logiques héritées de l’idéologie de Démocratie Prolétarienne et qui pendant longtemps a tenté de représenter, sans succès, la gauche syndicale de classe et qui par le biais de la toute récente association « travail et solidarité » soutient activement la constitution de la « Fédération de gauche » qui s’est constituée officiellement le 5 décembre 2009. Ce courant, aujourd’hui, s’est démasqué et s’est couché devant le document de la majorité dont le socialiste réformiste est le chef, contre le document alternatif de la Fiom et cette décision a provoqué des tensions et des ruptures en son sein.

4)Il y a les Syndicats corporatistes qui ont toujours agi pour la division des travailleurs, comme la CISL et l’UIL, nés après la Libération de la volonté des forces conservatrices et cléricales (DC, PSDI, Vatican, les USA, etc.), qui sous le discours de « l’autonomie » vis-à-vis des partis ont développé leur propre action politique, avec des réformistes à l’intérieur et à l’extérieur du PCI dissous, pour extirper le mouvement ouvrier de l’influence de l’hégémonie communiste. Encore aujourd’hui, ils continuent à agir comme une « courroie de transmission » des politiques du patronat et du gouvernement (du haut vers le bas) au sein des travailleurs, mais aussi de la fraction du réformisme catholique présent au PD. La même politique adoptée par ces syndicats démontre qu’il n’existe pas d’autonomie en dehors des classes et que les syndicats sont porteurs des intérêts (donc ils sont des courroies de transmission) soit de la classe dominée soit de classe dominante et de leurs formations politiques respectives. De ce groupe de syndicats fait aussi partie l’UGL, syndicat corporatif de droite, héritier de la vieille CISNAL liée à l’ancien parti fasciste le MSI, qui s’est transformé ensuite en AN et qui s’est aujourd’hui fondu dans le PDL qui gouverne le pays avec la Lega.

5)En dehors du syndicalisme confédéral, existe une vaste constellation représentée par des organisations syndicales souvent en concurrence entre elles et avec de nombreuses contradictions internes comme les CUB-RDB-COBAS-SLAI-SDL-SISA-UNICOBAS-SUL, etc. qu’il serait plus correct de définir comme un syndicalisme extra-confédéral plutôt que de « base ». Sans aucun doute, ces organismes doivent être considérés avec tout le sérieux politique qu’ils méritent ; mais, il convient de dire qu’ils n’ont pas une influence significative dans l’industrie. Ils rassemblent une infime minorité de travailleurs dans la production et ne peuvent pas représenter une alternative à la CGIL et en aucun cas un bloc social de masse anticapitaliste.

Tous ces éléments devront régler leurs comptes lors du prochain Congrès National de la CGIL qui se déroulera le 5 mai 2010 à Rimini et vers lequel vont inévitablement converger les attentions politiques de tous, y compris des partis, et pour lequel on a déjà assisté à de multiples tentatives (internes et externes) visant à déterminer son orientation politique future. A plus forte raison, les communistes doivent y consacrer toute leur attention, pour intervenir dans cet événement politique très important pour l’avenir des travailleurs ! La question salariale, le temps de travail, le plein-emploi à temps indéterminé, la défense des conventions collectives, la sécurité, l’école, la santé, les transports, la planification économique, un nouveau modèle de développement, le primat du capital public sur le capital privé, le développement de l’organisation et de la démocratie sur le lieu de travail, etc. ce sont des questions d’une actualité brûlante auxquelles les communistes devraient apportent leur contribution politique sur les lieux de travail et de production, parmi les travailleurs et les délégués à la RSU (représentation syndicale unitaire) ; mais, aussi dans le débat même du congrès de la CGIL.

