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Tour de Passe-Passe
Le 24 août dernier Monsieur Philip Schyle Président du Fetia Api, le parti centriste de Polynésie française, a rencontré Mr Hervé Morin Président du Nouveau Centre afin de définir les principes d’un accord politique. Cette rencontre sous la houlette de Jean-Christophe Lagarde, député-maire de Drancy et porte-parole du Nouveau Centre en outre-mer a débouché, le 19 novembre, sur un partenariat financier.
Afin de comprendre les rouages de cet accord, une parenthèse s’impose sur le financement public des partis politiques. Il faut savoir que depuis l’instauration de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, ce qui devait rester une aide financière de l’Etat au profit des partis et groupements politiques, est devenue la première source de financement des partis politiques. Ainsi, chaque année des crédits sont inscrits dans le projet de loi de finances et leur sont affectés. Ces subsides non négligeables se divisent en deux fractions égales : première fraction destinée au financement des partis et groupements en fonction de leurs résultats aux élections à l’Assemblée nationale et la seconde fraction spécifiquement destinée au financement des partis et groupements représentés au Parlement.
Son montant s’élève en 2007 à 73.210 millions d’€ soit : (33 millions au titre de la 1ère fraction et 40 millions au titre de la 2ème fraction) répartis entre plus de 50 partis ou groupements dont 19 dans les collectivités locales d’outre-mer.
En métropole la 1ère fraction est réservée à ceux qui obtiennent au moins 1% des voix dans au moins 50 circonscriptions, mais cette condition ne s’applique pas aux partis d’outre-mer qui reçoivent un financement public dès qu’ils comptabilisent au moins 1% des voix dans la circonscription dans laquelle ils ont présenté des candidats.
Or le Nouveau Centre, malgré son soutien et sa loyauté envers la majorité présidentielle, ne satisfaisant pas à la première condition, se retrouva pécuniairement fort démuni. Il déposa, dans un premier temps, une proposition de loi relative au pluralisme et à l’indépendance des partis politiques, plaidant sa cause en mettant en avant le fait qu’un parti qui rassemble à l’Assemblée nationale un nombre significatif de députés (environ 21 actuellement) ne puisse être considéré comme représentatif au regard des règles mentionnées ci-dessus, parce qu’il n’est pas éligible à la première fraction de l’aide.
A leur grand désespoir, cette proposition de loi (*), modifiant le système du financement public, a été ajournée le 24 octobre dernier, faute de majorité.
En dernier recours, et afin d’obtenir les subsides si convoités, c’est-à-dire de pouvoir toucher au moins la fraction de l’aide de l’état attribuée au prorata du nombre de parlementaires (il s’agit d’environ 45.000 € par élu et par an) le Nouveau Centre a donc conclu le lundi 19 novembre avec le Fetia Api « une convention de financement ».
Il suffit donc que les 21 députés de Nouveau Centre signalent leur rattachement au Fetia Api avant le 30 novembre, auprès de la « commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques » pour que plus de 900.000 € tombent dans l’escarcelle du parti polynésien de Monsieur Philip Schyle.
Cette somme sera, selon la convention signée à Papeete, aussitôt créditée sur le compte du Nouveau Centre qui, en contrepartie, versera une commission (une « ristourne » !) de 20.000 € au parti polynésien selon le Monde.
M. de Courson, trésorier du Nouveau Centre, a précisé selon l’Agence France Presse du 19 novembre 2007, que « le Fétia Api se réservera cette commission pour aider à développer leur mouvement en Polynésie ».
François Sauvadet, le chef de file des députés du Nouveau Centre a indiqué : « qu’il s’agit d’une solution provisoire et qu’il continuera à lutter pour la défense du pluralisme dans le cadre du débat sur les institutions au printemps prochain »
Ce montage financier, qui donne le tournis, soulève deux interrogations :
1/ Le dispositif des lois de 1988 mis en place pour lutter contre les financements obscurs destinés aux partis politiques, ne serait-il pas l’arbre qui cache une forêt perverse multipliant les candidatures afin d’obtenir cette manne étatique tant convoitée ?
2/ Que pense la Commission nationale des comptes de campagne de cette « manipulation financière » ? Est-elle autorisée ?
Si certains se réjouissent d’avoir contourné leurs difficultés financières par ce biais scabreux, l’opinion publique ne peut qu’être scandalisée par autant de désinvolte et de mépris vis-à-vis des deniers publics.
* Site du Sénat- Tahitipresse- journal officiel du 27 janvier 2007 texte 3 (à lire absolument) le Monde – proposition de loi de MM Sauvadet, de Courson et Lagarde.