Les difficultés sont grandes, et les obstacles sont nombreux, car les conditions politiques actuelles du pays sont très différentes de celles des années 60 et 70 quand, nous nous répétons, au niveau national il y avait un fort PCI, il y avait une CGIL beaucoup plus autonome vis-à-vis des politiques corporatistes de la CISL et de l’UIL et beaucoup plus proche de la classe ouvrière ; mais surtout les Conseils d’usine s’étaient formés et avaient remplacé les vieilles Commissions Internes (structures syndicales proches des RSU actuelles). Il convient de préciser que les Conseils d’usine (qui ne sont pas des organismes syndicaux), n’étaient pas seulement différents qualitativement des vieilles Commissions Internes, mais dans le même temps ils n’avaient rien à voir avec les GDS ou les CUB (syndicats dit ’de base’ – sortes de coordination permanentes de salariés à mi-chemin entre l’anarcho-syndicalisme et le gauchisme traditionnel) d’alors ou d’aujourd’hui comme certains intellectuels soixante-huitards s’obstinent encore à l’affirmer. Dans cette phase politique, l’organisation communiste et les structures en conseils sont à reconstruire, tandis que sur le terrain syndical, c’est la CGIL qu’il faut reconquérir ! La réalité a démontré que se détacher de la CGIL (qui est un syndicat et non un parti politique) a été une erreur qui a abandonné des forces révolutionnaires dans la lutte contre l’hégémonie du réformisme ! Gramsci disait :

« Nous sommes, par principe, contre la création de nouveaux syndicats. Dans tous les pays capitalistes, le mouvement syndical s’est développé dans une direction déterminée ; une grande organisation a vu le jour et s’est développée, elle a fait corps avec l’histoire, les traditions, les habitudes, les façons de penser de la grande majorité des masses prolétariennes. Chaque tentative pour organiser les militants révolutionnaires des syndicats a abouti à un échec et n’a servi qu’à renforcer la prédominance des réformistes dans la grande organisation. » (« Notre ligne syndicale » publiée dans le 8ème numéro d’ ’État ouvrier’ du 18 octobre 1923 – Milan)

Donc, pour les communistes, il faut travailler sur les lieux de travail où sont présentes les masses de travailleurs pour mener la lutte politique. Toute fuite en avant ou tout compromis signifierait abandonner les masses entre les mains du réformisme ou du maximalisme. Encore Gramsci :

« … le Parti révolutionnaire doit toujours, même dans les pires situations objectives, s’efforcer de conserver toutes les accumulations d’expérience et de capacité technique et politique qui se sont formées à la faveur des développements de l’histoire passée dans la masse prolétarienne. Pour notre Parti, la Confédération générale du travail constitue en Italie l’organisation qui exprime historiquement de la façon la plus organique ces accumulations d’expériences et de capacités et qui représente donc le terrain sur lequel doit être menée cette défense (…) La tactique syndicale du Parti consiste essentiellement à développer toute l’expérience d’organisation des grandes masses en pesant sur les possibilités de réalisation les plus immédiates, étant donné les difficultés objectives auxquelles se heurte le mouvement syndical du fait du régime bourgeois, d’une part, et du réformisme confédéral, de l’autre. » (Thèses de Lyon – La question syndicale – 1926)

Voilà pourquoi les communistes doivent mener la lutte politique et idéologique dans la CGIL pour transformer cette grande organisation de masse en un syndicat de classe, toute sortie de la CGIL démontrerait seulement le manque de volonté d’une partie de la gauche à lutter contre le réformisme et représenterait une erreur stratégique, puisqu’elle laisse le champ libre aux politiques capitulardes, de collaboration de classe et corporatistes. Les travailleurs et les délégués syndicaux doivent se réapproprier leur syndicat pour mettre en échec l’hégémonie du réformisme incarné par le PD et qui représente le véritable cancer dans la maison CGIL. Par la voie bureaucratique ou statutaire, les communistes ne conquerront jamais la majorité de la CGIL, ils le feront seulement en unifiant les forces anti-capitalistes autour d’un programme clair, de classe, sans lequel les travailleurs continueront à rester impuissants face au grand capital. Par conséquent, tout en tenant compte de ses limites et sans se nourrir d’illusions ou enjoliver la situation, le document alternatif de la FIOM représente quand même un point de départ politique important que les communistes devraient soutenir dans leur lutte contre la logique du dialogue social et pour ouvrir une forte bataille politique et culturelle sur la question de la démocratie, de la représentation, de l’organisation et du contrôle direct des travailleurs à l’usine. Pour atteindre cet objectif, il faut se donner les moyens adéquats et avoir à l’esprit deux éléments fondamentaux qui sont fondamentalement différents et indépendants entre eux, mais qui appartiennent au même sujet de classe :

*

le premier concerne le travailleur en sa qualité de salarié dont l’organisation (syndicat) représente, justement, la phase de résistance à l’exploitation du capital.

*

Le second concerne le travailleur en sa qualité de producteur de marchandises dont l’organisation (Conseil d’usine) représente la dimension politique la plus importante de sa classe, celle pour le contrôle et la gestion de l’organisation du travail et de la production à laquelle seule l’organisation communiste peut apporter une réponse. Gramsci dit que :

« … La lutte pour la formation et le développement des Conseils d’usine et d’entreprise est, à notre avis, la lutte spécifique du Parti communiste (…) Avec la lutte pour les Conseils il sera possible de conquérir de façon stable et permanente la majorité dans la Confédération (…) Il est, bien sûr, important d’avoir au sein de la Confédération une forte minorité communiste organisée et centralisée, et tous nos efforts de propagande et d’action doivent être employés à atteindre ce but. Mais historiquement et tactiquement il est encore plus important qu’aucun effort ne soit épargné pour qu’aussitôt après le congrès de Livourne il soit possible de convoquer un congrès des Conseils et des Comités d’entreprise de toutes les usines et de toutes les entreprises italiennes, et que ce congrès, institue une centrale englobant dans ses cadres d’organisation toute la masse prolétarienne. » (« La Confédération Générale du Travail », publié dans ’L’ordre nouveau’ du 25 février 1921)

En conclusion, sur la base des conditions matérielles des travailleurs et en partant du document de la FIOM, un point de ralliement pour les travailleurs et pour les communistes pourrait être le terrain de la démocratie ouvrière sur lequel se construiraient des coordinations entre délégués de la RSU, des militants syndicaux disponibles de la CGIL et du syndicalisme extra-confédéral avec les travailleurs communistes qui se fixent comme objectif de libérer la RSU des contraintes électives imposées par les sommets et par les bureaucraties des organisations syndicales de masse.

De cette manière, on peut enclencher une démarche unitaire de classe pour relancer et étendre par le bas de nouvelles formes électives de démocratie directe sur la base des expériences historiques des Conseils d’usine qui représentent les instruments – avec la reconstruction d’un PC et la transformation de la CGIL en un syndicat de classe – pour une lutte projetée vers une perspective de dépassement des rapports de production capitalistes, de socialisation des moyens de production et de construction du socialisme.

Site de Solidarité-Internationale-PCF : http://solidarite-internationale-pc...

Messages

  • Effectivement, la bataille sur la question de la CGIL est une question centrale en Italie.

    Toutefois, la logique développée par le camarade de PRC est enfermante car ne désignant pas le véritable obstacle dans la CGIL, celui qui a empêché cette formidable organisation de barrer la route aux agressions de la bourgeoisie, je nomme la nomenclatura.

    Est pointée là le réformisme, alors qu’il faut chercher dans l’obstacle principal l’existence d’une couche sociale conservatrice qui vit de se situation d’intermédiaire entre bourgeoisie et classe ouvrière, couche dont le réformisme est l’habillage idéologique et qui s’appuie sur le réflexe réformiste basique existant naturellement dans la classe ouvrière, mais dont la réalité passe par l’accompagnement d’agressions contre la classe ouvrière, le désir de maintenir un statu-quo impensable car passant par le maintien de la bourgeoisie aux manettes.

    La CGIL est un colosse immobilisé par cette couche parasitaire, couche plus à l’aise avec la bourgeoisie qu’avec les prolétaires, couche incapable en période de sur-agressivité du capitalisme d’organiser la riposte de la classe ouvrière.

    Le camarade met le doigt sur effectivement la solution idoine, qui permette de :

     repousser les agressions de la bourgeoisie,

     d’unir l’essentiel de la classe

     d’unir sous contrôle des travailleurs

     repousser le pouvoir de la nomenclatura pro capitaliste interne non seulement aux syndicats jaunes mais également dirigeant la CGIL

     d’être l’outil des masses qui permette de transcroitre en pouvoir ouvrier réel.

    Et il cite de fait parmi le dispositif les conseils d’usine .

    Cette solution idoine s’inspire des conseils d’usine et il appelle justement à les développer, mais il a du mal à articuler la question de l’organisation syndicale et la question de structures embryonnaires qui prétendent être ces formes là d’organisations, COBAS et CUB, dont il minimise trop le rôle dans toute une série de batailles.

    L’appareil bureaucratique de la CGIL digère sans trop de mal beaucoup d’oppositions et cela doit faire réfléchir sérieusement.

    En France nous avons eu également ce phénomène qui est beaucoup plus accentué encore du point de vue de la décomposition sans que puissent apparaitre des pratiques qui enrayent la logique de collaboration de classe, source de défaites incessantes ces dernières années (qui soutient Thibault, par exemple, soutient une logique de défaites sociales permanentes).

    Il semble (le camarade de PRC) vouloir un développement des conseils d’usine indépendamment de la question syndicale, et il distingue donc 3 types d’organisations dans la classe ouvrière :

    Dans cette phase politique, l’organisation communiste et les structures en conseils sont à reconstruire, tandis que sur le terrain syndical, c’est la CGIL qu’il faut reconquérir !

    donc,

     l’organisation communiste à re-développer dans la classe ouvrière

     La CGIL a reconquérir

     les conseils d’usine (à élargir pour respecter les contours actuels et secteurs de la classe ouvrière), à construire.

    Mais il nous laisse un peu dans l’attente car il nous manque des précisions sur ce qu’il entend par conseils (structures ? objectifs ? etc) , comment les construire ?

    Le terrain des conseils est forcement en empiètement sur le terrain traditionnel des organisations syndicales, et ces conseils seront forcement petits avant d’être grands.

    L’idéal serait effectivement que, pour la CGIL, la politique des conseil soit l’axe central d’unification de la classe face à la bourgeoisie , afin de doter la classe populaire d’outils suffisamment puissants pour repousser la bourgeoisie.

    Mais voilà, la CGIL n’a pas fait cela, elle a fait l’inverse, vidant de tout son sens l’héritage de Gramsci pour n’en garder qu’une version canada dry consistant à se bureaucratiser, aller dans les institutions et l’appareil d’état.

    Effectivement , et comme en France, la solution anti-bureaucratique et anti-capitaliste, permettant d’unir sur une base ferme une fraction majoritaire des travailleurs, de débloquer le chemin vers le pouvoir des travailleurs est bien le développement de conseils de travailleurs, ce qu’on appelle de ce côté ci des Alpes, les coordinations.

    Mais passer de rien à de tels types d’organisation, seuls capables de repousser la bourgeoisie, nécessite de se cogner aux formes d’organisations intermédiaires y menant afin que ces conseils ou coordinations ne soient pas une division de plus de la classe ouvrière.

    Le processus ne peut également attendre qu’une majorité éclairée apparaisse à la CGIL, la nomenclatura ne le permet pas et on a vu que des oppositions historiques ont jeté de fait l’éponge et soient en voie d’absorption par la bureaucratie.

    Ca ne marche pas comme ça.

    Le processus de construction d’outils d’auto-organisation démocratiques et unitaires sera nécessairement complexe chaotiques, plusieurs origines sont possibles et peuvent s’y mêler .

    Mais une chose est certaine, c’est que c’est la tâche permanente et centrale des communistes et que ceux -ci doivent y travailler méthodiquement.

    Et c’est effectivement le complément indispensable, l’outil qui permet de travailler plus au fond, politiquement, pour renforcer la logique d’auto-organisation démocratique dans la classe.

    En Italie, et...en France.

    Repousser la bourgeoisie est à ce prix et n’est pas dans les combinaisons électorales, ni dans la culture de la négociation qui arrive à une époque où précisément le capital n’est près à négocier que les reculs de la classe.